Interdiction de l’abaya à l’école: les réactions s’enchaînent en France

Des élèves lors de l'affichage des résultats du baccalauréat général français au lycée Pasteur de Strasbourg, dans l'est de la France, le 4 juillet 2023. La décision du gouvernement français d'interdire aux élèves de porter des abayas - des robes longues et fluides d'origine moyen-orientale - a ouvert un nouveau débat sur les lois laïques du pays et le traitement des minorités musulmanes. (Photo Frederick FLORIN / AFP)
Des élèves lors de l'affichage des résultats du baccalauréat général français au lycée Pasteur de Strasbourg, dans l'est de la France, le 4 juillet 2023. La décision du gouvernement français d'interdire aux élèves de porter des abayas - des robes longues et fluides d'origine moyen-orientale - a ouvert un nouveau débat sur les lois laïques du pays et le traitement des minorités musulmanes. (Photo Frederick FLORIN / AFP)
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Publié le Mardi 29 août 2023

Interdiction de l’abaya à l’école: les réactions s’enchaînent en France

  • «Vous rentrez dans une salle de classe, vous ne devez pas être capable d’identifier la religion des élèves en les regardant», a estimé Gabriel Attal
  • «La consigne n’était pas claire; désormais elle l’est et nous nous en félicitons», s’est réjoui le secrétaire général du Syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale

PARIS: Il fallait s’y attendre. Les réactions – de félicitations ou d’indignation – n’ont pas tardé après l’annonce de l’interdiction de l’abaya dans les établissements scolaires français, ce dimanche 27 août. «J’ai décidé qu’on ne pourrait plus porter d’abaya à l’école», a en effet déclaré Gabriel Attal dimanche soir sur le plateau du JT de TF1. Pour le ministre de l’Éducation nationale, cette longue robe traditionnelle portée par certaines élèves musulmanes est l’expression d’«un geste religieux, visant à tester la résistance de la République sur le sanctuaire laïque que doit constituer l’école». «Vous rentrez dans une salle de classe, vous ne devez pas être capable d’identifier la religion des élèves en les regardant», a-t-il estimé.

Ses collègues au gouvernement n’ont pas manqué de le soutenir. Gabriel Attal «a mille fois raison», a déclaré le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, sur France Inter. «Non à l’abaya, non à tous les signes religieux ostensibles et non à l’islam politique dans notre pays!» Le locataire de Bercy a renchéri en ces termes: «Oui, c’était une urgence de dire stop et de dire non, de se mettre derrière le personnel enseignant qui réclamait des consignes claires.»

«La consigne n’était pas claire; désormais elle l’est et nous nous en félicitons», s’est réjoui de son côté Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du Syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale. «Maintenant que le message est énoncé, il faut que cela se mette en œuvre dans les établissements. […] Il ne faut pas que les chefs d’établissement soient seuls face aux abayas», a-t-il demandé.

«On vient à l’école non pas pour faire du prosélytisme religieux, mais pour apprendre», a estimé sur BFM TV et sur RMC Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement. Ce dernier a dénoncé une forme de «prosélytisme» à travers le port de ce vêtement. Il a expliqué que cette décision avait été prise en prenant d’abord en compte les proviseurs qui avaient demandé un soutien plus fort de la part de leur ministère. «L’école, c’est un temple de la laïcité», a martelé Olivier Véran.

Une interdiction saluée à droite

Sans surprise, cette décision a été saluée à droite. Éric Ciotti (Les Républicains) a soutenu que «le communautarisme est une lèpre qui menace la République», avant de rappeler, dans un message publié sur X (anciennement Twitter): «Nous avions réclamé à plusieurs reprises l’interdiction des abayas dans nos écoles.»

Le communautarisme est une lèpre qui menace la République.

Nous avions réclamé à plusieurs reprises l’interdiction des abayas dans nos écoles.

Je salue la décision du Ministre de l’Éducation nationale qui nous donne raison. https://t.co/Eyr3G4K4vt

— Eric Ciotti (@ECiotti) August 27, 2023

Toujours sur X, Éric Zemmour a lui aussi salué une annonce qu’il réclame depuis plusieurs mois. «L’interdiction des abayas est un premier bon pas si elle est appliquée», assure le président du parti «Reconquête!», avant de demander à aller encore «plus loin» en proposant «la généralisation du port de l’uniforme pour éviter toute provocation islamique à l’école».

L’interdiction des abayas est un premier bon pas si elle est appliquée.
Avec les @ParentsVigil nous réclamons cette interdiction depuis plusieurs mois et allons même plus loin en proposant la généralisation du port de l’uniforme pour éviter toute provocation islamique à l’école. https://t.co/CsgWGtKzJp

— Eric Zemmour (@ZemmourEric) August 28, 2023

La gauche divisée

À gauche, cependant, la mesure divise. Fabien Roussel a salué cette interdiction «parce que les chefs d'établissement avaient besoin de consignes claires, même si cela concerne 150 établissements sur 60 000», a souligné le patron du PCF sur Sud Radio.

Oui, la décision sur l’abaya était nécessaire pour ne pas laisser seuls les chefs d’établissement.

Non, ce n’est pas la priorité de la rentrée.

La priorité, c’est une éducation de qualité et vraiment gratuite pour toutes et tous. pic.twitter.com/KdDsim1sex

— Fabien Roussel (@Fabien_Roussel) August 28, 2023

Du côté du Parti socialiste (PS), les réactions sont venues du député Jérôme Guedj, qui rappelle que «notre boussole, c’est l’interdiction des signes ostensibles à l’école. Dès l’instant où l’abaya ou le qamis [vêtement long masculin, NDLR] sont portés dans une dimension ostentatoire, alors il faut les interdire comme la loi de 2004 le permet, sans difficultés majeures». Le maire PS de Montpellier, Michaël Delafosse, a expliqué sur X que «le principe de #laïcité doit être affirmé avec clarté. La loi de 2004 interdit les symboles religieux dans le cadre scolaire. Le prosélytisme religieux n’y a pas sa place».

Le principe de #laïcité doit être affirmé avec clarté. La loi de 2004 interdit les symboles religieux dans le cadre scolaire. Le prosélytisme religieux n’y a pas sa place. La prise de position du ministre ferme sur les #abayas est un signal très important qui doit dire consensus.

— Michaël Delafosse (@MDelafosse) August 27, 2023

En revanche, l’interdiction ne passe pas chez La France insoumise (LFI), qui le fait savoir haut et fort. «Tristesse de voir la rentrée scolaire politiquement polarisée par une nouvelle absurde guerre de religion entièrement artificielle à propos d’un habit féminin», a réagi Jean-Luc Mélenchon sur X. À quand la paix civile et la vraie laïcité, qui unit au lieu d’exaspérer?», s’est demandé le leader du parti.

Tristesse de voir la rentrée scolaire politiquement polarisée par une nouvelle absurde guerre de religion entièrement artificielle à propos d'un habit féminin. À quand la paix civile et la vraie laïcité qui unit au lieu d'exaspérer ?

— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) August 28, 2023

«Jusqu'où ira la police du vêtement? La proposition de @Gabriel_attal est anticonstitutionnelle. Contraire aux principes fondateurs de la laïcité. Symptomatique du rejet obsessionnel des musulmans», s'est indignée sur X la députée LFI Clémentine Autain. Cette dernière a considéré que, «à peine rentrée, la macronie tente déjà de prendre le Rassemblement national [RN] par la droite».

Jusqu'où ira la police du vêtement ?
La proposition de @Gabriel_attal est anticonstitutionnelle.
Contraire aux principes fondateurs de la laïcité.
Symptomatique du rejet obsessionnel des musulmans.

À peine rentrée, la macronie tente déjà de prendre le RN par la droite. https://t.co/2j0tClzL59

— Clémentine Autain (@Clem_Autain) August 27, 2023

Pour la députée insoumise Danièle Obono, «l’interdiction de l'#abaya est antilaïque, sexiste et raciste. La macronie impose un sens religieux à ce vêtement alors que les autorités du culte concerné disent qu'il n'en a pas».

?#BFMTV L'interdiction de l'#abaya est anti-laïque, sexiste et raciste. La Macronie impose un sens religieux à ce vêtement alors que les autorités du culte concerné disent qu'il n'en a pas ; vise spécifiquement un habillement féminin ; et stigmatise la seule religion musulmane. pic.twitter.com/nMseqfRMhp

— Députée Obono (@Deputee_Obono) August 28, 2023

«On a des nouvelles du nouveau ministre de l’Éducation: Gabriel Ciotti. Son obsession? Les musulmans. Plus précisément, les musulmanes», a raillé de son côté la présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot.

On a des nouvelles du nouveau ministre de l’Éducation : Gabriel Ciotti. Son obsession ? Les musulmans.
Plus précisément, les musulmanes. Pour ne pas changer. https://t.co/4WUGfxfl0y

— Mathilde Panot (@MathildePanot) August 27, 2023

Pour la députée Sandrine Rousseau, cette décision prévoit un nouveau «contrôle social sur le corps des femmes et des jeunes filles» après «l’interdiction du crop top, qui était annoncée le 12 septembre 2022».

L’année dernière c’était l’interdiction du crop top qui était annoncée le 12 sept 2022. Cette année, c’est l’abaya.

Le contrôle social sur le corps des femmes et des jeunes filles, toujours. pic.twitter.com/ZDzcPVe6aC

— Sandrine Rousseau (@sandrousseau) August 27, 2023

David Guiraud, député LFI du Nord, a rejoint sa collègue en constatant que «le premier acte du nouveau ministre de l’Éducation nationale n’aura donc pas été d’ouvrir des écoles, ni de revaloriser les salaires des personnels, ni d’ouvrir des postes pour accompagner les élèves en situation de handicap, mais d’interdire un vêtement. Tirez-en vos conclusions».

Le premier acte du nouveau Ministre de l’Éducation Nationale n’aura donc pas été d’ouvrir des écoles, ni de revaloriser les salaires des personnels, ni d’ouvrir des postes pour accompagner les élèves en situation de handicap, mais d’interdire un vêtement. Tirez-en vos conclusions https://t.co/yJPFUa8oby

— David Guiraud (@GuiraudInd) August 27, 2023

Un constat partagé par Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat Snes-FSU, qui a estimé sur France Inter que «le sujet principal de cette rentrée n’est pas le port de l’abaya. Il ne faudrait pas que cela vienne masquer l’ensemble des problèmes de l’école lors de cette rentrée». Selon elle, seulement «quelques milliers d’adolescentes portent ce vêtement» et, «dans 95% des cas, ces situations se dénouent par le dialogue».

Le vice-président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Abdallah Zekri, a également regretté cette décision: «Je pense que le ministre aurait pu échanger, demander l’avis des responsables religieux. Pour moi, l’abaya n’est pas une tenue religieuse, c’est une forme de mode», a-t-il déclaré sur BFM TV.


Macron franchit un pas symbolique: la reconnaissance de la Palestine en septembre prochain

Après des mois d’hésitation, la France a tranché : le président Emmanuel Macron reconnaîtra officiellement l’État de Palestine en marge de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre prochain. (AFP)
Après des mois d’hésitation, la France a tranché : le président Emmanuel Macron reconnaîtra officiellement l’État de Palestine en marge de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre prochain. (AFP)
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  • La décision a été transmise ce jeudi 24 juillet par le consul général de France à Jérusalem, Nicolas Cassianides, au président palestinien Mahmoud Abbas, en réponse à une lettre adressée le 9 juin par ce dernier
  • Dans sa réponse, le chef de l’État français affirme sa volonté de donner corps à l’engagement historique de la France pour une paix juste au Proche-Orient, dans le sillage du discours de François Mitterrand à la Knesset en 1982 et du vote français de 2012

PARIS: Après des mois d’hésitation, la France a tranché : le président Emmanuel Macron reconnaîtra officiellement l’État de Palestine en marge de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre prochain.

Cette décision intervient dans un contexte d’escalade sans précédent de la violence israélienne à Gaza et en Cisjordanie. Elle se veut également, selon l’Élysée, un geste diplomatique « exigeant », loin d’un quelconque « cadeau » au mouvement Hamas.

La décision a été transmise ce jeudi 24 juillet par le consul général de France à Jérusalem, Nicolas Cassianides, au président palestinien Mahmoud Abbas, en réponse à une lettre adressée le 9 juin par ce dernier à Emmanuel Macron et au prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Le récent vote de la Knesset en faveur de l’annexion pure et simple de la Cisjordanie a été qualifié par la diplomatie française de « coup supplémentaire porté aux aspirations légitimes des Palestiniens ».

Dans sa réponse, le chef de l’État français affirme sa volonté de donner corps à l’engagement historique de la France pour une paix juste au Proche-Orient, dans le sillage du discours de François Mitterrand à la Knesset en 1982 et du vote français de 2012 en faveur du statut d’État non membre de la Palestine à l’ONU.

Cette reconnaissance, que Macron évoque depuis février 2024 — notamment lors d’une conférence de presse commune avec le roi Abdallah de Jordanie — se concrétise alors que le conflit israélo-palestinien entre dans une phase particulièrement meurtrière, marquée par des bombardements intensifs sur Gaza et des menaces d’annexion de la Cisjordanie.

Le choix du calendrier n’est pas anodin. Depuis les attaques du 7 octobre 2023 menées par le Hamas, Israël mène une offensive d’une violence inouïe sur la bande de Gaza.

Le président français avait condamné avec fermeté les attentats terroristes du Hamas, mais il a exprimé des doutes sur les objectifs militaires poursuivis par le gouvernement Netanyahou.

Les conséquences sont connues de tous : des dizaines de milliers de morts, une population déplacée à répétition, soumise à la famine et à la malnutrition, et une enclave totalement ravagée.

En Cisjordanie, la situation est loin d’être plus stable. L’intensification de la colonisation, en particulier le projet de construction dans la colonie d’Ewan, menace de morceler irrémédiablement le territoire et de rendre impossible la création d’un État palestinien viable.

Le récent vote de la Knesset en faveur de l’annexion pure et simple de la Cisjordanie a été qualifié par la diplomatie française de « coup supplémentaire porté aux aspirations légitimes des Palestiniens ».

Dans ce contexte, Macron estime que la reconnaissance de la Palestine s’inscrit dans une stratégie diplomatique plus large, fruit d’une coopération franco-saoudienne.

Une première conférence de haut niveau se tient cette semaine à New York, avec la participation de 40 ministres. Une deuxième phase aura lieu en septembre, à un niveau plus élevé. Ni Israël ni les États-Unis n’ont cependant confirmé leur participation à la réunion ministérielle, laissant supposer qu’ils seront absents.

Face aux critiques, le président Macron a tenu à clarifier une chose : la reconnaissance de l’État palestinien n’est en rien un signe d’acquiescement envers le Hamas. Bien au contraire, elle vise à redonner un rôle central aux acteurs politiques ayant renoncé à la violence, et à isoler les groupes terroristes.

Cette initiative vise à définir un « cadre politique collectif » déjà énoncé à maintes reprises : cessez-le-feu à Gaza, libération des otages, stabilisation régionale, désarmement du Hamas et réforme en profondeur de l’Autorité palestinienne.

La reconnaissance française se fonde aussi sur des engagements « clairs et sans précédent » pris par Mahmoud Abbas : la condamnation explicite des attentats du 7 octobre, l’engagement pour le désarmement du Hamas, et surtout l’annonce d’élections législatives et présidentielles en 2026.

Une loi interdisant la participation des partis refusant la renonciation à la violence et la reconnaissance d’Israël est en cours d’élaboration.

Face aux critiques, le président Macron a tenu à clarifier une chose : la reconnaissance de l’État palestinien n’est en rien un signe d’acquiescement envers le Hamas. Bien au contraire, elle vise à redonner un rôle central aux acteurs politiques ayant renoncé à la violence, et à isoler les groupes terroristes.

« C’est l’inverse d’un cadeau au Hamas », affirme l’Élysée. « C’est un effort pour réhabiliter une Autorité palestinienne affaiblie, mais qui reste la seule entité palestinienne à avoir reconnu Israël et renoncé au terrorisme. »

Sur la scène intérieure, la décision de Macron suscite des réactions contrastées, voire virulentes. Le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) parle d'une « faute morale », tandis que l’ambassadeur d’Israël en France, Joshua Zarka, fustige une décision « dangereuse ».

À l’extrême droite, la cheffe de file du Rassemblement national, Marine Le Pen, dénonce « la légitimation des massacreurs du 7 octobre » et affirme que « reconnaître un État palestinien aujourd’hui, c’est reconnaître un État Hamas ».

À droite, les critiques sont moins outrancières mais tout aussi sceptiques, arguant que cette reconnaissance est précipitée, voire contre-productive. Les partis de gauche et d’extrême gauche l’ont accueillie avec froideur, saluant le symbole, mais regrettant le manque d’effets concrets immédiats sur le terrain.

Reste la grande question : que changera réellement cette reconnaissance pour les Palestiniens, pour les habitants de Gaza soumis à une catastrophe humanitaire d’ampleur, et pour les territoires morcelés de Cisjordanie menacés d’annexion ?

La décision française reste avant tout symbolique. Elle tente de rouvrir une voie diplomatique dans un paysage ravagé, mais elle n’effacera ni l’asymétrie des forces sur le terrain, ni l’impasse militaire et politique actuelle, avec l’échec des pourparlers à Doha. Et elle ne soignera en rien les stigmates de ce que les Gazaouis endurent depuis bientôt deux ans.


Le Libanais Georges Abdallah, libre après 40 ans de prison en France, s'est envolé pour Beyrouth

Des personnes se rassemblent devant la prison de Lannemezan pour célébrer la libération du Libanais Georges Ibrahim Abdallah, fondateur des Factions armées révolutionnaires libanaises (FARL) et ancien membre du FPLP condamné à la prison à perpétuité en 1987 pour complicité dans le meurtre de deux diplomates américains et israéliens en 1982, à Lannemezan, dans le sud-ouest de la France, le 17 juillet 2025.  (AFP)
Des personnes se rassemblent devant la prison de Lannemezan pour célébrer la libération du Libanais Georges Ibrahim Abdallah, fondateur des Factions armées révolutionnaires libanaises (FARL) et ancien membre du FPLP condamné à la prison à perpétuité en 1987 pour complicité dans le meurtre de deux diplomates américains et israéliens en 1982, à Lannemezan, dans le sud-ouest de la France, le 17 juillet 2025. (AFP)
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  • Ses proches espèrent qu'il sera accueilli au "salon d'honneur" de l'aéroport de Beyrouth. Ils ont demandé l'autorisation aux autorités libanaises, qui réclamaient depuis des années à la France sa libération
  • Georges Abdallah ira ensuite dans son village natal de Kobayat (nord du Liban), où "un accueil populaire et officiel lui sera réservé" selon sa famille

LANNEMEZAN: Georges Ibrahim Abdallah est libre, et bientôt de retour chez lui après 40 ans derrière les barreaux en France. Le militant libanais propalestinien, condamné dans les années 1980 pour complicité d'assassinats de diplomates américain et israélien, a quitté sa prison vendredi et s'est envolé vers Beyrouth dans la matinée.

L'avion le transportant vers le Liban a décollé peu après 09H30 (07H30 GMT) du tarmac de l'aéroport de Roissy, en région parisienne, a indiqué une source aéroportuaire.

Vers 03H40 (01H40 GMT), un convoi de plusieurs véhicules, dont deux vans noirs, s'était élancé du centre pénitentiaire de Lannemezan (sud-ouest) où était emprisonné Georges Abdallah, gyrophares allumés, avait constaté une équipe de l'AFP sans pouvoir apercevoir le militant à la barbe désormais blanche.

Une source proche du dossier a confirmé à l'AFP que l'ancien instituteur âgé aujourd'hui de 74 ans était bien sorti. Il s'était ensuite envolé d'un aéroport voisin pour la région parisienne.

"Il était bien, en bonne santé, très heureux de retourner au Liban auprès de sa famille et de retrouver la liberté après plus de 40 ans", a dit à l'AFP le chargé d'affaires de l'ambassade du Liban à Paris, Ziad Taan, qui l'a vu à Roissy avant son départ.

Georges Abdallah avait "aussi eu des bons mots à l'égard des responsables de la prison de Lannemezan", saluant "le traitement humain" reçu sur place, a-t-il précisé.

La cour d'appel de Paris a ordonné sa libération la semaine dernière, "à compter du 25 juillet", à condition qu'il quitte le territoire français et n'y revienne plus. Il était libérable depuis 1999 mais avait vu ses demandes échouer.

"Quarante ans, c'est beaucoup, mais on ne les sent pas quand il y a une dynamique de lutte", avait-il assuré à l'AFP qui l'avait rencontré le jour de la décision de libération, dans sa cellule, en accompagnant une parlementaire.

"Très heureux" 

Le parquet général de Paris a annoncé lundi un pourvoi en cassation contre cette décision. Le recours, qui ne sera pas examiné avant plusieurs semaines, n'est pas suspensif et ne pouvait empêcher le départ de Georges Abdallah.

Selon son avocat Jean-Louis Chalanset, qui l'a vu dans sa prison jeudi, "il semblait très heureux de sa prochaine libération, même s'il sait qu'il arrive au Moyen-Orient dans un contexte extrêmement lourd pour les populations libanaises et palestiniennes".

Ces derniers jours, Georges Abdallah a donc vidé sa cellule, décorée d'un drapeau rouge de Che Guevara et débordant de piles de journaux et de livres, qu'il a confiés à son comité de soutien.

Il a donné la majorité de ses vêtements à des codétenus, et n'emporte qu'"une petite valise", selon son avocat.

Ses proches espèrent qu'il sera accueilli au "salon d'honneur" de l'aéroport de Beyrouth. Ils ont demandé l'autorisation aux autorités libanaises, qui réclamaient depuis des années à la France sa libération.

Georges Abdallah ira ensuite dans son village natal de Kobayat (nord du Liban), où "un accueil populaire et officiel lui sera réservé" selon sa famille.

La durée de sa détention est "disproportionnée" par rapport aux crimes commis et au vu de l'âge de l'ancien chef des FARL (Fractions armées révolutionnaires libanaises), avaient jugé les magistrats de la cour d'appel.

"Symbole passé" 

Ce groupuscule de chrétiens libanais marxistes, dissous depuis longtemps, n'a "pas commis d'action violente depuis 1984", a aussi rappelé la cour, voyant en Georges Abdallah un "symbole passé de la lutte palestinienne".

Tout en regrettant qu'il n'ait pas exprimé de "regret ou compassion pour les victimes qu'il considère comme des ennemis", les juges ont estimé que Georges Abdallah, qui veut "finir ses jours" dans son village, peut-être en s'engageant en politique locale, ne représente plus de risque de trouble à l'ordre public.

A l'époque des faits, dans le contexte de la guerre civile libanaise et de l'invasion israélienne au Sud-Liban en 1978, les FARL ciblaient les intérêts d'Israël et de son allié américain à l'étranger.

Avant l'arrestation de Georges Abdallah en 1984, le groupuscule avait frappé cinq fois en France, tuant deux diplomates en 1982: le lieutenant-colonel américain Charles Ray, puis l'Israélien Yacov Barsimantov, considéré comme le responsable du Mossad en France, abattu par une femme devant son épouse et ses deux enfants.

Identifié par ses empreintes découvertes dans une planque bourrée d'explosifs et d'armes dont le pistolet qui avait servi aux deux assassinats, Georges Abdallah avait comparu seul en 1987 : il était devenu l'ennemi public numéro 1 et le prisonnier le plus célèbre de France car on le croyait, à tort, derrière la vague d'attentats de 1985-86 qui a fait 13 morts. Il avait été condamné à la perpétuité.

Il a toujours nié son implication dans l'assassinat des diplomates, tout en refusant de condamner des "actes de résistance" contre "l'oppression israélienne et américaine".

 


France: un voilier intercepté près des côtes anglaises pour transport de migrants

Mercredi, le gouvernement britannique a annoncé des gels d'avoirs et interdictions de séjour au Royaume-Uni dans le cadre d'un nouveau régime de sanctions visant les réseaux d'immigration clandestine. (AFP)
Mercredi, le gouvernement britannique a annoncé des gels d'avoirs et interdictions de séjour au Royaume-Uni dans le cadre d'un nouveau régime de sanctions visant les réseaux d'immigration clandestine. (AFP)
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  • L'équipage de ce voilier était composé de "deux ressortissants ukrainiens âgés de 43 et 37 ans", précise dans ce communiqué la procureure de Lille Carole Étienne
  • Ils ont été arrêtés par la police britannique ainsi que "quatre ressortissants albanais et un ressortissant vietnamien" qui se trouvaient à bord

LILLE: Un voilier parti du Havre, en France, dimanche en transportant des Albanais et un Vietnamien a été intercepté alors qu'il approchait des côtes anglaises et une enquête a été ouverte pour aide au séjour irrégulier, a annoncé vendredi le parquet français.

L'équipage de ce voilier était composé de "deux ressortissants ukrainiens âgés de 43 et 37 ans", précise dans ce communiqué la procureure de Lille Carole Étienne. Ils ont été arrêtés par la police britannique ainsi que "quatre ressortissants albanais et un ressortissant vietnamien" qui se trouvaient à bord.

Le voilier, qui était visé par une enquête depuis plusieurs jours, a été intercepté au large de l'île de Wight, tout près des côtes anglaises et de la ville de Portsmouth.

"Ce navire qui disposait d'une place au port du Havre avait attiré l'attention de la gendarmerie maritime (...) pour des faits d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'étrangers en bande organisée", explique Mme Étienne.

"Les premières investigations ont mis en évidence un réseau de passeurs de dimension internationale", souligne-t-elle.

Une enquête préliminaire a été ouverte pour participation à une association de malfaiteurs et aide, en bande organisée, à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France et sur le territoire d'un Etat partie au protocole contre le trafic illicite de migrants, comme c'est le cas du Royaume-Uni.

Le gouvernement britannique tente d'endiguer les arrivées de migrants par la mer. Plus de 23.500 migrants sont arrivés depuis le début de l'année par la mer, sur de petites embarcations. Il s'agit habituellement de petites embarcations pneumatiques, souvent surchargées.

Mercredi, le gouvernement britannique a annoncé des gels d'avoirs et interdictions de séjour au Royaume-Uni dans le cadre d'un nouveau régime de sanctions visant les réseaux d'immigration clandestine.

Le 10 juillet, Londres et Paris se sont mis d'accord sur un projet d'échange de migrants. Il prévoit que pour le renvoi en France d'une personne arrivant au Royaume-Uni par petit bateau, Londres s'engage à en accepter une autre se trouvant en France et exprimant la volonté de s'installer au Royaume-Uni en justifiant de liens avec ce pays. Cet accord doit encore être soumis à la Commission européenne.