Poutine exige la capitulation de l'Ukraine, Zelensky dénonce un ultimatum à la «Hitler»

Le président russe Vladimir Poutine a de facto fixé vendredi une capitulation de l'Ukraine comme condition pour des pourparlers. (AFP)
Le président russe Vladimir Poutine a de facto fixé vendredi une capitulation de l'Ukraine comme condition pour des pourparlers. (AFP)
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Publié le Vendredi 14 juin 2024

Poutine exige la capitulation de l'Ukraine, Zelensky dénonce un ultimatum à la «Hitler»

  • Si l'armée russe a l'initiative sur le front, elle y a subi des pertes considérables depuis deux ans et ne parvient pas à prendre un avantage décisif
  • Vladimir Poutine a insisté vendredi sur le fait que l'Ukraine devait remettre à la Russie la totalité de ces territoires, alors même que Moscou ne les occupe que partiellement et que les combats y font toujours rage

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a de facto fixé vendredi une capitulation de l'Ukraine comme condition pour des pourparlers, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky rejetant aussitôt un "ultimatum" à la "Hitler", à la veille d'un sommet en Suisse consacré aux moyens d'arriver à la paix et dont la Russie est exclue.

L'Ukraine, les Etats-Unis et l'Otan ont immédiatement rejeté ces conditions du maître du Kremlin.

"Ces messages sont des messages d'ultimatum (...) Hitler faisait la même chose, quand il disait +Donnez-moi une partie de la Tchécoslovaquie et on en reste là+, mais non, ce sont des mensonges", a commenté Volodymyr Zelensky dans un entretien à la chaîne d'information italienne SkyTG24.

Le président russe, dont l'armée a repris depuis plusieurs mois l'initiative sur le front face à des forces ukrainiennes en manque d'hommes et de munitions, a réclamé que Kiev renonce à rejoindre l'Otan et se retire des régions de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia que la Russie occupe déjà partiellement et prétend annexer en plus de la Crimée.

"Dès que Kiev (...) commencera le retrait effectif des troupes et notifiera l'abandon de son projet d'adhésion à l'Otan, nous donnerons immédiatement, à la minute même, l'ordre de cesser le feu et d'entamer des négociations", a dit M. Poutine face aux cadres du ministère russe des Affaires étrangères.

Remplir ces condition constituerait de facto une reddition de l'Ukraine, dont l'objectif est de rétablir son intégrité territoriale et sa souveraineté dans les frontières internationalement reconnues.

Si l'armée russe a l'initiative sur le front, elle y a subi des pertes considérables depuis deux ans et ne parvient pas à prendre un avantage décisif.

Le Kremlin avait proclamé dès septembre 2022 l'annexion de quatre régions de l'est et du sud de l'Ukraine, en plus de celle de la Crimée en 2014.

«Manipulation»

Vladimir Poutine a insisté vendredi sur le fait que l'Ukraine devait remettre à la Russie la totalité de ces territoires, alors même que Moscou ne les occupe que partiellement et que les combats y font toujours rage.

Le président russe a dénigré également le sommet pour la paix, dont la Russie a été exclue, prévu en Suisse les 15 et 16 juin à l'initiative de l'Ukraine. Kiev espère que les quelque 90 délégations présentes, malgré l'absence notamment de la Chine, y aboutiront à un consensus pour accroître la pression sur le Kremlin.

M. Poutine a dénoncé un "stratagème pour détourner l'attention de tout le monde" des vraies responsabilités dans le conflit à savoir, dans sa lecture, celles de l'Ukraine et des Occidentaux.

Mykhaïlo Podoliak, conseiller à la présidence ukrainienne, a martelé, lui, que les revendications russes se "heurtent au bon sens" et constituent "une offense au droit international".

Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a dénoncé des "déclarations manipulatrices", et estimé que Vladimir Poutine avait tenu ces propos à la veille du sommet en Suisse car "la Russie a peur d'une véritable paix".

Le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin, dont le pays est le principal soutien militaire et financier de Kiev, a jugé que M. Poutine n'était "pas en position de dicter à l'Ukraine ce qu'elle doit faire pour parvenir à la paix".

Enfin, le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a estimé que le dirigeant russe n'agissait pas de "bonne foi".

Le chef de la diplomatie russe y est allé de sa pique, en disant que ceux qui "ont des oreilles entendront (Poutine) et ceux qui ont un cerveau le comprendront".

"Mais je ne suis pas sûr que ces organes du corps humain fonctionnent correctement " en Occident, a lâché Sergueï Lavrov à la télévision russe.

«Vol» des actifs russes 

Vladimir Poutine a aussi dénoncé la décision jeudi du G7 de garantir un prêt de 50 milliards de dollars à l'Ukraine avec les futurs intérêts des actifs russes gelés depuis le début de l'offensive russe

"Même si on enjolive les choses, le vol ça reste du vol et ça ne restera pas impuni", a t-il dit.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a lui réclamé la confiscation pure et simple des 300 milliards d'euros d'actifs de la banque centrale russe gelés par les Occidentaux depuis deux ans, ce à quoi ils se refusent pour des raisons juridiques.

Sur le terrain, les forces ukrainiennes continuent de résister aux multiples assauts, en particulier dans l'est du pays, où Moscou grignote du terrain depuis le début de l'année.

"Presque quotidiennement, nous repoussons deux, trois attaques", a dit cette semaine à l'AFP Maxime, commandant d'une compagnie de tankistes dans la 59ème brigade qui combat dans la zone de Pokrovsk.

"Il y a eu une nette augmentation du nombre de soldats ennemis et ils ont apporté des véhicules blindés ainsi que de l'artillerie à longue portée", a ajoutét ce militaire de 38 ans.

Enfin, l'Ukraine continue d'être contrainte de rationner l'électricité, son infrastructure énergétique ayant été ravagée par les frappes russes. Vendredi, des coupures sont prévues de 14H à 22H à travers le pays.


Sanctions contre Moscou, Paris rappelle la nécessité d'une « coordination » avec les États-Unis

Le ministre français de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot (à gauche), le Premier ministre français François Bayrou et le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique Éric Lombard quittent l'Élysée à Paris après la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 9 avril 2025. (Photo : ALAIN JOCARD / AFP)
Le ministre français de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot (à gauche), le Premier ministre français François Bayrou et le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique Éric Lombard quittent l'Élysée à Paris après la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le 9 avril 2025. (Photo : ALAIN JOCARD / AFP)
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  • Les ministres français des Finances et des Affaires étrangères ont rappelé samedi « la nécessaire coordination » entre les États-Unis et l'Europe pour mettre fin au conflit en Ukraine.
  • L'Union européenne prépare un 18e paquet de sanctions à l'encontre de la Russie pour la convaincre d'accepter un cessez-le-feu.

PARIS : Les ministres français des Finances et des Affaires étrangères ont rappelé samedi « la nécessaire coordination » entre les États-Unis et l'Europe pour mettre fin au conflit en Ukraine, en recevant des sénateurs américains porteurs d'un projet de sanctions contre Moscou.

Le gouvernement français indique dans un communiqué qu'Éric Lombard et Jean-Noël Barrot ont reçu les sénateurs républicain Lindsey Graham et démocrate Richard Blumenthal.

Les deux parlementaires incitent le Congrès à adopter des sanctions dites « secondaires » extrêmement strictes, avec notamment des droits de douane allant jusqu'à 500 % sur les pays qui importent des hydrocarbures et des matières premières russes.

« Les ministres ont insisté sur la nécessaire coordination entre les États-Unis et l'Europe pour que les efforts en cours aboutissent à une paix juste et durable », affirme-t-il.

De retour d'Ukraine, les deux sénateurs ont fait part de leur intention de prendre des « dispositions législatives » pour « obtenir le retour en Ukraine des milliers d'enfants déportés par la Russie », ajoute le gouvernement.

L'Union européenne prépare un 18e paquet de sanctions à l'encontre de la Russie pour la convaincre d'accepter un cessez-le-feu. Le président américain Donald Trump affiche de son côté une attitude ambivalente, faisant preuve d'impatience et brandissant la menace de sanctions, sans pour autant passer à l'acte.

Au cours de leur entretien, les ministres et sénateurs ont par ailleurs évoqué l'Iran, qui « ne peut en aucun cas et d'aucune manière disposer de l’arme nucléaire », ainsi que le « dialogue exigeant avec le président intérimaire de Syrie Ahmad al-Chareh.


L'arme nucléaire est « inacceptable » a déclaré le ministre iranien des Affaires étrangères

Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araqchi participe à une conférence de presse à Moscou, en Russie, le 18 avril 2025. (Reuters)
Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araqchi participe à une conférence de presse à Moscou, en Russie, le 18 avril 2025. (Reuters)
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  • Les deux pays s'écharpent sur la question de l'enrichissement d'uranium : les États-Unis exigent que l'Iran y renonce totalement, tandis que Téhéran refuse catégoriquement.
  • « Si le problème concerne les armes nucléaires, alors nous considérons également que ce type d'arme est inacceptable », a déclaré Abbas Araghchi lors d'un discours télévisé.

TEHERAN : Alors que son pays est engagé dans de délicats pourparlers sur le nucléaire avec les États-Unis, le chef de la diplomatie iranienne, Abbas Araghchi, a jugé samedi « inacceptable » l'arme atomique.

Les deux pays s'écharpent sur la question de l'enrichissement d'uranium : les États-Unis exigent que l'Iran y renonce totalement, tandis que Téhéran refuse catégoriquement, arguant de son droit de disposer de capacités nucléaires civiles.

« Si le problème concerne les armes nucléaires, alors nous considérons également que ce type d'arme est inacceptable », a déclaré Abbas Araghchi lors d'un discours télévisé.

« Nous sommes d'accord avec eux sur cette question », a-t-il ajouté en référence à la position américaine.

Les pays occidentaux, les États-Unis en tête, et Israël, ennemi juré de l'Iran et considéré par des experts comme la seule puissance nucléaire au Moyen-Orient, soupçonnent Téhéran de vouloir se doter de l'arme nucléaire.

Téhéran se défend d'avoir de telles ambitions militaires mais souligne son droit au nucléaire civil, notamment pour l'énergie, en vertu des dispositions du Traité de non-prolifération (TNP) dont l'Iran est signataire. 

Le pays est toutefois le seul État non doté d'armes nucléaires à enrichir de l'uranium à un niveau élevé (60 %), selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

« Ils ne peuvent pas avoir d'armes nucléaires », a réitéré vendredi le président américain Donald Trump, estimant qu'Iran et États-Unis étaient « assez proches d'un accord ».

Abbas Araghchi a toutefois tempéré tout optimisme américain dans un message publié jeudi sur X, dans lequel il affirme ne pas être « sûr » de l'« imminence » d'un accord. 

Ennemis depuis quatre décennies, Téhéran et Washington ont tenu le 23 mai à Rome un cinquième cycle de pourparlers sous l'égide du sultanat d'Oman.

Les négociateurs iranien Abbas Araghchi et américain Steve Witkoff se sont quittés sans avancée notable, mais se disent prêts à de nouvelles discussions. Aucune date n'a pour le moment été fixée.

En cas d'accord avec Washington, l'Iran a affirmé mercredi qu'il pourrait autoriser des inspecteurs américains de l'AIEA (l'agence onusienne du nucléaire) à travailler sur son sol.

« Si des questions sont soulevées, qu'un accord est conclu et que les demandes de l'Iran sont prises en compte, alors nous reconsidérerons la possibilité d'accepter des inspecteurs américains », a déclaré Mohammad Eslami, le chef de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA). 

Selon Ali Vaez, chercheur spécialiste de l'Iran à l'International Crisis Group, un cercle de réflexion américain, cela constituerait une première depuis la Révolution islamique de 1979.

Durant son premier mandat (2017-2021), Donald Trump avait retiré unilatéralement son pays d'un accord international sur le nucléaire conclu avec l'Iran en 2015 et avait rétabli de lourdes sanctions américaines à l'encontre de Téhéran.

En guise de représailles, l'Iran s'est affranchi de certaines obligations, accélérant notamment l'enrichissement d'uranium bien au-delà de la limite de 3,67 % fixée par l'accord.

M. Trump, qui cherche dorénavant à négocier un nouveau texte, menace d'avoir recours à l'option militaire si la diplomatie échoue.


Washington accuse Pékin de se préparer à « utiliser la force » dans la région Asie-Pacifique

Le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, prononce un discours lors du sommet Shangri-La Dialogue à Singapour, le 31 mai 2025. (Photo : MOHD RASFAN / AFP)
Le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, prononce un discours lors du sommet Shangri-La Dialogue à Singapour, le 31 mai 2025. (Photo : MOHD RASFAN / AFP)
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  • « La menace que représente la Chine est réelle et pourrait être imminente », a-t-il déclaré lors du Shangri-La Dialogue de Singapour.
  • Le Forum Shangri-La Dialogue rassemble chaque année des responsables issus de l'ensemble de l'Asie ainsi que du reste du monde dans la cité-État de Singapour.

SINGAPOUR : Le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth, a accusé samedi la Chine de se préparer « à potentiellement utiliser la force militaire » dans la région Asie-Pacifique, que Washington considère comme son « théâtre prioritaire », dans un contexte de montée des tensions.

« La menace que représente la Chine est réelle et pourrait être imminente », a-t-il déclaré lors du Shangri-La Dialogue de Singapour, le plus grand forum sur la sécurité et la défense en Asie, alors que des tensions commerciales et géopolitiques accrues opposent Washington et Pékin depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche.

M. Hegseth a assuré que Pékin « souhaitait dominer et contrôler » la région et « s'entraînait tous les jours » en vue d'une invasion de Taïwan, avec une multiplication des manœuvres chinoises autour de l'île.

Pékin se prépare ainsi « clairement et de manière crédible à potentiellement utiliser la force militaire pour modifier l'équilibre des forces » dans la région Asie-Pacifique, a souligné le dirigeant américain.

M. Hegseth a également dénoncé la multiplication des incidents impliquant des navires chinois en mer de Chine méridionale, accusant Pékin « de s'emparer et de militariser illégalement » des îles et îlots revendiqués notamment par les Philippines. 

Le Forum Shangri-La Dialogue rassemble chaque année des responsables issus de l'ensemble de l'Asie ainsi que du reste du monde dans la cité-État de Singapour.

Pour la première fois depuis 2019, la Chine a toutefois annoncé qu'elle n'y enverrait pas de responsable de haut niveau.

Pour Washington, l'Asie-Pacifique est la zone géographique prioritaire et les États-Unis réorientent leur stratégie en vue de dissuader toute agression de la part de la Chine communiste.

Le pays a ainsi accentué sa coopération avec le Japon et les Philippines, ses alliés traditionnels dans la région, et entrepris de renforcer ses relations avec l'Inde, a-t-il rappelé.

« L'Amérique est fière d'être de retour en Indo-Pacifique, et nous sommes ici pour y rester », a martelé M. Hegseth.

Mais, a-t-il souligné en citant l'Europe en exemple, « les alliés des États-Unis dans l'Indo-Pacifique peuvent et doivent augmenter rapidement leurs propres moyens de défense ». 

Plusieurs pays européens, à commencer par l'Allemagne, ont annoncé une hausse drastique de leurs budgets militaires afin de les porter à 5 % de leur PIB, face à la menace du président américain Donald Trump de se désengager de la défense de l'Europe via l'OTAN.

La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, également présente au forum, a souligné que plusieurs pays européens avaient « réalisé depuis longtemps que nous devons investir dans la défense ».

« L'Union européenne a changé de braquet et repensé son paradigme pour en faire un projet de paix soutenu par une défense solide », a-t-elle ajouté.

Les tensions entre les États-Unis et la Chine se sont intensifiées avec le retour au pouvoir de M. Trump, qui a notamment infligé à Pékin des droits de douane record et des restrictions technologiques.

Vendredi, le président américain a une nouvelle fois accusé Pékin de ne pas respecter les termes d'un accord de détente négocié il y a deux semaines entre les deux pays à Genève. 

« Sans grande surprise, la Chine a totalement violé son accord avec nous », a-t-il dénoncé sur son réseau Truth Social, sans préciser quelles actions menées par Pékin il visait. « Cela m'apprendra à vouloir être gentil », a-t-il ajouté.

Premier représentant européen à tenir le discours d'ouverture du Shangri-La Dialogue, le président français Emmanuel Macron avait appelé vendredi à « bâtir de nouvelles alliances » avec ses partenaires asiatiques pour ne pas être « les victimes collatérales » des « décisions prises par les superpuissances ».

Il a par ailleurs rappelé les autorités chinoises à leur rôle dans la sécurité internationale.

« Si la Chine ne veut pas que l'OTAN soit impliquée en Asie du Sud-Est ou en Asie, elle doit clairement empêcher la Corée du Nord d'être impliquée sur le sol européen », où elle a déployé des soldats aux côtés de la Russie contre l'Ukraine, a affirmé le dirigeant français.

« La sécurité de l'Europe et celle du Pacifique sont étroitement liées », a également estimé Mme Kallas samedi.

Le forum, dont c'est la 22^e édition, se tient jusqu'à dimanche.