De la guerre aux gitans de Barcelone, «l'esprit nomade» du photographe Jacques Léonard souffle sur Arles

Après avoir travaillé pour le studio Gaumont à Paris, notamment auprès du cinéaste Abel Gance, ce fils d'un éleveur de chevaux gitan et d'une mère tenant une maison de couture, réalise en Espagne des reportages comme photojournaliste. (AFP).
Après avoir travaillé pour le studio Gaumont à Paris, notamment auprès du cinéaste Abel Gance, ce fils d'un éleveur de chevaux gitan et d'une mère tenant une maison de couture, réalise en Espagne des reportages comme photojournaliste. (AFP).
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Publié le Vendredi 02 juin 2023

De la guerre aux gitans de Barcelone, «l'esprit nomade» du photographe Jacques Léonard souffle sur Arles

  • Peu connu en France, ce photographe né à Paris au début du XXe siècle a fait de l'Espagne, qu'il découvre à l'occasion de repérages pour un film, sa terre d'adoption à partir des années 1950
  • Même si la carrière de Jacques Léonard se concentre sur une courte période, de 1943 à 1975, date à laquelle il arrête la photographie, le fonds est "énorme puisque actuellement sont conservés plus de 20 000 clichés

ARLES: Déplacements de population durant la guerre, vie quotidienne du Barcelone des années 1960 et particulièrement de sa communauté gitane: un même regard empli d'humanité traverse les images en noir et blanc du photographe Jacques Léonard, auquel Arles consacre cet été la première rétrospective.

Peu connu en France, ce photographe né à Paris au début du XXe siècle a fait de l'Espagne, qu'il découvre à l'occasion de repérages pour un film, sa terre d'adoption à partir des années 1950, date à laquelle il épouse Rosario Amaya, une gitane de Barcelone qui lui ouvrira les portes des bidonvilles de Somorrostro et de Montjuïc, en périphérie de la capitale catalane.

Mais "Jacques Léonard, ce ne sont pas que les gitans", relève Daniel Rouvier, directeur du musée Réattu d'Arles où sont exposés jusqu'au 1er octobre quelque 150 clichés du photographe français, "esprit nomade" dont il a souhaité faire connaître le travail "dans sa globalité".

Même si la carrière de Jacques Léonard se concentre sur une courte période, de 1943 à 1975, date à laquelle il arrête la photographie, le fonds est "énorme puisque actuellement sont conservés plus de 20 000 clichés, que ce soient des négatifs ou des tirages vintage" sur papier argentique, précise M. Rouvier, également commissaire de l'exposition.

Des archives valorisées depuis 2009 par la fondation "Photographic Social Vision" de Barcelone mais qui ne constituent "qu'une petite part de ce qu'il a produit", ajoute-t-il, soit les images sauvées par ses deux fils après l'inondation de son studio photo.

"C'est la première rétrospective de Jacques Léonard, que ce soit en France ou en Espagne", insiste M. Bouvier, puisque seuls certains aspects de son oeuvre avaient été montrés jusqu'à présent, ses photos sur les gitans en particulier, ou encore celles sur les évadés français ayant transité par l'Espagne en 1943 pour rejoindre les armées de la France libre.

Ces dernières sont présentées, dans l'exposition, en regard d'une autre série historique - inédite - rendant compte du retour en Espagne, neuf ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, des membres survivants de la "Division Azul", des volontaires recrutés par Franco pour aider l'Allemagne nazie dans l'invasion de la Russie.

«Bienveillance»

"Ces déplacements de population intéressent beaucoup Léonard", du fait aussi de ses liens avec la communauté gitane et il les traite toujours avec un "regard humaniste": "Ce sont les gens qui l'intéressent", développe M. Rouvier.

Après avoir travaillé pour le studio Gaumont à Paris, notamment auprès du cinéaste Abel Gance, ce fils d'un éleveur de chevaux gitan et d'une mère tenant une maison de couture, réalise en Espagne des reportages comme photojournaliste, un travail de commande où sa patte artistique est déjà visible.

Jacques Léonard "construit ses images, il raconte une histoire", poursuit le commissaire, pour qui "on sent son lien au cinéma" dans la composition.

"Il se promène toujours avec son appareil photo et quand il y a des sujets qui l'intéressent, il déclenche". Certaines de ces photos - souvent prises de dos - montrent des couples ou des touristes face à la mer à Barcelone ou encore des hommes faisant la sieste sur la Rambla, grande promenade de la ville.

"Ses images sont à la fois documentaires et artistiques", ajoute le commissaire.

Ainsi des nombreuses photos personnelles qu'il réalise en immersion dans la communauté gitane de Barcelone, devenue sa famille, et qui ne sont pas sans rappeler celles réalisées, notamment lors du pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer (Sud-Est de la France), par le photographe arlésien Lucien Clergue, l'un des pères fondateurs des Rencontres internationales de la photographie, à la programmation desquelles l'exposition Jacques Léonard est associée.

"J'ai retrouvé dans les photos absolument magnifiques de Jacques Léonard ce même regard plein de bienveillance que pouvait avoir mon père sur les gitans", témoigne Anne Clergue, sa fille qui a été la première à exposer Jacques Léonard dans sa galerie en 2020 et qui lui consacrera une nouvelle exposition cet été.


TF Bakery, une boulangerie pâtisserie qui allie authenticité et qualité

TF Bakery , Riyad (Photo Fournie)
TF Bakery , Riyad (Photo Fournie)
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  • Nichée dans une rue discrète du quartier d’Al Oumra à Riyad, cette boulangerie séduit par ses viennoiseries inspirées d'Europe, son esthétique épurée et son atmosphère conviviale.
  • Autodidacte, il a appris les techniques en lisant, en expérimentant et en s’inspirant des grands classiques. « Je n’ai pas étudié la boulangerie dans une école. J’ai beaucoup lu, pratiqué et essayé. C’est un travail qui demande passion et constance.

RIYAD : Le secteur de la boulangerie-pâtisserie connaît une véritable effervescence dans ce pays. Porté par une jeunesse curieuse, une ouverture culturelle accrue et une quête de qualité, il s’impose comme l’un des marchés les plus dynamiques du pays.

Autrefois centré sur les produits traditionnels tels que le samoon ou le pain arabe, il propose désormais des viennoiseries feuilletées, des gâteaux design, des options bio et sans gluten. Estimé entre 2,5 et 3 milliards de dollars, il affiche une croissance annuelle de 6 à 8 %.

Dans les grandes villes comme Riyad ou Djeddah, les enseignes internationales côtoient désormais des concepts locaux innovants. Parmi eux, TF Bakery s’est rapidement imposée comme une adresse incontournable.

Nichée dans une rue discrète du quartier d’Al Oumra à Riyad, cette boulangerie séduit par ses viennoiseries inspirées d'Europe, son esthétique épurée et son atmosphère conviviale. Fondée par le jeune chef Talal Fahad Al-Saoud, issu de la famille royale, TF Bakery reflète parfaitement cette nouvelle génération d’artisans boulangers qui conjuguent tradition, audace et minimalisme.

Rencontré dans son établissement en pleine effervescence matinale, Talal Al-Saoud raconte avec modestie les débuts de son aventure. « Il y a dix ans, il n'y avait pas beaucoup de vraies boulangeries artisanales ici. C’est ce manque d’options, combiné à mon intérêt pour la pâtisserie européenne, qui m’a poussé à me lancer », explique-t-il.

Autodidacte, il a appris les techniques en lisant, en expérimentant et en s’inspirant des grands classiques. « Je n’ai pas étudié la boulangerie dans une école. J’ai beaucoup lu, pratiqué et essayé. C’est un travail qui demande passion et constance. Il faut aimer ce que l’on fait pour continuer, même sans certitude de résultat. »

Chez TF Bakery, la carte mise avant tout sur la qualité et l’authenticité. Pas de démesure, mais un vrai sens du goût et de la précision. Talal insiste sur le fait que la simplicité reste au cœur de son offre. « Pour moi, un bon produit doit être juste et maîtrisé. Parfois, ce sont les choses les plus simples qui plaisent le plus. Un pain au lait moelleux, une pâte bien levée, un équilibre de saveurs... », dit-il en souriant. Parmi les incontournables, le croissant aux amandes et aux dattes ou encore le Maritozzo Chantilly font le bonheur d’une clientèle fidèle.

Bien qu’il n’ait jamais participé à des concours, Talal n’exclut pas qu’il pourrait un jour représenter la boulangerie saoudienne à l’international. « Je n’aime pas forcément être sous les projecteurs. Ce qui m’importe, c’est de continuer à proposer des produits de qualité, dans un lieu qui me ressemble. Mais à terme, pourquoi ne pas développer de nouvelles adresses. » Il évoque d’ailleurs le souhait d’étendre son concept, tout en conservant l’esprit artisanal de ses débuts.

TF Bakery illustre à elle seule l’évolution du secteur dans le Royaume. La digitalisation, les plateformes de livraison comme Jahez ou HungerStation, et l’implantation de franchises internationales redessinent aujourd’hui les habitudes de consommation. Les exigences en matière de santé et de durabilité influencent également les pratiques : farines alternatives, recettes véganes ou sans allergènes deviennent monnaie courante.

En parallèle, la formation se renforce avec de nouvelles écoles spécialisées et une participation croissante aux salons professionnels comme Foodex Saudi ou Saudi Horeca. Le tout sous l’encadrement rigoureux de la Saudi Food and Drug Authority, garante de la qualité et de la sécurité des produits.

Entre passion, innovation et retour aux fondamentaux, la boulangerie-pâtisserie saoudienne écrit une nouvelle page de son histoire. Et avec des figures comme Talal Al-Saoud, elle affirme sa capacité à allier enracinement local et ouverture sur le monde. 


Les créateurs de jeux électroniques saoudiens se distinguent au camp d'entraînement « Zero to Hero » de Riyad

Les équipes Hanka, Nomad et AlUla ont été récompensées pour leur excellence en matière de conception, de développement et d'innovation. (SPA)
Les équipes Hanka, Nomad et AlUla ont été récompensées pour leur excellence en matière de conception, de développement et d'innovation. (SPA)
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  • L'événement, qui s'est tenu au centre de soutien de l'autorité à Riyad, s'est déroulé en présence du vice-gouverneur chargé de l'entrepreneuriat, Saud Al-Sabhan, ainsi que d'experts et de spécialistes de l'industrie.
  • Le camp d'entraînement de 12 semaines vise à améliorer les compétences des participants en matière de conception et de développement de jeux, tout en explorant les tendances, les défis et les opportunités du secteur.

RIYAD : L'Autorité générale des petites et moyennes entreprises d'Arabie saoudite a clôturé le programme d'entraînement « Zero to Hero » en récompensant trois équipes pour leurs idées entrepreneuriales remarquables dans le secteur des jeux électroniques.

L'événement, qui s'est tenu au centre de soutien de l'autorité à Riyad, s'est déroulé en présence du vice-gouverneur chargé de l'entrepreneuriat, Saud Al-Sabhan, ainsi que d'experts et de spécialistes de l'industrie.

Les équipes Hanka, Nomad et AlUla ont été récompensées pour leur excellence en matière de conception de jeux, de développement et d'innovation, a rapporté l'agence de presse saoudienne samedi.

L'événement a attiré un grand nombre de participants qui ont présenté leurs projets à un groupe sélectionné d'experts et d'investisseurs, a ajouté la SPA.

Le camp d'entraînement de 12 semaines visait à renforcer les compétences des participants en matière de conception et de développement de jeux, tout en explorant les tendances, les défis et les opportunités de l'industrie.

Sur les 148 candidats, 10 projets ont été sélectionnés et ont bénéficié de 47 ateliers spécialisés pour renforcer leurs capacités techniques et créatives.

Le programme s'est déroulé en quatre phases : une introduction au bootcamp, une formation intensive au développement de jeux, la création d'un prototype et la présentation du projet final devant un panel d'experts et d'investisseurs.

Cette initiative témoigne de l'engagement de l'autorité saoudienne à faire progresser l'industrie du jeu du Royaume en cultivant les talents locaux, en encourageant l'innovation et en donnant aux entrepreneurs les moyens d'être compétitifs aux niveaux régional et mondial. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com  


Jafar Panahi, le cinéaste interdit qui défie le pouvoir iranien

Le réalisateur, scénariste et producteur iranien Jafar Panahi pose avec le trophée lors d'un photocall après avoir remporté la Palme d'Or pour le film « Un simple accident » lors de la cérémonie de clôture de la 78e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 24 mai 2025. (Photo par Miguel MEDINA / AFP)
Le réalisateur, scénariste et producteur iranien Jafar Panahi pose avec le trophée lors d'un photocall après avoir remporté la Palme d'Or pour le film « Un simple accident » lors de la cérémonie de clôture de la 78e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 24 mai 2025. (Photo par Miguel MEDINA / AFP)
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  • Opposant au pouvoir iranien, le réalisateur Jafar Panahi a consacré sa vie au cinéma en défiant la censure, parfois au prix de sa liberté, jusqu'à sa consécration par la Palme d'or à Cannes samedi.
  • Derrière les barreaux, Panahi a trouvé l'inspiration pour son dernier film, dans lequel il dénonce l'arbitraire sans se mettre en scène lui-même, comme dans ses œuvres précédentes.

CANNES, FRANCE : Opposant au pouvoir iranien, le réalisateur Jafar Panahi a consacré sa vie au cinéma en défiant la censure, parfois au prix de sa liberté, jusqu'à sa consécration par la Palme d'or à Cannes samedi.

« Je suis vivant parce que je fais des films », a-t-il déclaré à l'AFP pendant le festival, évoquant l'un de ses films les plus directs, « Un simple accident ».

Assigné jusqu'à récemment en Iran, interdit de tourner, le cinéaste de 64 ans, figure de la Nouvelle Vague du cinéma iranien multiprimée à l'international, a pu faire le déplacement à Cannes pour la première fois depuis 15 ans.

Panahi a plusieurs fois payé son amour du cinéma de sa liberté : il a été incarcéré à deux reprises, pour 86 jours en 2010 et près de sept mois entre 2022 et 2023. Il avait entamé une grève de la faim pour obtenir sa libération.

Derrière les barreaux, Panahi a trouvé l'inspiration pour son dernier film, dans lequel il dénonce l'arbitraire sans se mettre en scène lui-même, comme dans ses œuvres précédentes. « Quand on met un artiste en prison, on lui tend une perche, on lui donne une matière, des idées, on lui ouvre un monde nouveau », a-t-il expliqué au festival de Cannes.

Interrogé sur le fait de savoir s'il redoutait de retourner en Iran après avoir reçu la Palme d'or, le cinéaste a répondu avec assurance. « Pas du tout. Nous partons demain », a-t-il déclaré à l'AFP.

Grand nom du cinéma iranien, Jafar Panahi a vu ses œuvres interdites en Iran être régulièrement primées dans les plus grands festivals, de Cannes à Venise en passant par Berlin. Il a été l'assistant d'Abbas Kiarostami au début de sa carrière. Sa chaise restait symboliquement vide, ne pouvant s'y rendre.

Parmi ses films les plus acclamés figure Taxi Téhéran, tourné depuis l'intérieur d'un taxi, pour lequel il a reçu l'Ours d'or à la Berlinale en 2015. Les conservateurs iraniens avaient fulminé.

Temple du cinéma, le Festival de Cannes le soutient et lui offre une tribune depuis ses débuts : son premier long métrage, Le Ballon blanc, a reçu la Caméra d'or en 1995.

Le cinéaste a également reçu le Prix du Jury dans la section Un Certain Regard en 2003 pour Sang et or, ainsi que le Prix du scénario en 2018 pour Trois Visages.

En 2012, Jafar Panahi a reçu, avec sa compatriote Nasrin Sotoudeh, avocate des droits humains, le prix Sakharov pour la liberté de l'esprit décerné par le Parlement européen.

Il a un fils, Panah, qui est devenu cinéaste. Son premier film, Hit the Road, a été présenté en 2021 à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes. 

La vie de ce fils d'artisan, né le 11 juillet 1960 à Téhéran et ayant grandi dans les quartiers pauvres de la capitale, bascule en 2010.

Il est alors condamné à six ans de prison pour « propagation de la propagande contre le régime », après avoir soutenu le mouvement de protestation de 2009 contre la réélection de l'ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad à la présidence de la République islamique.

Il écope également de 20 ans d'interdiction de réaliser ou écrire des films, de voyager ou de s'exprimer dans les médias. Ces condamnations ne l'ont jamais empêché de continuer à filmer clandestinement.

Mais dès lors, sa caméra se tourne « vers l'intérieur » : Panahi se met en scène lui-même, montrant les difficultés à tourner en cachette. On le voit ainsi diriger une équipe à distance via Zoom, de l'autre côté de la frontière turque, comme dans Aucun ours, Prix spécial en 2022 à Venise.

Car Panahi ne s'est jamais résolu à l'exil, préférant rester dans son pays envers et contre tout, pour scruter dans ses œuvres les injustices sociales ou la place des femmes.