Subventions ou taxes? Les économistes cherchent la formule magique pour financer la décarbonation

Cette photographie montre les cuves de méthanisation de l'unité de méthanisation TotalEnergies BioBearn à Mourenx, dans le sud-ouest de la France, le 16 février 2023. Les géants du transport maritime CMA CGM et de l'énergie TotalEnergies ont par exemple réalisé des bénéfices record en 2022 (plus de 20 milliards d'euros), de quoi leur donner une aisance financière suffisante pour investir dans la décarbonation. (AFP).
Cette photographie montre les cuves de méthanisation de l'unité de méthanisation TotalEnergies BioBearn à Mourenx, dans le sud-ouest de la France, le 16 février 2023. Les géants du transport maritime CMA CGM et de l'énergie TotalEnergies ont par exemple réalisé des bénéfices record en 2022 (plus de 20 milliards d'euros), de quoi leur donner une aisance financière suffisante pour investir dans la décarbonation. (AFP).
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Publié le Mardi 11 avril 2023

Subventions ou taxes? Les économistes cherchent la formule magique pour financer la décarbonation

  • Le secteur manufacturier (environ 25% des émissions européennes de gaz à effet de serre) a besoin à lui seul de 210 milliards d'euros pour atteindre l'objectif européen de neutralité carbone en 2050
  • «Quand on donne des subventions aux énergies vertes, c’est très bien pour leur développement mais ça n’affecte pas l'économie 'brune'», avertit cependant le sous-gouverneure de la Banque de France.

PARIS : Comment inciter les entreprises à fabriquer des produits plus verts? Face à la facture exorbitante de la décarbonation, les économistes sont partagés sur la meilleure manière d'encourager et susciter les investissements nécessaires.

"Il ne faut pas se raconter d’histoires: si on veut décarboner, ça va coûter de l’argent", expose Lionel Fontagné, conseiller scientifique au Cepii (Centre d'études prospectives et d'informations internationales) invité à s'exprimer vendredi à Paris lors du Printemps de l'économie, série de conférences-débats sous patronage du Conseil économique social et environnemental (CESE).

Selon une récente étude de l'assureur crédit Allianz Trade, le secteur manufacturier (environ 25% des émissions européennes de gaz à effet de serre) a besoin à lui seul de 210 milliards d'euros pour atteindre l'objectif européen de neutralité carbone en 2050.

"L’industrie du papier aura besoin des plus gros investissements (78,4 milliards), suivie par la métallurgie (55,4 milliards) et le ciment (37,6 milliards)", détaille Allianz Trade.

Quelles que soient les incitations à la décarbonation, plus les entreprises agissent vite, moins cela coûtera cher, insistent les économistes de la Banque de France.

Une conclusion similaire à celle, plus générale, du Giec sur le réchauffement climatique. "Les bénéfices économiques et sociaux d'une limitation du réchauffement climatique à 2°C dépassent le coût des mesures à mettre en place", insistaient ainsi fin mars ces experts de l'ONU.

Les Etats-Unis n'ont pas hésité à ouvrir largement le carnet de chèques avec l'Inflation Reduction Act. Déployé depuis 2022, ce paquet de mesures prévoit des subventions généreuses pour les industries engagées dans la décarbonation.

"Quand on donne des subventions aux énergies vertes, c’est très bien pour leur développement mais ça n’affecte pas l'économie 'brune'", avertit cependant Agnès Bénassy-Quéré, sous-gouverneure de la Banque de France.

En d'autres termes, financer le développement des énergies renouvelables n'a pas nécessairement d'impact sur la consommation d'énergies fossiles, plus polluantes mais parfois privilégiées par les consommateurs pour leur moindre coût.

«Pas de consensus»

Et "si tous les pays du monde adoptent la stratégie américaine d'investissement public et de subventions à l’investissement privé, on risque d’avoir une hausse des taux d’intérêt au niveau mondial", met en garde Mme Bénassy-Quéré, ce qui renchérira in fine les investissements dans la décarbonation.

La sous-gouverneure de la Banque de France défend donc plutôt la stratégie européenne, basée sur une forme de "taxe carbone" sur les importations de produits polluants.

Mais comme tout mécanisme fiscal, ce système est accusé par certains de nuire à la compétitivité européenne, en renchérissant les coûts pour les entreprises du Vieux Continent qui dépendent de composants importés pour produire.

L’impact des politiques de décarbonation est très différent "selon que les autres pays du monde ne font rien ou ont au contraire des politiques ambitieuses" de transition écologique, relève Mame Fatou Diagne, économiste à l'OCDE.

Frein supplémentaire à la décarbonation, "il n'y a pas de consensus sur une méthode miracle pour arriver au résultat", constate Lionel Fontagné.

Les spécialistes semblent tout de même s'accorder sur le rôle déterminant de l'investissement privé.

Dans une étude publiée récemment, des économistes de la Banque de France ont ainsi imaginé quatre scénarios possibles de décarbonation et mesuré leur impact respectif sur l'inflation et la croissance dans l'Hexagone.

Au bout de cinq ans, le scénario de "forte hausse de l'investissement privé" produit les effets les plus favorables: l'inflation est inférieure de près d'un point à celle qui aurait été constatée en l'absence d'investissements privés, et la croissance supérieure de près d'un point de PIB, selon l'étude.

Pour provoquer cette masse d'investissements privés, il n'est d'ailleurs pas forcément nécessaire de déverser subventions et crédits d'impôts sur l'ensemble des entreprises. Parmi les industries les plus émettrices de gaz à effet de serre, "certaines ont actuellement des marges suffisantes et une capacité d’innovation qui leur permet de réinvestir" en faveur de la décarbonation, assure Mame Fatou Diagne.

Les géants du transport maritime CMA CGM et de l'énergie TotalEnergies ont par exemple réalisé des bénéfices record en 2022 (plus de 20 milliards d'euros), de quoi leur donner une aisance financière suffisante pour investir dans la décarbonation.


Veolia, champion du dessalement durable, devrait doubler sa capacité opérée d'ici à 2030

Avec plus de 50 ans d'efforts continus, Veolia apparaît comme le champion du dessalement durable, à l'origine de percées et d'innovations majeures sur le marché du dessalement. (Photo: Veolia Oman - Arab News en français)
Avec plus de 50 ans d'efforts continus, Veolia apparaît comme le champion du dessalement durable, à l'origine de percées et d'innovations majeures sur le marché du dessalement. (Photo: Veolia Oman - Arab News en français)
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  • Avec 18% de la capacité de dessalement installée dans le monde construite avec ses technologies, Veolia est un acteur de premier plan sur le marché
  • Veolia a été à l'origine d'innovations majeures sur le marché du dessalement, permettant des gains d'efficacité de 80% depuis 1980 et une réduction de 90% du prix de l'eau en m3 depuis 1970

MUSCAT: Grâce aux progrès considérables réalisés en termes d'efficacité et d'empreinte au cours des 25 dernières années, le dessalement est devenu indispensable pour faire face à la pénurie d'eau.  Il est devenu moins cher, plus efficace et de plus en plus évolutif pour répondre à la demande mondiale croissante, en termes de taille, de volume et d'efficacité.

Le marché du dessalement devrait accélérer sa croissance au cours des cinq prochaines années, principalement sous l'impulsion du Moyen-Orient, de l'Asie du Pacifique et de certains pays d'Europe, la capacité prévue pour le prix représentant environ 40 000 MLD.

Déjà leader dans le secteur du dessalement, avec 18% de la capacité de dessalement installée dans le monde construite grâce à ses technologies, Veolia devrait consolider sa part de marché tout en doublant sa capacité exploitée de 1,4 Bm3 à 2,8 Bm3 d'ici 2030.

Les gains récents dans le monde entier témoignent des fortes ambitions de Veolia sur le marché du dessalement, comme en témoignent les usines de dessalement Mirfa 2 et Hassyan aux Émirats arabes unis (2023 et 2024), l'usine de dessalement Cornwall au Royaume-Uni (2023) et les discussions exclusives pour l'usine de dessalement de Rabat au Maroc (2024).


La France dans la ligne de mire de Moody's vendredi

En décembre, François Bayrou à peine nommé Premier ministre, l'agence Moody's avait rétrogradé la note souveraine de la France au vu de la "fragmentation politique" du pays, peu propice selon elle au rétablissement rapide des finances publiques.  La note avait été abaissée de Aa2 à Aa3 (l'équivalent d'un 17/20) avec une perspective stable, qui suggère qu'une nouvelle révision n'est pas envisagée à plus ou moins brève échéance. (AFP)
En décembre, François Bayrou à peine nommé Premier ministre, l'agence Moody's avait rétrogradé la note souveraine de la France au vu de la "fragmentation politique" du pays, peu propice selon elle au rétablissement rapide des finances publiques. La note avait été abaissée de Aa2 à Aa3 (l'équivalent d'un 17/20) avec une perspective stable, qui suggère qu'une nouvelle révision n'est pas envisagée à plus ou moins brève échéance. (AFP)
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  • La note avait été abaissée de Aa2 à Aa3 (l'équivalent d'un 17/20) avec une perspective stable, qui suggère qu'une nouvelle révision n'est pas envisagée à plus ou moins brève échéance
  • "Le scénario le plus probable, c'est que la note soit confirmée. C'est un peu plus incertain pour la perspective", indique Norbert Gaillard, économiste et consultant indépendant

PARIS: Quatre mois après avoir revu sa note à la baisse, l'agence de notation Moody's dévoile vendredi sa nouvelle évaluation de la dette française, au moment où les droits de douane américains déstabilisent l'économie mondiale et mettent Paris au défi de respecter sa trajectoire budgétaire.

En décembre, François Bayrou à peine nommé Premier ministre, l'agence Moody's avait rétrogradé la note souveraine de la France au vu de la "fragmentation politique" du pays, peu propice selon elle au rétablissement rapide des finances publiques.

La note avait été abaissée de Aa2 à Aa3 (l'équivalent d'un 17/20) avec une perspective stable, qui suggère qu'une nouvelle révision n'est pas envisagée à plus ou moins brève échéance.

"Le scénario le plus probable, c'est que la note soit confirmée. C'est un peu plus incertain pour la perspective", indique Norbert Gaillard, économiste et consultant indépendant.

Deux rétrogradations pour "un pays aussi bien noté en l'espace de quatre mois, ce n'est pas du tout courant. C'est ce qui est arrivé aux pays d'Europe du Sud pendant la crise de la dette en 2010-2012", ajoute-t-il auprès de l'AFP.

Depuis le revers de décembre, la France s'est dotée d'un budget pour 2025 prévoyant une cinquantaine de milliards d'euros d'effort budgétaire et la menace d'une censure du gouvernement s'est momentanément éloignée.

"Vrai problème" 

Le grand facteur d'incertitude réside désormais dans l'impact qu'auront les droits de douane massifs décidés par le président américain Donald Trump sur l'économie mondiale, et donc française.

Cette offensive protectionniste a fait dégringoler les marchés financiers et attisé les craintes d'un fort ralentissement économique.

"Le risque politique est réduit aujourd'hui. On est surtout sur un risque économique et commercial", relève Norbert Gaillard.

Avant même la tempête douanière déclenchée le 2 avril, les incertitudes internationales ont conduit la Banque de France à réduire de 0,2 point à 0,7% sa prévision de croissance pour 2025. Le gouvernement se prépare à suivre le mouvement, possiblement le 15 avril lors d'une conférence sur les finances publiques.

Le Premier ministre François Bayrou a alerté dans Le Parisien: les droits de douane pourraient coûter "plus de 0,5% du PIB" à la France et "le risque de pertes d'emplois est absolument majeur, comme celui d'un ralentissement économique, d'un arrêt des investissements".

A ces perspectives d'activité assombries s'ajoutent la volonté affichée par le gouvernement d'augmenter les dépenses militaires et une remontée des taux d'intérêt pour les emprunts français à 10 ans, alourdissant le coût déjà colossal de la dette (58 milliards d'euros en 2024, selon l'Insee).

En conséquence, selon l'expert, tenir l'objectif de déficit public constituera "un vrai problème".

"Importance systémique" 

Le gouvernement entend réduire le déficit public à 5,4% en 2025, après 5,8% l'an dernier, avec l'ambition de passer sous le maximum européen de 3% du produit intérieur brut (PIB) en 2029.

Un objectif encore récemment réaffirmé, même si le ministre de l'Economie Eric Lombard a suggéré vendredi qu'une escalade dans la guerre commerciale avec les Américains pourrait le compromettre. Il a exclu tout coup de rabot supplémentaire dans les dépenses et de nouvelles hausses d'impôts.

Et François Bayrou a prévenu, à propos du retour aux 3%, que "la crise pouvait tout changer".

"Avec une croissance plus faible que prévu", le gouvernement "a très peu de marges de manœuvre", constate Norbert Gaillard.

"On liste les mesures, mais on sait qu'elles sont impopulaires, qu'elles peuvent déclencher le vote d'une motion de censure, des manifestations, des mouvements de grève", développe-t-il, citant les pistes d'un effort éventuel demandé aux retraités ou d'une hausse de la TVA avancée par le patronat.

Dans son évaluation en décembre, Moody's souligne que la France a régulièrement manqué ses objectifs concernant la réduction de son endettement.

Toutefois, au-delà de la fragilité de ses finances publiques, le pays a des atouts "dans un monde plus nationaliste et plus protectionniste", estime Norbert Gaillard — outre une économie diversifiée et des institutions solides.

Seule puissance nucléaire de l'UE, elle est "incontournable au niveau européen", avec "une importance systémique, financière, économique et stratégique".

 


Droits de douane: l'industrie française veut faire front face à un «choc historique»

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  • Face à ce que certains acteurs ont qualifié de "choc historique", la rencontre devait permettre d'identifier les "impacts directs et indirects" de ces nouvelles taxes douanières, notamment sur les "sous-traitants et l'emploi", indique Bercy
  • L'un des principaux enseignements est qu'il n'y a "pas d'objection à une approche ferme et une réponse rapide de l'Union européenne", a poursuivi la même source, rapportant toutefois des "sensibilités" et des "inquiétudes" différentes selon les filières

PARIS: Les industriels français se sont réunis mardi à Bercy autour du ministre Marc Ferracci pour faire part de leurs inquiétudes face à un "choc historique" et tenter d'élaborer une position française commune dans la riposte européenne face à la crise commerciale mondiale déclenchée par la hausse des droits de douane américains.

Le Conseil national de l'Industrie réunissait mardi des représentants de tous les secteurs industriels, notamment de l'énergie, des matériaux (bois, chimie, matériaux, eau, mines, métallurgie, valorisation des déchets), des transports (industrie aéronautique et spatiale, automobile, ferroviaire, industries de la mer), des biens de consommation et de la santé (agroalimentaire, mode et luxe, industries de santé).

Face à ce que certains acteurs ont qualifié de "choc historique", la rencontre devait permettre d'identifier les "impacts directs et indirects" de ces nouvelles taxes douanières, notamment sur les "sous-traitants et l'emploi", indique Bercy.

L'un des principaux enseignements est qu'il n'y a "pas d'objection à une approche ferme et une réponse rapide de l'Union européenne", a poursuivi la même source, rapportant toutefois des "sensibilités" et des "inquiétudes" différentes selon les filières, notamment sur les conséquences d'une escalade.

L'Union européenne a proposé de répliquer aux taxes américaines sur les importations d'acier par des droits de douane de 25% sur des marchandises américaines, mais épargnera le bourbon, pour éviter des représailles aux vins et spiritueux européens, selon une liste consultée par l'AFP.

L'UE pourrait présenter sa réponse aux droits de douane de 20% "en début de semaine prochaine", selon un porte-parole de la Commission.

"Reports de marchés" 

Alors que les Etats-Unis ont acté mardi une taxation des produits chinois de 104% au total, plusieurs filières ont manifesté leurs inquiétudes concernant d'éventuels "reports de marché" asiatiques vers l'Europe, une crainte notamment soulevée par le secteur automobile.

Sur ce point, pour la filière acier, "ce qu'on peut faire est encore significatif", a estimé Bercy, qui soutient l'idée d'un renforcement de la clause de sauvegarde.

Cette clause de sauvegarde est une mesure de protection utilisée par l'Union européenne pour limiter les importations. L'UE y a recours depuis 2018 pour protéger ses producteurs d'acier.

"On va demander une nouvelle évolution de ces mesures de sauvegarde au 1er juillet de manière à se montrer encore plus restrictifs", ajoute Bercy, des mesures qui pourraient aussi s'appliquer à d'autres secteurs.

En France, le président Emmanuel Macron avait appelé la semaine dernière les industriels français à suspendre leurs investissements aux Etats-Unis, dans le cadre d'une riposte européenne qu'il souhaite "proportionnée" afin de laisser sa chance à la négociation avec les Américains.

Mardi, la Bourse de New York a terminé en net recul, manquant le rebond tenté en début de journée, les investisseurs se montrant à cran face aux droits de douane, tandis que les valeurs automobiles ont plongé à la suite de cette offensive protectionniste américaine sans équivalent depuis les années 30.