La ceinture du Sahel fragilisée par les coups d'État au Niger, au Mali et au Burkina Faso

Le nombre de migrants essayant de rejoindre l'Europe depuis l'Afrique du Nord a augmenté depuis le coup d'État de juillet au Niger (Photo, AFP).
Le nombre de migrants essayant de rejoindre l'Europe depuis l'Afrique du Nord a augmenté depuis le coup d'État de juillet au Niger (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 12 octobre 2023

La ceinture du Sahel fragilisée par les coups d'État au Niger, au Mali et au Burkina Faso

  • L'effondrement de la coopération entre l'UE et le Niger a provoqué une forte augmentation du nombre de migrants traversant la Méditerranée
  • La dernière embuscade meurtrière tendue à des troupes fait du Niger le nouveau ventre mou du Sahel

TUNIS: Les pays d'Afrique du Nord ont constaté une augmentation du nombre de migrants arrivant et risquant la périlleuse traversée de la Méditerranée vers le sud de l'Europe depuis qu'un coup d'État militaire au Niger a rompu la coopération entre ce pays d'Afrique de l'Ouest et l'Union européenne.

Les migrations en provenance du Sahel, une ceinture de pays s'étendant du Mali à l'ouest jusqu'au Soudan à l'est, ont eu des répercussions majeures sur les pays arabes, notamment la Libye et l'Algérie, où des bandes de passeurs exploitent la crise.

À la suite du coup d'État perpétré au Niger en juillet, les analystes estiment que la latitude accordée aux passeurs s'est sensiblement modifiée et que ces derniers semblent opérer avec un sentiment d'impunité accru dans la région.

«Les contrebandiers ont trouvé d'autres itinéraires et méthodes pour entrer dans le pays», a révélé à Arab News un expert spécialisé dans les migrations et les économies illicites en Afrique du Nord et au Sahel.

L'UE avait prévu d'allouer une aide de 200 millions de dollars (1 dollar américain = 0,95 euro) au Niger pour répondre aux différents problèmes de sécurité du pays (Photo, AFP).

«Les nouvelles autorités nigériennes semblent tolérer ces voies de contournement, qui permettent aux migrants de poursuivre leur voyage vers l'Algérie et la Libye», a-t-il ajouté.

La crise nigérienne a commencé à la fin du mois de juillet lorsque la garde présidentielle a organisé un coup d'État contre le président, Mohammed Bazoum, et l'a remplacé par son propre commandant, Abdourahamane Tchiani.

Le Niger a été balayé par une vague de coups d'État militaires qui a débuté en 2020 et a depuis renversé les gouvernements du Mali et du Burkina Faso. Les prises de pouvoir ont été en partie motivées par les frustrations des militaires et des citoyens face au manque de sécurité dans leurs pays. Mais la violence est montée en flèche alors que les juntes chassaient les troupes étrangères qui aidaient à lutter contre les combattants, et que les forces de maintien de la paix de l'ONU ont commencé à quitter le pays.

Les trois pays se battent contre des combattants qui ont tué des milliers de personnes et en ont déplacé plus de deux millions dans la région du Sahel. Bien qu'ils aient signé le mois dernier un pacte de sécurité promettant de se défendre mutuellement contre les rebelles ou les agresseurs, au moins 29 soldats nigériens ont récemment été tués dans une embuscade près de la frontière du pays avec le Mali. Selon une estimation, les combattants de Daech ont tué une centaine de soldats nigériens lors de multiples attaques en cinq jours.

Les extrémistes violents, dont beaucoup sont liés à Al-Qaïda et à Daech, sont devenus particulièrement actifs dans la zone des «trois frontières» depuis le départ des troupes françaises et des Nations unies du sud-est du Mali, ce qui a mis fin à un soutien vital en matière de reconnaissance aérienne.

Le Niger est depuis longtemps utilisé par les migrants désireux de rejoindre l'Afrique du Nord comme point de départ vers l'Europe. Le gouvernement de Bazoum a travaillé avec l'UE pour aider à contrôler le flux de migrants et avec les Nations unies afin de faciliter leur retour.

La crise nigérienne a commencé vers la fin de juillet lorsque la garde présidentielle a organisé un coup d'État contre le président, Mohammed Bazoum (Photo, AFP).

En échange de sa coopération, l'UE avait prévu d'allouer une aide de 200 millions de dollars au Niger pour faire face aux différents problèmes de sécurité du pays.

«Certains migrants passaient par le Niger à cause de ses frontières relativement ouvertes par rapport aux pays voisins, qui avaient leurs propres conflits, principalement avec des terroristes», a déclaré à Arab News, Aneliese Bernard, consultante indépendante travaillant dans les domaines de la stabilisation et de la contre-insurrection en Afrique de l'Ouest.

Toutefois, la décision de l'UE de mettre fin à la coopération avec les nouveaux dirigeants du Niger à la suite du coup d'État a suscité des craintes quant aux menaces pesant sur la sécurité régionale, aux flux migratoires incontrôlés et à la possibilité de nouvelles noyades en Méditerranée.

Comme nous l'avons déjà indiqué, le nombre de migrants traversant la Méditerranée a fortement augmenté, avec plus de 12 000 personnes arrivant sur l'île italienne de Lampedusa en une seule semaine.

Avec une population d'environ 6 000 habitants, les autorités locales de Lampedusa ont déclaré l'état d'urgence.

La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, se sont précipités sur l'île pour discuter de la crise des migrants, Meloni appelant à une mission de l'UE pour bloquer les bateaux transportant des migrants à travers la Méditerranée.

Des experts se sont interrogés sur l'efficacité de l'approche européenne face au défi migratoire.

EN CHIFFRES

- Augmentation de 43% des événements violents au Niger en 2022. (Centre d'études stratégiques de l'Afrique)

- 10 millions de personnes au Niger, soit 41,8% de la population, vivent dans l'extrême pauvreté en 2021.

- 2 milliards de dollars d'aide publique au développement fournis au Niger par an.

Source : Banque mondiale

Mukesh Kapila, militant humanitaire de haut niveau ayant travaillé pour les Nations unies, qui a récemment visité des camps de réfugiés en Grèce, a souligné que de nombreuses personnes migrent pour des raisons économiques et ne sont pas des réfugiés au sens de la convention des Nations unies de 1951 relative au statut des réfugiés.

Chaque migrant économique qui n'est pas expulsé de l'UE bloque l'espace pour une personne qui remplit véritablement les conditions requises pour bénéficier d'une protection.

«Cela montre que les systèmes d'immigration et d'asile de l'UE sont débordés», a indiqué Kapila à Arab News. «Ils ne fonctionnent tout simplement pas.»

«Avant le coup d'État au Niger, les mêmes chefs militaires qui ont pris le pouvoir avaient effectivement mis en œuvre la politique anti-migration de l'UE au Niger. Aujourd'hui, ils pourraient être en train de l'abandonner», a déclaré à Arab News Kerem Schamberger, expert en questions migratoires à l'organisation allemande de défense des droits de l'homme, Medico International.

En outre, les restrictions aux points de contrôle pour les migrants en route vers le nord du Niger se sont manifestement assouplies. Cette situation contraste fortement avec l'environnement qui prévalait avant le coup d'État, où les migrants se heurtaient à des obstacles considérables et à des contrôles rigoureux.

Schamberger souligne les conséquences de la législation anti-migration, connue sous le nom de loi 36-2015, qui a rendu illégale la circulation des migrants du sud du Niger vers le nord.

Des partisans du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) du Niger manifestent devant la base aérienne nigérienne et française de Niamey (Photo, AFP).

«Cette loi a rendu les routes migratoires à travers le désert du Sahara plus périlleuses, les migrants étant contraints d'emprunter des itinéraires dangereux à travers le désert sans protection adéquate, ce qui a entraîné une augmentation significative des décès dus à la soif et à la famine», a expliqué Schamberger.

Beatrice Bianchi, experte du Sahel auprès de la Fondation Med-Or Leonardo, basée en Italie, a déclaré que si le gouvernement du Niger devait abroger la loi 36-2015, «cela pourrait avoir un impact immédiat sur la coopération migratoire avec l'Europe».

Elle a signalé à Arab News: «L'abrogation de cette loi entraînera probablement une résurgence des routes migratoires initiales passant par Agadez (Niger), ce qui pourrait augmenter le nombre de migrants tentant de traverser la Méditerranée.»

Le gouvernement nigérien d'avant le coup d'État n'était cependant pas un partenaire totalement fiable.

Bien qu’il ait joué un rôle central dans la stratégie anti-immigration de l’UE dans la région ouest-africaine et qu’il ait reçu d’importantes sommes d’argent au titre de l’aide au développement, «il y a eu un décalage important entre ce financement et son impact réel sur le terrain, les gens accusant le gouvernement d’avoir volé ces fonds», a éclairci Schamberger.

«Aux yeux de beaucoup, les fonds semblaient aller dans les poches de politiciens influents, de militaires et d'élites économiques, plutôt que de soutenir l'économie locale ou la population», a-t-il ajouté.

Ce n'est pas la première fois que des allégations ont été formulées concernant l'utilisation abusive des fonds de l'UE fournis par les pays bénéficiaires en échange d'une aide sur la question de l'immigration.

En 2019, l'agence de presse Associated Press a rapporté que les fonds de l'UE accordés à la Libye pour endiguer la migration étaient fréquemment volés ou détournés.

De 2016 à 2018, l'UE a alloué plus de 200 millions de dollars de financement au Soudan, ce qui a contraint les migrants à emprunter des itinéraires de plus en plus dangereux pour quitter le pays, selon un rapport de 2018 de New Humanitarian.

Le général Abdourahamane Tiani s'exprime à la télévision nationale du Niger après l'éviction du président élu, Mohammed Bazoum (Photo, Télé Sahel/AFP).

L'Organisation internationale pour les migrations des Nations unies (OIM) affirme que les fermetures de frontières et les restrictions de l'espace aérien résultant du coup d'État ont mis en danger des centaines de milliers de migrants et de personnes déplacées.

La fermeture des frontières terrestres par les voisins du Niger en réponse au coup d'État a interrompu temporairement le flux migratoire.

Malgré ces mesures, Schamberger affirme que «la migration du Niger vers l'Algérie et la Libye n'a jamais complètement cessé, même avec la loi anti-migration en vigueur».

«Les routes à travers le Sahara sont cependant devenues de plus en plus dangereuses pour les migrants alors que l'Algérie poursuivait sa politique d'expulsion des migrants vers le Niger. Cette politique a entraîné le retour d'un nombre croissant de migrants dans la ville d'Agadez par le point de passage frontalier d'Assamaka, ce qui a aggravé la situation de la ville déjà surpeuplée», a-t-il ajouté.

Dans ce contexte, La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) a demandé le soutien des ministres des Affaires étrangères de l'UE lors d'une réunion informelle à Tolède, en Espagne, à la fin du mois d'août.

La Cedeao a réagi au coup d'État du Niger en imposant des sanctions aux dirigeants de la junte et en menaçant de recourir à la force militaire s'ils ne parviennent pas à rétablir l'ordre constitutionnel.

Le soutien des puissances européennes à la Cedeao semble toutefois peu probable, la France ayant annoncé qu'elle mettrait fin à sa présence militaire au Niger d'ici la fin de 2023.

Les partisans de la junte nigérienne organisent un rassemblement pour exiger le départ de l'armée française (Photo, Reuters).

À la suite de l'embuscade meurtrière tendue à des troupes au Niger, ce pays est considéré comme le nouveau ventre mou de la région du Sahel et comme un obstacle majeur à la mise en œuvre de la stratégie de l'UE en matière de migration.

«L'UE s'efforce depuis huit à dix ans d'empêcher une petite fraction du grand nombre de migrants d'atteindre ses frontières, alors que la majorité des migrations africaines sont internes», a déclaré à Arab News Franck Duvell, chercheur principal à l'université d'Osnabrück, en Allemagne.

Selon des sources diplomatiques, l'UE est en train d’évaluer la possibilité d'établir une zone de recherche et de sauvetage dans les eaux tunisiennes afin d'améliorer sa capacité à gérer et à coordonner les opérations de sauvetage en mer.

«La coopération avec la Tunisie et le Niger reflète la stratégie plus large de l'UE consistant à externaliser les contrôles migratoires au-delà de ses frontières», a-t-il conclu.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'émissaire américain Witkoff est en Russie, selon le Kremlin

Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine. (AFP)
Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine. (AFP)
Short Url
  • Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine
  • "Oui, je confirme, il est en effet arrivé en Russie", a déclaré Dmitri Peskov, cité par l'agence russe Ria Novosti qui le questionnait sur des informations de presse faisant état de la venue du responsable américain

MOSCOU: Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine.

"Oui, je confirme, il est en effet arrivé en Russie", a déclaré Dmitri Peskov, cité par l'agence russe Ria Novosti qui le questionnait sur des informations de presse faisant état de la venue du responsable américain.

Interrogé sur la possibilité d'une rencontre avec le président russe Vladimir Poutine, M. Peskov a répondu: "si c'est le cas, nous le dirons".

La raison de la visite de Steve Witkoff n'a pas été communiquée.

Cet ami proche de Donald Trump a été impliqué dans des discussions autour du conflit en Ukraine, mais il est aussi l'émissaire du président au Moyen-Orient.

Il est attendu samedi au sultanat d'Oman pour des pourparlers inédits avec l'Iran, pays proche de Moscou mais avec lequel Washington n'a plus de relations diplomatiques depuis 45 ans.

Ces discussions visent à négocier un nouvel accord sur le nucléaire iranien.

Les Occidentaux, Etats-Unis en tête, soupçonnent depuis des décennies l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Téhéran rejette ces accusations.

La Russie est un proche partenaire de l'Iran, et le Kremlin s'était dit en avril favorable à des négociations directes entre Washington et Téhéran.

Trump "furieux" 

La visite de Steve Witkoff intervient également au lendemain d'un échange de prisonniers entre Washington et Moscou et d'un round de discussions sur le fonctionnement de leurs missions diplomatiques, pour la deuxième fois depuis le retour à la Maison Blanche de Donald Trump en janvier.

Le président américain veut se rapprocher de la Russie, dont les Occidentaux se tiennent à l'écart depuis le début de l'attaque russe contre l'Ukraine en 2022.

Donald Trump cherche à mettre fin au plus vite à ce conflit qui a déjà fait des dizaines de milliers de morts.

Cette détermination fait craindre à Kiev d'être contraint par son puissant allié à accepter d'âpres concessions. D'autant que le tempétueux Donald Trump envoie des signaux contradictoires.

Il a multiplié les piques à l'encontre du président ukrainien Volodymyr Zelensky, et critiqué l'aide que son pays a apportée à Kiev.

Mais Donald Trump a aussi menacé la Russie de nouvelles sanctions si elle ne consentait pas à la paix.

Il a dit fin mars à la chaîne NBC être "très énervé" et "furieux" contre Vladimir Poutine, après que ce dernier eut évoqué l'idée d'une "administration transitoire" en Ukraine, impliquant le départ du pouvoir de Volodymyr Zelensky.

Pas de cessez-le-feu 

Steve Witkoff a lui fait l'éloge de Vladimir Poutine. Il avait estimé dans une interview, le mois dernier, que le président russe n'était pas "un mauvais type".

L'émissaire américain l'a déjà rencontré à deux reprises. En mars, il s'était rendu en Russie pour discuter d'une proposition américaine d'un cessez-le-feu inconditionnel en Ukraine.

Mais Vladimir Poutine n'avait pas été convaincu, et cette proposition de trêve de 30 jours, acceptée par l'Ukraine, ne s'est pas concrétisée.

Donald Trump a seulement réussi à obtenir de son homologue russe un moratoire des frappes sur les infrastructures énergétiques, que l'Ukraine comme la Russie s'accusent depuis de violer.

Washington avait aussi annoncé fin mars une trêve limitée en mer Noire, aux contours flous.

Lundi, le Kremlin, accusé par Kiev et des capitales occidentales de faire traîner les discussions, avait estimé que de nombreuses questions restaient à régler en vue de conclure un accord de cessez-le-feu global avec l'Ukraine.

Le directeur du Service de renseignement extérieur russe (SVR), Sergueï Narychkine, a, lui, affirmé vendredi que les discussions entre Moscou et Washington allaient se poursuivre concernant "différentes thématiques", notamment celle de potentiels échanges de prisonniers.


Droits de douane: des démocrates soupçonnent Trump de possible délit d'initié

Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%. (AFP)
Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%. (AFP)
Short Url
  • Après avoir déclenché une guerre commerciale mondiale et ébranlé les marchés, le président américain a écrit mercredi sur TruthSocial, quelques minutes après l'ouverture de Wall Street, "C'EST LE MOMENT D'ACHETER"
  • Quelques heures plus tard, il annonçait une suspension pour 90 jours des droits de douane supplémentaires à l'encontre de dizaines de pays, à l'exception de la Chine, provoquant un rebond boursier historique

WASHINGTON: Donald Trump a-t-il commis un délit d'initié ? Plusieurs élus démocrates ont émis des soupçons, estimant que le président américain avait peut-être, en encourageant à acheter des actions juste avant son revirement spectaculaire sur les droits de douane, illégalement manipulé les marchés.

"Les proches de Donald Trump profitent-ils illégalement de ces énormes fluctuations du marché boursier par le biais de délits d'initiés ?", a interrogé le sénateur démocrate de Californie Adam Schiff sur son compte X mercredi.  "Le Congrès doit savoir", a-t-il ajouté, appelant à une enquête parlementaire.

"Le président des États-Unis participe littéralement à la plus grande manipulation de marché au monde", ont affirmé de leur côté les élus démocrates de la commission des services financiers de la Chambre des représentants, également sur X.

Après avoir déclenché une guerre commerciale mondiale et ébranlé les marchés, le président américain a écrit mercredi sur TruthSocial, quelques minutes après l'ouverture de Wall Street, "C'EST LE MOMENT D'ACHETER".

Quelques heures plus tard, il annonçait une suspension pour 90 jours des droits de douane supplémentaires à l'encontre de dizaines de pays, à l'exception de la Chine, provoquant un rebond boursier historique.

Après plusieurs jours d'effondrement, l'indice Dow Jones a fini mercredi en hausse de 7,87%, sa plus forte progression depuis 2008, et l'indice Nasdaq de 12,16%, du jamais-vu depuis 2001.

Un spécialiste en éthique a lui aussi estimé qu'il y avait matière à enquête.

"Les présidents ne sont pas des conseillers en investissement", a écrit sur X Richard Painter, professeur en droit et ancien avocat chargé de l'éthique à la Maison Blanche sous George W. Bush. "Ce scénario pourrait exposer le président à des accusations de manipulation du marché", a-t-il déclaré sur la chaîne NBC.

La Maison Blanche a assuré que Donald Trump ne voulait que "rassurer".

"Il est de la responsabilité du président des États-Unis de rassurer les marchés et les Américains sur leur sécurité économique face à l'alarmisme permanent des médias", a déclaré au Washington Post Kush Desai, porte-parole de la Maison Blanche.

Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%.

 


Trump annonce des discussions «directes» avec l'Iran sur le nucléaire

Donald Trump a créé la surprise en annonçant que Washington menait des discussions "directes" avec l'Iran sur son programme nucléaire, en recevant lundi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, reparti sans les concessions commerciales qu'il espérait obtenir. (AFP)
Donald Trump a créé la surprise en annonçant que Washington menait des discussions "directes" avec l'Iran sur son programme nucléaire, en recevant lundi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, reparti sans les concessions commerciales qu'il espérait obtenir. (AFP)
Short Url
  • "Nous avons des discussions directes avec l'Iran. Elles ont commencé, elles se poursuivront samedi, nous aurons une très grande réunion", a déclaré à la presse le président américain
  • Il a ensuite assuré que cette rencontre se tiendrait samedi "à très haut niveau" et même "quasiment au plus haut niveau"

WASHINGTON: Donald Trump a créé la surprise en annonçant que Washington menait des discussions "directes" avec l'Iran sur son programme nucléaire, en recevant lundi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, reparti sans les concessions commerciales qu'il espérait obtenir.

"Nous avons des discussions directes avec l'Iran. Elles ont commencé, elles se poursuivront samedi, nous aurons une très grande réunion", a déclaré à la presse le président américain.

Il a ensuite assuré que cette rencontre se tiendrait samedi "à très haut niveau" et même "quasiment au plus haut niveau".

Il s'agit d'une annonce spectaculaire de la part du président américain, notoirement peu friand de tractations diplomatiques complexes impliquant plus de deux parties, alors que l'Iran avait rejeté dimanche tout dialogue direct avec Washington.

Téhéran a confirmé sa position après cette annonce.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, doit avoir samedi à Oman des "entretiens indirects" avec l'émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, a annoncé mardi l'agence iranienne Tasnim.

"Il s'agit autant d'une opportunité que d'un test. La balle est dans le camp de l'Amérique", avait écrit plus tôt M. Araghchi sur le résau social X, en annonçant la tenue de discussions "de haut niveau indirectes".

Proches alliés durant la monarchie Pahlavi, les deux pays n'ont plus de relations diplomatiques depuis 1980 et la prise d'otages de diplomates américains dans leur ambassade à Téhéran, dans la foulée de la Révolution islamique.

Mais ils échangent indirectement par le biais de l'ambassade de Suisse à Téhéran. Le sultanat d'Oman a plusieurs fois joué un rôle de médiateur, et le Qatar dans une moindre mesure.

"Grand danger" 

"Nous traitons directement avec eux. Et peut-être que nous aurons un accord", a dit lundi le président américain, qui avait retiré avec fracas les Etats-Unis d'un accord international avec l'Iran lors de son premier mandat, en 2018.

Cet accord, conclu en 2015, prévoyait la levée de certaines sanctions en échange d'un encadrement des activités nucléaires iraniennes.

Donald Trump a dit lundi que si un nouvel accord était trouvé, il serait "différent et peut-être beaucoup plus robuste". Mais il a ajouté que l'Iran serait "en grand danger" si les discussions n'aboutissaient pas.

En attendant, l'Iran doit mener mardi à Moscou des consultations sur ce même dossier avec ses proches partenaires, la Russie et la Chine.

Benjamin Netanyahu, tenant d'une ligne dure face à Téhéran, a appelé à ce que l'Iran ne produise "jamais" d'arme nucléaire. Il a plaidé pour que les tractations diplomatiques débouchent sur un démantèlement "complet", évoquant l'exemple de la Libye.

Concernant les droits de douane, autre enjeu de sa visite, le Premier ministre israélien a promis d'"éliminer le déficit commercial des Etats-Unis" vis-à-vis d'Israël.

Il est le premier dirigeant étranger reçu par le président américain depuis l'annonce la semaine dernière des nouveaux droits de douane, qui ont provoqué un coup de tabac sur les places financières mondiales.

"Un autre cessez-le-feu" 

Le dirigeant israélien est reparti sans promesse d'exemption ou de réduction des droits de douane de 17%, qui seront imposés sur les importations en provenance de son pays à compter de mercredi.

Un journaliste a demandé à Donald Trump s'il comptait revenir sur cette taxe, et il a répondu: "Peut-être pas. N'oubliez pas que nous aidons beaucoup Israël".

Israël avait tenté en vain d'échapper aux nouvelles taxes en levant mardi la totalité des droits de douane restants sur les 1% de marchandises américaines encore concernées.

Benjamin Netanyahu a par ailleurs déclaré que Israël oeuvrait à un nouvel "accord" sur la libération des otages retenus par le Hamas à Gaza.

"Nous faisons tout notre possible pour faire sortir les otages. Nous envisageons un autre cessez-le-feu, nous verrons bien ce qui se passera", a renchéri Donald Trump.

Après deux mois d'une trêve fragile, l'armée israélienne a repris le 18 mars son offensive militaire dans la bande de Gaza, d'où le mouvement palestinien avait lancé une attaque sans précédent le 7 octobre 2023 en Israël.

La récente trêve a permis le retour de 33 otages israéliens, dont huit sont décédés, en échange de la libération de quelque 1.800 Palestiniens détenus par Israël.

Sur les 251 otages enlevés lors de l'attaque du Hamas, 58 sont toujours retenus dans le territoire palestinien, dont 34 sont morts selon l'armée israélienne.