Expulsions d'étrangers depuis la France: peu de résultats, selon la Cour des comptes

Le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, assiste à une visite au siège de l'unité CRS 81 de la police française, à Marseille, dans le sud de la France, le 3 janvier 2024. (Photo, AFP)
Le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, assiste à une visite au siège de l'unité CRS 81 de la police française, à Marseille, dans le sud de la France, le 3 janvier 2024. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 04 janvier 2024

Expulsions d'étrangers depuis la France: peu de résultats, selon la Cour des comptes

  • Le document paraît deux semaines après l'adoption d'une loi sur l'immigration controversée, que le Conseil constitutionnel doit encore valider
  • En 2022 la France a expulsé 11 406 personnes, dont 7 214 éloignements forcés

PARIS: La France ne parvient à expulser qu'une "petite minorité" des étrangers sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF), environ un sur dix, a indiqué jeudi la Cour des comptes, en appelant l'Etat à "mieux s'organiser".

Dans un rapport, les magistrats ont jugé "inefficace" la stratégie française qui repose surtout sur la délivrance massive de ces OQTF.

Le document paraît deux semaines après l'adoption d'une loi sur l'immigration controversée, que le Conseil constitutionnel doit encore valider et dont le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, assure qu'elle doit surtout permettre d'expulser plus efficacement les étrangers "délinquants".

En 2022, 153.042 mesures d'éloignement ont été prononcées, dont 134.280 OQTF. La même année, la France a expulsé 11.406 personnes, dont 7.214 "éloignements forcés".

"Seule une petite minorité - autour de 10% - des OQTF sont exécutées", observe la Cour des comptes. Une proportion "très faible", a commenté lors d'une conférence de presse le premier président de la Cour, Pierre Moscovici.

Depuis l'été 2022, les autorités concentrent leurs efforts sur les profils présentant une menace à l'ordre public ou ayant été condamnés pénalement, une "priorisation pertinente", estiment les auteurs du rapport.

Selon les données compilées par la Cour, ce virage correspond à une tendance lourde sur les années 2019-2022: lorsqu'une procédure d'expulsion est enclenchée au motif d'une menace à l'ordre public, elle est exécutée dans 23% des cas, 45% lorsque c'est en raison d'une condamnation pénale.

A l'inverse, une OQTF délivrée à une personne déboutée de l'asile ou après un refus de titre de séjour ne se conclut que dans 2% des cas par une expulsion.

Résultat: mi-décembre 2022, 91% des personnes enfermées en centre de rétention administrative l'étaient en raison de troubles à l'ordre public ou pour radicalisation, contre 44% mi-août 2022.

Obstacles

Jeudi, le ministère de l'Intérieur a annoncé une hausse de 30% sur un an des expulsions d'"étrangers délinquants", avec 4.686 personnes expulsées en 2023 contre 3.615 en 2022.

Les personnes expulsées le sont principalement vers le Maghreb, l'Afrique subsaharienne et l'Europe centrale.

Grâce à sa loi, le gouvernement veut réduire de douze à quatre le nombre de recours pour contester les procédures d'expulsion et lever plusieurs protections accordées à certaines catégories de personnes, par exemple les étrangers arrivés en France avant l'âge de 13 ans.

Mais plusieurs autres "obstacles expliquent ce faible taux" d'expulsion, note la Cour.

D'abord, de nombreux pays d'origine rechignent à délivrer des laissez-passer consulaires, un document sans lequel l'expulsion ne peut être exécutée.

Ensuite, l'administration peine à démontrer l'identité des personnes qu'elle cherche à expulser, dans "20 à 30%" des procédures.

Enfin, le très grand nombre de procédures enclenchées "engorge les préfectures" qui "délivrent parfois des OQTF à des personnes insérées dans la société" ou "qui ne peuvent pas être éloignées", par exemple des ressortissants de pays en guerre.

"L’État peut mieux s'organiser", résume la Cour.

Mais l'objectif fixé par la président français Emmanuel Macron d'exécuter 100% des OQTF paraît "fantasmatique", selon Pierre Moscovici, un ancien Commissaire européen.

Avec la priorité donnée à l'expulsion des "délinquants", "l'aide au retour volontaire peut être l'une des réponses" pour les autres personnes en situation irrégulière, avance la Cour, qui préconise "d'assouplir" ce dispositif visant à encourager un départ par le versement d'une somme allant jusqu'à 2.500 euros.

Avec 4.900 "retours aidés" en 2022, "la France accuse un retard notable" sur ses voisins. Un calcul également financier: l'aide au retour volontaire coûte moins cher qu'une expulsion manu militari (en moyenne 4.414 euros, selon la Cour).

 

 


L’économie française à bout de souffle, à l’orée de la présidentielle de 2027

Alors que le Premier ministre François Bayrou dévoile un plan d’économies de 44 milliards d’euros et brandit la rigueur, la pauvreté bat des records et les faillites d’entreprises se multiplient. (AFP)
Alors que le Premier ministre François Bayrou dévoile un plan d’économies de 44 milliards d’euros et brandit la rigueur, la pauvreté bat des records et les faillites d’entreprises se multiplient. (AFP)
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  • Treize vulnérabilités systémiques menacent le pays, dont trois sont identifiées comme critiques : le verrouillage économique et social, l’adaptation insuffisante au changement climatique, et la montée en puissance d’une défiance civique
  • Premier constat : l’économie française est enlisée dans un triangle infernal, fait de déclin démographique, de productivité stagnante et d’endettement massif

PARIS : L’économie française est à bout de souffle, confrontée à une succession de tempêtes qu’aucune stratégie cohérente ne semble pouvoir contenir. C’est le sombre tableau dressé par l’Institut Montaigne (un think tank qui propose des études sur les politiques publiques) dans son rapport « France 2040 : projections pour l’action politique ».

Alors que le Premier ministre François Bayrou dévoile un plan d’économies de 44 milliards d’euros et brandit la rigueur, la pauvreté bat des records et les faillites d’entreprises se multiplient.

Dans son rapport publié le 16 juillet, l’Institut Montaigne ne mâche pas ses mots : sans une « volonté politique puissante », le pire est à venir.

Treize vulnérabilités systémiques menacent le pays, dont trois sont identifiées comme critiques : le verrouillage économique et social, l’adaptation insuffisante au changement climatique, et la montée en puissance d’une défiance civique qualifiée de « structurelle ».

Un triangle infernal

Premier constat : l’économie française est enlisée dans un triangle infernal, fait de déclin démographique, de productivité stagnante et d’endettement massif.

Sur le front écologique, malgré des atouts comme le nucléaire et une base industrielle diversifiée, l’action publique reste « désordonnée et insuffisamment financée », affirme le rapport.

La transition énergétique, chantier crucial pour la prospérité future, est bloquée par l’inertie politique et les logiques électoralistes. L’Institut fustige le maigre bilan d’Emmanuel Macron sur le climat, malgré de grandes annonces.

Mais c’est la défiance civique qui inquiète le plus : les citoyens ne croient plus aux promesses de leurs dirigeants, et le fossé entre discours politique et résultats concrets alimente un ressentiment croissant, compromettant la gouvernance du pays.

Pour éviter le décrochage complet, l’Institut Montaigne plaide pour des réformes profondes et cohérentes, telles que la modernisation de l’appareil productif, des investissements massifs dans la santé et la recherche, ainsi qu’une refonte du système éducatif.

Par ailleurs, un rapport de l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), publié le même jour, enfonce un autre clou : 9,8 millions de personnes vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, soit 15,4 % de la population française – un record depuis 1996.

Amer constat

Cette hausse de 0,9 point en un an s’explique par la fin des mesures exceptionnelles post-Covid (indemnité inflation, prime de rentrée), mais surtout par une stagnation des salaires et des prestations sociales.

Le contraste est saisissant : tandis que les revenus financiers des plus aisés explosent, les familles monoparentales s’enfoncent, et un tiers d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté.

Malgré les promesses de la « stratégie nationale de lutte contre la pauvreté », lancée en 2018, le constat est amer. Depuis le début du quinquennat Macron, la pauvreté a augmenté de 14 %, les aides exceptionnelles ont été supprimées, et les allocations revalorisées en dessous de l’inflation.

Sur le front économique, les signes de faiblesse s’accumulent. Après une décennie de timide renouveau industriel, la France rechute.

Pour assombrir encore plus le tableau, le cabinet Trendeo (un observatoire de l’emploi et de l’investissement) indique que le solde net d’usines est négatif pour le deuxième semestre consécutif.

L’industrie agroalimentaire, les produits métalliques, l’automobile… tous les secteurs souffrent, alors que la concurrence étrangère, la transition énergétique coûteuse et l’incertitude politique paralysent l’investissement.

Les faillites explosent. Selon Trendeo, plus de 34 100 entreprises ont déposé le bilan au premier semestre 2025, soit 24 % de plus qu’en 2019.

Derrière ces chiffres, plus de 100 000 emplois sont menacés, les petites et moyennes entreprises peinant à faire face à la baisse d’activité et à l’augmentation des charges.

Toujours selon Trendeo, le secteur de l’informatique, longtemps épargné, est désormais frappé de plein fouet, avec une hausse de 17 % des défaillances.

Une austérité assumée

Dans ce contexte tendu, François Bayrou a dévoilé, le 16 juillet, son grand plan d’économies pour 2026, visant à économiser 44 milliards d’euros.

Pour cela, le gouvernement mise sur une recette bien connue : réduction des dépenses publiques, gel des prestations sociales, et hausses d’impôts déguisées.

Les mesures les plus marquantes touchent le domaine de la santé, tandis que les retraités sont également mis à contribution, avec la fin programmée de l’abattement fiscal spécifique dont ils bénéficiaient.

Plus encore, une « année blanche » est prévue pour 2026 : retraites, prestations sociales, barème de l’impôt… rien ne sera revalorisé pour compenser l’inflation.

Une décision qui, en pratique, revient à augmenter l’impôt pour tous et à appauvrir les plus fragiles. Même les fonctionnaires ne seront pas épargnés.

Enfin, une nouvelle réforme du chômage est sur les rails, visant à durcir les conditions d’indemnisation, tandis que le gouvernement promet une « chasse accrue » à la fraude sociale et fiscale.

Alors que les signaux d’alerte s’accumulent – pauvreté record, défiance citoyenne, faillites d’entreprises – le gouvernement répond par une austérité assumée. De quoi faire dire à un observateur qu’il s’agit d’un cocktail des plus explosifs, à l’orée de la présidentielle de 2027.


La France demande l'accès à Gaza pour la presse, «pour montrer ce qu'il s'y passe»

La France appelle au "cessez le feu immédiat, à la libération de tous les otages du Hamas, qui doit être désormais désarmé, et à l'accès sans aucune entrave de l'aide humanitaire à Gaza", a ajouté le ministre. (AFP)
La France appelle au "cessez le feu immédiat, à la libération de tous les otages du Hamas, qui doit être désormais désarmé, et à l'accès sans aucune entrave de l'aide humanitaire à Gaza", a ajouté le ministre. (AFP)
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  • Plusieurs collaborateurs de l'AFP sur place se trouvent dans "une situation effroyable" selon la direction de l'agence
  • "Depuis des mois, nous assistons, impuissants, à la détérioration dramatique de leurs conditions de vie. Leur situation est aujourd’hui intenable, malgré un courage, un engagement professionnel et une résilience exemplaires"

PARIS: La France demande que "la presse libre et indépendante puisse accéder à Gaza pour montrer" ce qu'il se passe dans le territoire en danger de famine après 21 mois de guerre, a déclaré mardi le ministre français de Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.

"Nous avons l'espoir de pouvoir faire sortir quelques collaborateurs de journalistes dans les prochaines semaines", a ajouté le ministre sur France Inter, interrogé sur le cas de plusieurs collaborateurs de l'AFP sur place qui se trouvent dans "une situation effroyable" selon la direction de l'agence.

"Nous y consacrons beaucoup d'efforts et beaucoup d'énergie", a dit le ministre, qui s'exprimait depuis Kiev où il est en déplacement.

"Depuis des mois, nous assistons, impuissants, à la détérioration dramatique de leurs conditions de vie. Leur situation est aujourd’hui intenable, malgré un courage, un engagement professionnel et une résilience exemplaires", affirmait un communiqué de l'AFP lundi, tandis que la Société des journalistes (SDJ) alertait du risque de les "voir mourir".

"Nous avons perdu des journalistes dans des conflits, nous avons eu des blessés et des prisonniers dans nos rangs, mais aucun de nous n'a le souvenir d'avoir vu un collaborateur mourir de faim", soulignait la SDJ de l'agence.

L'ONU et des ONG font régulièrement état d'un risque de famine dans le territoire palestinien assiégé par Israël après plus de 21 mois de conflit, déclenché par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023.

M. Barrot a également dit que la France condamne "avec la plus grande fermeté" la "déplorable" extension de l'offensive israélienne à Gaza lancée lundi, "qui va aggraver une situation déjà catastrophique".

"Il n'y a plus aucune justification aux opérations militaires de l'armée israélienne à Gaza. C'est une offensive qui va aggraver une situation déjà catastrophique qui va provoquer de nouveaux déplacements forcés de populations que nous condamnons avec la plus grande fermeté", a-t-il dit.

La France appelle au "cessez le feu immédiat, à la libération de tous les otages du Hamas, qui doit être désormais désarmé, et à l'accès sans aucune entrave de l'aide humanitaire à Gaza", a ajouté le ministre.

L'armée israélienne a étendu lundi son offensive dans un nouveau secteur de la bande de Gaza, à Deir al-Balah, dans le centre du territoire palestinien, et entend agir dans des zones où elle n'était jamais allé au cours des 21 mois de guerre contre le Hamas, sommant les habitants d'évacuer les lieux.


Élections législatives partielles à Paris : Dati estime que Barnier est « instrumentalisé »

Cette combinaison de photographies d'archives réalisées le 18 juillet 2025 montre Rachida Dati (à gauche), posant lors d'une séance photo à Paris le 25 novembre 2019, et (à droite) l'ancien Premier ministre français Michel Barnier, posant lors d'une séance photo à Paris le 11 mai 2021.  (Photo de JOEL SAGET / AFP)
Cette combinaison de photographies d'archives réalisées le 18 juillet 2025 montre Rachida Dati (à gauche), posant lors d'une séance photo à Paris le 25 novembre 2019, et (à droite) l'ancien Premier ministre français Michel Barnier, posant lors d'une séance photo à Paris le 11 mai 2021. (Photo de JOEL SAGET / AFP)
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  • « J'ai du respect pour Michel Barnier, mais aujourd'hui, il est instrumentalisé par certains qui veulent la division », a déclaré la ministre de la Culture devant ses soutiens réunis dans un restaurant du 7e arrondissement de Paris, dont elle est maire.
  • Michel Barnier, soutenu par le président du parti Bruno Retailleau, se défend de toute ambition municipale.

PARIS : Rachida Dati, qui vise la mairie de Paris en 2026, a estimé lundi que son rival LR, Michel Barnier, était « instrumentalisé » dans la législative partielle qu'il brigue, tout en maintenant le flou sur sa propre candidature à cette élection prévue à la rentrée.

« J'ai du respect pour Michel Barnier, mais aujourd'hui, il est instrumentalisé par certains qui veulent la division », a déclaré la ministre de la Culture devant ses soutiens réunis dans un restaurant du 7e arrondissement de Paris, dont elle est maire.

« Il ne peut pas y avoir deux candidatures à Paris. En toute responsabilité, j'appelle à la raison, car nous avons une chance historique de gagner Paris en 2026 », a ajouté la maire LR devant environ 200 militants.

La ministre n'a pas apprécié la candidature de Michel Barnier dans la deuxième circonscription de Paris, où l'élection du député macroniste Jean Laussucq a été invalidée par le Conseil constitutionnel pour irrégularités dans ses comptes de campagne.

Moins de 24 heures après l'annonce de l'ex-Premier ministre, elle a demandé à être entendue par la Commission nationale d'investiture des Républicains, qui doit se prononcer le 28 juillet sur le candidat de ce parti dans cette circonscription huppée, qui recouvre une partie des 5^e, 6^e et 7^e arrondissements, et qui est considérée comme imperdable pour la droite. 

Michel Barnier, soutenu par le président du parti Bruno Retailleau, se défend de toute ambition municipale. Mais dès l'annonce de sa candidature, il a reçu le soutien de plusieurs sénateurs et maires LR de Paris, une démarche que l'entourage de Rachida Dati interprète comme un « plan B », au cas où sa course à l'hôtel de ville serait « empêchée » après sa mise en examen dans une affaire de corruption avec l'ex-patron de Renault, Carlos Ghosn.

Pressée par des militants de clarifier ses intentions pour les législatives, la maire du 7^e arrondissement a entretenu l'ambiguïté, martelant qu'elle n'avait pour seule boussole que de gagner Paris.

« Est-ce que je laisse la circonscription à des gens qui veulent l'instrumentaliser pour perdre Paris ? Est-ce que vous ne méritez pas mieux ? », a-t-elle demandé aux militants, sans plus de précisions.

« Ceux qui jouent petits bras, petits joueurs, perdront tout », a-t-elle taclé, s'en prenant aux élus parisiens de droite soutenant Michel Barnier.

« On peut sortir par le haut de cette histoire. Michel Barnier devrait très clairement dire qu'il soutient Rachida Dati comme candidate à la mairie et qu'il ne sera en aucun cas candidat au conseil de Paris en mars 2026 », a déclaré à l'AFP Jean-Pierre Lecoq, maire LR du 6^e arrondissement et proche de la ministre de la Culture.

La législative partielle doit se tenir à la rentrée, au plus tard à la mi-octobre.