La FNSEA appelle Macron à donner sa vision pour l'agriculture «sans plus attendre»

Le président français Emmanuel Macron. (Photo, AFP)
Le président français Emmanuel Macron. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 28 mars 2024

La FNSEA appelle Macron à donner sa vision pour l'agriculture «sans plus attendre»

  • La révolte du monde paysan dans de nombreux pays européens est née en grande partie de l'accumulation de textes «qui a créé chez les agriculteurs une sensation d'étouffement réglementaire»
  • Le patron de la FNSEA a aussi appelé le gouvernement à «reprendre la maîtrise de son administration» afin de mettre plus rapidement en oeuvre les mesures en faveur des agriculteurs

DUNKERQUE: Le patron du syndicat agricole majoritaire FNSEA a appelé jeudi Emmanuel Macron à exprimer sa vision pour l'agriculture "sans plus attendre", après plusieurs mois de mobilisation de la profession.

"Le président de la République semble hésiter à prendre rendez-vous, celui qu'il nous avait promis au Salon de l'agriculture, en estimant que la situation n'était pas mûre", a souligné Arnaud Rousseau à la clôture du 78e congrès annuel du syndicat à Dunkerque.

"Qu'en est-il de l'ambition du chef de l'Etat? Le discours (de 2017, NDLR) de la montée en gamme a vécue", a-t-il ajouté. "Qu'il nous donne sa vision sans plus attendre."

Le patron de la FNSEA a aussi appelé le gouvernement à "reprendre la maîtrise de son administration" afin de mettre plus rapidement en oeuvre les mesures en faveur des agriculteurs.

"Il n'est pas admissible qu'il se passe un mois entre une décision ministérielle et la diffusion de l'instruction aux échelons administratifs territoriaux", a-t-il déclaré devant le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, venu au congrès.

"Je sais les lenteurs", "un certain nombre de réticences" dans les systèmes administratifs nationaux et européens, a répondu le responsable gouvernemental peu après, à la fois applaudi et légèrement hué.

Mais "nous avons avancé comme jamais", a-t-il affirmé avant de détailler les différentes actions engagées, comme il l'a souvent fait ces dernières semaines.

Avant son intervention, dans une salle remplie de congressistes ayant de nombreux griefs à l'encontre du gouvernement, un animateur avait appelé le public à respecter la prise de parole du ministre.

Des adhérents ont, pendant le discours, brandi des affichettes "Plan élevage", "Produire plus et vivre mieux", "Liberté d'usage de nos prairies", distribuées au préalable par le syndicat.

Au fond de la salle, quelques uns ont fait du bruit en tapant sur le sol. Autour de la tribune, des militants portaient les noms de leurs régions à l'envers, dans la veine des retournements de panneaux de ville qui ont marqué la mobilisation de la FNSEA et de son allié Jeunes agriculteurs (JA).

«Ne pas lâcher»

"Rarement, de mémoire de syndicaliste, autant de sujets ont été ouverts aussi vite" à l'issue d'un mouvement social, a reconnu Arnaud Rousseau.

"Personne ne croyait il y a encore quelques mois qu'on arrive à faire bouger les lignes aussi rapidement au niveau européen", a estimé de son côté Arnaud Gaillot, le président des JA.

Mais "il y a aussi encore plein de sujets qu'il ne faut pas lâcher", a-t-il ajouté en évoquant notamment l'eau, les pesticides et surtout la façon de faciliter l'installation de jeunes exploitants. Peut-être certains ne veulent-ils pas faire de l'agriculture pendant toute leur carrière, a-t-il remarqué.

Le 78e congrès de la FNSEA se tient depuis mardi au palais des congrès de Dunkerque, sous la garde d'un discret déploiement de forces de l'ordre. Les événements organisés par le syndicat majoritaire sont régulièrement la cible de manifestations d'organisations environnementales qui dénoncent le modèle porté par la FNSEA, qualifié de "productiviste" au détriment de la nature et jugé inadapté face au changement climatique.

Lors d'une table ronde, des représentants de plusieurs syndicats agricoles européens ont partagé des motifs communs d'insatisfaction, évoquant la bureaucratie, les normes environnementales, la concurrence des produits importés, l'influence des lobbys écologistes dans les hautes sphères du pouvoir, des décisions dictées par "l'idéologie" plutôt que par l'agronomie.

La révolte du monde paysan dans de nombreux pays européens est née en grande partie de l'accumulation de textes "qui a créé chez les agriculteurs une sensation d'étouffement réglementaire", a ainsi estimé ChristianeLe patron de la FNSEA a aussi appelé le gouvernement à "reprendre la maîtrise de son administration" afin de mettre plus rapidement en oeuvre les mesures en faveur des agriculteurs Lambert, présidente du Comité des organisations professionnelles agricoles de l'Union européenne et ex-patronne de la FNSEA.

Alors que le congrès est aussi un moment de galvanisation des troupes à moins d'un an des élections professionnelles en France, Christiane Lambert a visé les syndicats qui cherchent à fissurer l'hégémonie de la FNSEA et des JA.

"Des drapeaux jaunes à notre gauche (la Confédération paysanne, NDLR), des drapeaux jaunes à notre droite, qui parlent beaucoup mais qui agissent peu (la Coordination rurale, NDLR), la meilleure voie possible, celle de l'efficacité, elle se situe entre ces deux extrêmes", a-t-elle déclaré en appelant également les agriculteurs à voter lors des élections européennes en juin.

"C'est très facile de dire que tout est de la faute de l'Europe. Mais l'Europe, c'est à nous de la faire", a souligné la Belge Mariannne Streel, présidente de la Fédération wallonne de l'agriculture.


Macron part «dès ce soir» en Nouvelle-Calédonie pour y installer «une mission»

Emmanuel Macron (Photo, AFP).
Emmanuel Macron (Photo, AFP).
Short Url
  • L'état d'urgence ne peut être prolongé au-delà de douze jours sans soumettre un texte au Parlement
  • Une éventuelle prorogation nécessiterait une saisine de l'Assemblée nationale et du Sénat avant le 27 mai

PARIS: Emmanuel Macron va se rendre "dès ce soir" en Nouvelle-Calédonie, secouée par une flambée de violences, pour y installer "une mission", a annoncé mardi la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot.

"Il a été annoncé par le président de la République, en Conseil des ministres, qu'il se rendra sur place (en Nouvelle-Calédonie). Il partira sur place dès ce soir pour y installer une mission", a affirmé Mme Thevenot à l'issue du Conseil des ministres.

Le président part "dans un esprit de responsabilité", a ajouté la porte-parole, sans détailler la "mission" évoquée ni préciser combien de temps le chef de l'Etat resterait sur l'archipel.

Elle a redit que "le retour à l'ordre était le préalable à tout dialogue", alors qu'une réforme électorale contestée par les indépendantistes doit être validée "avant la fin juin" par le Congrès réunissant sénateurs et députés, calendrier fixé par le chef de l'Etat lui-même.

Mais "l'exécutif poursuit (...) la construction de la solution politique pour le territoire", a-t-elle aussi souligné.

La prorogation de l'état d'urgence, décrété mercredi dernier, "n'a pas été abordée" lors de ce Conseil des ministres, a indiqué la porte-parole du gouvernement. "Si la situation doit être encore améliorée, elle est en voie de se normaliser", a-t-elle justifié.

L'état d'urgence ne peut être prolongé au-delà de douze jours sans soumettre un texte au Parlement. Une éventuelle prorogation nécessiterait une saisine de l'Assemblée nationale et du Sénat avant le 27 mai.

Le Premier ministre Gabriel Attal aura "aussi l'occasion d'y aller (dans l'archipel), pas immédiatement mais dans les semaines à venir", a précisé Mme Thevenot, alors que le dossier calédonien n'est plus piloté directement par Matignon depuis 2020 et que trois anciens Premiers ministres plaident pour qu'il soit de nouveau géré par le chef du gouvernement.

Après une semaine d'émeutes en réaction à une réforme du corps électoral qui ont fait six morts dont deux gendarmes, Emmanuel Macron avait constaté lors d'un Conseil de défense lundi "de nets progrès dans le rétablissement de l'ordre" en Nouvelle-Calédonie.

L'exécutif avait à cette occasion décidé de mobiliser "pour un temps" des personnels militaires pour "protéger les bâtiments publics" et soulager ainsi les forces de sécurité intérieure, selon l'Elysée.

«Réparer le dialogue»

L'aéroport international de Nouméa reste toutefois fermé aux vols commerciaux jusqu'à samedi 09H00 (00H00 à Paris), a indiqué mardi le gestionnaire de la plateforme.

Le député calédonien non indépendantiste Philippe Dunoyer (Renaissance), qui plaide aussi pour un report du Congrès, dit "espérer que cette initiative permette d'entreprendre de renouer les fils du dialogue" mais "on ne peut pas tout faire en un mois et le Congrès ne peut pas se tenir avant le 27 juin".

"Ce n'est pas une manière de dire aux indépendantistes +vous avez gagné+, c'est au contraire une opportunité pour le dialogue qu'il faut saisir", a-t-il estimé auprès de l'AFP.

"Maintenant, il faut rassurer, apaiser et réparer le dialogue vers un accord global. Suspendre la réforme et nommer rapidement une mission de dialogue", a réagi sur X le député PS Arthur Delaporte, fustigeant le "temps perdu".

Son collègue LFI Thomas Portes a qualifié au contraire cette visite d'"irresponsable". "La colère ne va faire qu'augmenter avec ce déplacement monarchique".


Inquiétude dans le «Petit Haïti» de Saint-Domingue après le plébiscite du président Abinader

Une famille roule à moto dans une rue d'un quartier connu sous le nom de « Petite Haïti » à Saint-Domingue, le 20 mai 2024 (Photo, AFP).
Une famille roule à moto dans une rue d'un quartier connu sous le nom de « Petite Haïti » à Saint-Domingue, le 20 mai 2024 (Photo, AFP).
Short Url
  • L'hostilité entre les deux pays ne date pas d'hier
  • Le dictateur dominicain Rafael Trujillo a lui fait massacrer des milliers de Haïtiens en 1937

SAINT-DOMINGUES: Johan Perez surveille les voitures garées dans une rue du "Petit Haïti", un quartier populaire commerçant et anarchique de Saint-Domingue, où vivent et travaillent des centaines de Haïtiens. Il est inquiet.

Après la réélection triomphale au premier tour du président Luis Abinader, qui a fait de la lutte contre l'immigration haïtienne un de ses chevaux de bataille, il craint que le sentiment "anti-haïtien" ne s'intensifie.

C'est une journée ordinaire. L'activité bat son plein dans ce secteur chaotique du centre-ville de la capitale dominicaine, avec des dizaines de boutiques informelles installées devant des entrepôts aux murs écaillés. Ici dans Le "Pequeno Haïti" pendant du "Little Haïti" de New York ou Miami, on vend de tout: de la canne à sucre aux appareils électriques usagés, en passant par les vêtements et les légumes.

La plupart des vendeurs préfèrent se taire, de peur que leur accent créole-français ne les trahisse. Les descentes de police sont monnaie courante. Malheur à celui qui se fait prendre. A chacune d'entre elles, la police embarque les sans-papiers pour les emmener dans un centre de rétention avant de les mettre dans un camion, direction Haïti.

"Les choses se durcissent un peu", explique Johan Perez, 32 ans, de mère dominicaine et de père haïtien, qui vit des pourboires des automobilistes fréquentant la zone. "Le +type+ (Abinader) est plus fort maintenant".

Il raconte que la police a arrêté plusieurs de ses amis il y a quelques jours à peine. Et au coin de la rue, les agents de l'immigration sont entrés dans un petit immeuble et en ont sorti les habitants sans papiers. "Ils les ont jetés la tête la première" dans un bus avec d'autres migrants.

Selon les experts et militants des droits de l'homme, le principal critère des contrôles est la couleur de la peau mais M. Perez souligne que la langue joue également un rôle.

Les expulsions sont passées de 122.000 en 2022 à 250.000 en 2023, selon les données officielles.

Depuis son arrivée au pouvoir en 2020, le président Abinader a imposé une politique de fermeté à l'égard de la migration haïtienne. Outre les descentes et les expulsions, il a renforcé la présence des forces armées à la frontière et fait construire un mur de 164 km entre les deux pays.

Sa réélection conforte cette fermeté dans un pays où le racisme anti-haïtien s'est propagé et où l'immigration est souvent assimilée à la criminalité.

L'hostilité entre les deux pays ne date pas d'hier. Haïti, ancienne colonie française qui s'est émancipée en 1804, a occupé l'actuelle République dominicaine pendant 22 ans jusqu'en 1856, massacrant des milliers de personnes.

«Acide»

Le dictateur dominicain Rafael Trujillo a lui fait massacrer des milliers de Haïtiens en 1937.

Les Dominicains parlent souvent de l'immigration haïtienne comme d'une "deuxième invasion".

De nombreux Haïtiens possédant des papiers en règle courent aussi le risque de devenir clandestins, en raison d'un parcours bureaucratique de plus en plus lent et onéreux

C'est le cas de Nicolas Legrand, 60 ans, qui vit à Saint-Domingue depuis 1987. Sa carte de résident a expiré en 2022 et depuis, il ne détient qu'une petite note indiquant que son processus est en cours.

"Si Dieu le veut, la situation s'améliorera à Haïti et j'y retournerai", dit M. Legrand en vendant ses mouchoirs. "Mais ici au moins je suis tranquille".


CPI: les droites françaises rejettent toute «équivalence» entre le Hamas et Israël

Marion Maréchal, vice-présidente exécutive du parti d'extrême droite français "Reconquête", (Photo, AFP).
Marion Maréchal, vice-présidente exécutive du parti d'extrême droite français "Reconquête", (Photo, AFP).
Short Url
  • La France a indiqué, via son ministère des Affaires étrangères, qu'elle «soutient la CPI»
  • «Cette équivalence est proprement insupportable», a renchéri le patron des sénateurs Républicains

PARIS: Les responsables des principaux partis de droite et d'extrême droite français ont dénoncé mardi une "équivalence insupportable" et un "parallèle honteux" après que le procureur de la Cour pénale internationale a réclamé des mandats d'arrêts contre des dirigeants du Hamas et du gouvernement israélien.

Ces réquisitions visent précisément le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ministre de la Défense Yoav Gallant d'une part, et les trois plus hauts chefs du Hamas (Ismaïl Haniyeh, Mohammed Deif, Yahya Sinouar) d'autre part.

La France a indiqué, via son ministère des Affaires étrangères, qu'elle "soutient la CPI". Une position dont le vice-président du Rassemblement national, Sébastien Chenu, s'est dit "très étonné", estimant sur RTL "qu'on ne peut pas mettre ce signe égal" entre "un état démocratique agressé et des terroristes".

«Partialité»

"Cette équivalence est proprement insupportable", a renchéri le patron des sénateurs Républicains Bruno Retailleau sur Sud Radio, défendant le "droit d'Israël à se défendre" même si sa riposte à Gaza est "sans doute mal proportionnée".

La tête de liste de son parti aux élection européennes, François-Xavier Bellamy, a lui pointé sur Public Sénat la "partialité manifeste" du procureur de la CPI, dont la position "ressemble à une forme de militantisme inquiétant".

"Faire un parallèle entre les dirigeants israéliens et le Hamas (...) est une honte", a tranché sur CNews et Europe1 sa rivale d'extrême droite Marion Maréchal (Reconquête!), qui "réfute totalement ce qui est insinué à travers cette poursuite, à savoir qu'il y aurait un génocide à Gaza".

A l'inverse, les chefs de file de la gauche française - de l'insoumis Jean-Luc Mélenchon au socialiste Olivier Faure, en passant par le communiste Fabien Roussel - se sont félicités lundi de l'annonce du procureur de la CPI, en particulier à l'encontre de M. Netanyahu.