L'Ukraine annonce un long combat contre l'«emprise» russe en Afrique

Des manifestants brandissent une banderole indiquant «Merci Wagner», lors d'une manifestation organisée pour célébrer l'annonce du retrait des troupes françaises du Mali, à Bamako, en février 19, 2022. (AFP)
Des manifestants brandissent une banderole indiquant «Merci Wagner», lors d'une manifestation organisée pour célébrer l'annonce du retrait des troupes françaises du Mali, à Bamako, en février 19, 2022. (AFP)
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Publié le Jeudi 17 août 2023

L'Ukraine annonce un long combat contre l'«emprise» russe en Afrique

  • Si «la plupart des pays africains» affichent toujours leur «neutralité» face au conflit, «une lente érosion des positions russes en Afrique est en cours», assure le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba
  • La Russie a entamé depuis plusieurs années un rapprochement intense avec l'Afrique, y compris via les services de sécurité fournis par Wagner, notamment au Mali et en République centrafricaine

KIEV: Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba a annoncé à l'AFP un combat "de longue haleine" pour "faire renaître" les relations de Kiev avec l'Afrique et réduire l'"emprise" de Moscou sur ce continent fondée, selon lui, sur "la coercition, la corruption et la peur".

Après des décennies d'oubli, Kiev a lancé une opération séduction en Afrique dans l'espoir d'obtenir son soutien face à l'invasion russe de l'Ukraine débutée en février 2022.

"De nombreuses années ont été perdues, mais nous allons faire avancer une renaissance ukraino-africaine, faire renaître ces relations", a déclaré M. Kouleba dans un entretien accordé mercredi à l'AFP.

"Ce continent a besoin d'un travail systématique et de longue haleine", a ajouté le ministre, qui a déjà effectué trois tournées en Afrique depuis l'automne dernier.

En juin, une délégation de chefs d'Etats africains menée par le président sud-africain Cyril Ramaphosa s'est par ailleurs rendue en Ukraine.

Si "la plupart des pays africains" affichent toujours leur "neutralité" face au conflit, "une lente érosion des positions russes en Afrique est en cours", a assuré le ministre en citant le Liberia, le Kenya, le Ghana, la Côte d'Ivoire, le Mozambique, le Rwanda et la Guinée équatoriale parmi les nouveaux partenaires de Kiev sur le continent.

«Propagande et Wagner»

"Nous ne voulons pas être une autre Russie. Notre stratégie n'est pas de remplacer la Russie, mais de libérer l'Afrique de l'emprise russe", a-t-il souligné.

M. Kouleba accuse le Kremlin d'utiliser "la coercition, la corruption et la peur" pour maintenir des pays africains dans son giron, tout en assurant que Moscou n'avait que "deux puissants outils de travail en Afrique: la propagande et (le groupe paramilitaire) Wagner".

La Russie a entamé depuis plusieurs années un rapprochement intense avec l'Afrique, y compris via les services de sécurité fournis par Wagner, notamment au Mali et en République centrafricaine, en se présentant comme un rempart contre l'"impérialisme" et le "néocolonialisme" occidental.

M. Kouleba a par ailleurs qualifié de "mensonges" les inquiétudes exprimées par Moscou au sujet de la sécurité alimentaire de l'Afrique, après s'être retiré d'un accord crucial qui a permis d'exporter en un an 33 millions de tonnes de grains ukrainiens par la mer Noire, malgré l'invasion russe.

"Les Africains ont vu que toutes ces histoires de (Vladimir) Poutine sur la façon dont il se soucie des pays africains sont des mensonges", a lancé M. Kouleba.

L'abandon par Moscou en juillet de cet accord a fait craindre une hausse des prix des céréales qui touche particulièrement les pays les plus pauvres. Le président russe a ensuite promis de livrer gratuitement des céréales à six pays africains.

"Ce sont l'agriculteur ukrainien et le consommateur africain de pain qui paient (la sortie de Moscou) le plus cher", a estimé M. Kouleba.

Enjeux «trop élevés»

S'exprimant sur l'éreintante contre-offensive lancée contre l'armée russe depuis juin, le ministre a déclaré que les troupes ukrainiennes avaient pour "objectif" de libérer toute l'Ukraine, y compris la péninsule de Crimée annexée par Moscou en 2014, "peu importe le temps que cela prendra".

De l'aveu des dirigeants à Kiev, cette opération militaire avance à un rythme moins soutenu qu'attendu.

Elle a permis de reprendre une poignée de petites localités mais bute sur de solides lignes défensives russes, faites notamment de tranchées et de champs de mines.

L'Ukraine, dont les pertes militaires et civiles sont estimées par les Occidentaux à plus de 100.000 tués ou blessés, "paie le prix le plus élevé" de ce conflit, a admis le ministre.

"Mais tant que le peuple de l'Ukraine estime que l'Ukraine est capable de gagner et d'atteindre ses objectifs par la voie militaire, la lutte va continuer", a-t-il assuré.

"Nous sommes tous fatigués. Je suis fatigué et vous êtes fatigués", mais "les enjeux sont trop élevés pour permettre à la fatigue de déterminer la nature de nos décisions", a ajouté M. Kouleba.

S'il a assuré ne pas ressentir de pression des alliés occidentaux de l'Ukraine pour qu'elle accélère sa contre-offensive, le ministre s'est toutefois dit "un peu irrité" par certains commentaires sur la lenteur de cette opération.

"Le bonne approche pour ceux qui veulent que ça soit rapide et brillant est de rejoindre la légion étrangère (ukrainienne) et de le faire rapidement et brillamment", a-t-il lâché.

Alors que l'Occident a déjà envoyé à Kiev des armes d'une valeur de plusieurs dizaines de milliards d'euros, M. Kouleba a souligné le besoin d'encore plus d'armes "tant que nous n’avons pas gagné".

L'Ukraine a par ailleurs donné des "garanties" qu'elle n'utiliserait pas sur le territoire russe des armes fournies par les Occidentaux, a indiqué M. Kouleba. "Il y a eu quelques occasions où nous avons fait de telles promesses et nous les tenons", a-t-il ajouté.


Alzheimer : la vente d'un traitement pour certains patients est autorisée par Bruxelles

Vue générale prise le 04 novembre 2010 au Mans, de l'atrium, équipé d'un bar, d'une boutique de coiffeuse-esthéticienne et d'une volière, de "La Souvenance", maison d'accueil de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.
Vue générale prise le 04 novembre 2010 au Mans, de l'atrium, équipé d'un bar, d'une boutique de coiffeuse-esthéticienne et d'une volière, de "La Souvenance", maison d'accueil de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.
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  • L'autorisation de ce traitement, commercialisé sous le nom de Leqembi, a été accordée mardi, sur la base d'une analyse scientifique de l'EMA
  • Le Leqembi, mis au point par les laboratoires pharmaceutique japonais Eisai et américain Biogen, a été autorisé en janvier 2023 aux États-Unis.

BRUXELLES : La Commission européenne a annoncé mercredi qu'elle avait formellement autorisé un traitement destiné à réduire le déclin cognitif chez certaines personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer, après le feu vert de l'Agence européenne des médicaments.

L'autorisation de ce traitement, commercialisé sous le nom de Leqembi, a été accordée mardi, sur la base d'une analyse scientifique de l'EMA « qui a conclu que les bénéfices de ce médicament étaient supérieurs aux risques », a souligné la Commission dans un communiqué.

Fin 2024, le régulateur européen avait recommandé d'accorder une autorisation de mise sur le marché du Leqembi (lécanemab) pour « le traitement des troubles cognitifs légers (troubles de la mémoire et de la pensée) ou de la démence légère dus à la maladie d'Alzheimer (maladie d'Alzheimer au stade précoce) ».

Elle avait précisé que ce feu vert était valable uniquement pour les patients présentant un risque plus faible d'hémorragie cérébrale potentielle, c'est-à-dire ceux qui n'ont « qu'une ou aucune copie du gène ApoE4 », un type de gène connu pour être un facteur de risque important pour la maladie d'Alzheimer.

Le Leqembi, mis au point par les laboratoires pharmaceutique japonais Eisai et américain Biogen, a été autorisé en janvier 2023 aux États-Unis pour les patients n'ayant pas atteint un stade avancé de la maladie. Il est également commercialisé au Japon et en Chine.

Malgré des décennies de recherche, les scientifiques n'ont pas encore réussi à faire une véritable percée dans la lutte contre la maladie d'Alzheimer, qui touche des dizaines de millions de personnes dans le monde. 


Un enfant meurt chaque jour en tentant de franchir la Méditerranée centrale, selon l'Unicef

Environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie. (Photo AFP)
Environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie. (Photo AFP)
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  • Environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie.
  • Les droits consacrés par la Convention relative aux droits de l'enfant ne connaissent pas de frontières ni de rivages.

ROME : Selon un rapport publié mardi par l'Unicef, environ 3 500 enfants sont morts ou portés disparus ces dix dernières années, soit un par jour, en tentant de traverser la Méditerranée centrale entre l'Afrique du Nord et l'Italie.

L'Unicef se fonde sur le fait que parmi les personnes arrivées sur le sol européen par cette voie migratoire, un sur six est un enfant, pour estimer ce chiffre.

Ce chiffre pourrait être sous-estimé, car de nombreux naufrages passent inaperçus, faute de survivants pour témoigner.

Par ailleurs, sept enfants sur dix voyagent seuls, sans leurs parents, selon l'agence onusienne chargée des enfants.

« Beaucoup d’enfants qui tentent de traverser la Méditerranée centrale fuient la guerre, les conflits, la violence et la pauvreté », indique le rapport, précisant que « plus de la moitié des enfants et des jeunes interrogés déclarent avoir subi des violences physiques et un tiers affirment avoir été détenus contre leur gré ». 

« Les gouvernements doivent protéger les droits et l'intérêt supérieur des enfants (...). Les droits consacrés par la Convention relative aux droits de l'enfant ne connaissent pas de frontières ni de rivages : ils accompagnent les enfants lorsqu’ils les traversent », a déclaré Regina De Dominicis, haut responsable de l'Unicef, citée dans le rapport.

L'agence onusienne rappelle que si l’adoption du Pacte européen sur la migration et l’asile devant entrer en vigueur mi-2026 « peut permettre de mieux organiser la gestion des migrations, ce dernier doit être mis en œuvre en parfaite conformité avec les obligations légales de défense de l'intérêt supérieur de l’enfant ».

L'Unicef appelle également à renforcer les opérations de recherche et de sauvetage en mer pour prendre en compte les besoins spécifiques des enfants. 

« À son arrivée, chaque enfant doit immédiatement bénéficier d'une représentation juridique ainsi que de solides mesures de protection. Les mesures de restriction des déplacements ne doivent jamais entraîner la détention d'un enfant dans un centre de rétention, que ce soit lors des procédures de contrôle, de passage des frontières, de demande d’asile ou de renvoi », conclut l'Unicef. 


La Turquie cherche à renforcer son ancrage sur le continent africain

Cette photo prise et diffusée par le bureau de presse de la présidence turque le 12 avril 2025 montre le président turc Recep Tayyip Erdogan (R) rencontrant le président somalien Hassan Sheikh Mohamud lors de la 4e édition du Forum diplomatique d'Antalya (ADF2025) à Antalya. (Photo by Handout / Turkish Presidency Press Office / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le bureau de presse de la présidence turque le 12 avril 2025 montre le président turc Recep Tayyip Erdogan (R) rencontrant le président somalien Hassan Sheikh Mohamud lors de la 4e édition du Forum diplomatique d'Antalya (ADF2025) à Antalya. (Photo by Handout / Turkish Presidency Press Office / AFP)
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  • La Turquie cherche désormais à y étendre son influence en proposant sa médiation dans des conflits.
  • Très impliqué sur les dossiers syrien et ukrainien, le président turc Recep Tayyip Erdogan a renforcé son image d'interlocuteur clé en Afrique en négociant, il y a quelques mois, un accord de paix entre la Somalie et l'Éthiopie.

ANTALYA, TURQUIE : La Turquie, qui pousse ses pions en Afrique depuis plusieurs années, cherche désormais à y étendre son influence en proposant sa médiation dans des conflits, à la faveur notamment du retrait de la France et des États-Unis.

Témoignage des efforts d'Ankara pour consolider son ancrage sur le continent, un forum diplomatique organisé ce week-end à Antalya, dans le sud de la Turquie, a réuni, aux côtés du président syrien Bachar el-Assad, des ministres russe et ukrainien des Affaires étrangères, ainsi que de nombreux responsables africains, dont le chef de l'État somalien.

« Les pays africains cherchent des alternatives et la Turquie en représente une », a affirmé à l'AFP Eghosa Osaghae, directeur général de l'Institut nigérian des affaires internationales (NIIA), présent à Antalya. 

Très impliqué sur les dossiers syrien et ukrainien, le président turc Recep Tayyip Erdogan a renforcé son image d'interlocuteur clé en Afrique en négociant, il y a quelques mois, un accord de paix entre la Somalie et l'Éthiopie.

Selon M. Osaghae, la capacité d'Ankara à combler le vide laissé par la France, dont de nombreuses anciennes colonies se sont détournées ces dernières années, « dépendra en grande partie de l'attrait des offres turques ».

« Nous entretenons avec la France des relations dont nous sommes très fiers, mais la France ne nous empêche pas d'avoir d'autres partenariats », a déclaré à l'AFP Léon Kacou Adom, le ministre ivoirien des Affaires étrangères, lors du forum d'Antalya.

Le pays d'Afrique de l'Ouest, ancienne colonie française, souhaite collaborer avec la Turquie dans tous les secteurs, notamment le commerce, la communication, la sécurité, l'éducation et la formation, a-t-il souligné.

« Tout cela nous intéresse (...). La Turquie nous fait des offres que nous étudions », a-t-il ajouté.

- « Solutions aux problèmes africains » -

De nombreux pays africains sont confrontés à des menaces sécuritaires, émanant de groupes comme Boko Haram ou les shebab somaliens.

« Si la Turquie peut apporter son aide dans ces domaines, pourquoi pas ? », estime M. Osaghae. « Le point positif est que de nombreux pays africains coopèrent déjà militairement avec la Turquie. Cela peut être la pierre angulaire de l'influence turque », relève-t-il.

La Turquie, qui a proposé en janvier sa médiation entre le Rwanda et la République démocratique du Congo, a signé ces dernières années des accords de défense avec plusieurs États africains dont la Somalie, la Libye, le Kenya, le Rwanda, l'Éthiopie, le Nigeria et le Ghana.

Ces accords ont ouvert des marchés à l'industrie de défense turque, notamment pour ses drones réputés fiables et bon marché.

« Nous nous efforçons de faire en sorte que l'Afrique trouve ses propres solutions aux problèmes africains », affirme Alp Ay, diplomate turc et représentant spécial d'Ankara dans les négociations entre la Somalie et la région séparatiste du Somaliland.

Selon un haut diplomate somalien, Ankara a joué « un rôle très utile en parvenant à réunir les deux pays pour résoudre ce problème ». « L'Afrique a désespérément besoin de médiateurs », résume pour sa part le politologue nigérian Eghosa Osaghae.

Si la responsabilité du respect de l'accord incombe désormais aux deux parties, la Turquie continuera toutefois de jouer son rôle de facilitateur, souligne le diplomate turc Alp Ay, qui envisage l'avenir avec « espoir ».

Recep Tayyip Erdogan s'est entretenu avec son homologue somalien, Hassan Cheikh Mohamoud, samedi à Antalaya.

Au cours de leur rencontre, les deux hommes ont promis d'« accroître la coopération » entre les deux États, selon Ankara, qui dispose déjà d'un droit d'exploration des ressources énergétiques le long des côtes somaliennes.