Au Bangladesh, les réfugiés climatiques fuient leurs villages emportés par les eaux

Le Bangladesh a connu cette année ses pires inondations en près de vingt ans (Photo, AFP).
Le Bangladesh a connu cette année ses pires inondations en près de vingt ans (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 10 octobre 2022

Au Bangladesh, les réfugiés climatiques fuient leurs villages emportés par les eaux

  • Le Bangladesh est un pays de deltas sillonné par plus de 200 cours d'eau, chacun relié au Gange et au Brahmapoutre, qui partent de l'Himalaya et traversent l'Asie du Sud
  • Les inondations périodiques qui submergent les maisons, les marchés et les écoles ont toujours fait partie de la vie des dizaines de millions d'agriculteurs et de pêcheurs

BANGLA BAZAR: La famille de Paban Baroi, au Bangladesh, était depuis plusieurs générations gardienne d'un temple dédié à Shiva, le dieu hindou associé à la destruction. Mais un jour ,la rivière a démoli le sanctuaire et 200 maisons du village, dont la leur.

Le septuagénaire et ses voisins font partie des milliers d'habitants du pays réduits à vivre dans la misère en raison de la montée des eaux et de l'érosion des terres, phénomènes aggravés par le changement climatique.

Un jour de septembre, la rivière Padma a brusquement changé de direction et une grande partie du village a disparu, emportée par les flots.

"Le courant était si puissant", se souvient Padan Baroi. "Beaucoup d'entre nous ont vécu sans toit ces derniers jours".

La famille de Baroi était la gardienne héréditaire du temple de Bangla Bazar, qui accueillait chaque année un festival dans la banlieue de la capitale Dacca.

Les festivités de l'année prochaine pourraient être annulées pour la première fois en plus d'un siècle, car d'ici là, de nombreux fidèles auront été contraints de déménager.

"C'était une communauté prospère de charpentiers, de pêcheurs, d'agriculteurs et de commerçants", explique à l'AFP Sohrab Hossain Pir, conseiller municipal du village.

Cyclones et crues 

Le Bangladesh est un pays de deltas sillonné par plus de 200 cours d'eau, chacun relié au Gange et au Brahmapoutre, qui partent de l'Himalaya et traversent l'Asie du Sud.

Les inondations périodiques qui submergent les maisons, les marchés et les écoles ont toujours fait partie de la vie des dizaines de millions d'agriculteurs et de pêcheurs qui peuplent les rives des fleuves - certaines des zones les plus densément peuplées de la campagne bangladaise.

Mais le changement climatique accroît la gravité et la fréquence du phénomène, provoquant des précipitations plus irrégulières qui entraînent davantage de cyclones et de crues soudaines.

Le Bangladesh a connu cette année ses pires inondations en près de vingt ans, qui ont fait plus de 100 morts dans le nord du pays et isolé sept millions d'autres en coupant les principaux axes de circulation.

La montée du niveau des mers due au dérèglement climatique menace de forcer des dizaines de millions d'autres personnes à fuir leur logement le long du littoral bangladais de faible altitude, et d'inonder d'eau salée ses terres agricoles les plus fertiles.

Le Bangladesh est déjà considéré par les Nations unies et les groupes de la société civile comme l'un des pays les plus touchés par les phénomènes climatiques extrêmes depuis le début du siècle, avec des villages entiers rayés de la carte à l'intérieur des terres.

Le Centre pour les services d'information sur l'environnement et la géographie (CEGIS), un organe public estime qu'environ 1.800 hectares de terres seront érodés par les rivières au Bangladesh cette année et que les maisons d'au moins 10 000 personnes disparaîtront.

"Ces phénomènes d'érosion sont clairement le résultat du changement climatique", soulignait Ian Fry, rapporteur spécial des Nations unies sur le changement climatique, lors d'une visite sur place en septembre.

Les habitants des villages disparus partent souvent s'installer dans les bidonvilles qui parsèment Dacca, une ville de 22 millions d'habitants dont la taille a plus que doublé en vingt ans, en raison principalement de l'exode rural.

Englouti par les eaux, un Etat est-il voué à être rayé de la carte?

Si la mer engloutit les Maldives ou les Tuvalu, efface-t-elle le pays de la carte et ses citoyens avec? Cette perte inconcevable infligée par le changement climatique représente un écueil inédit pour la communauté internationale et les peuples menacés de perdre jusqu'à leur identité.

"C'est la plus grande tragédie qu'un peuple, qu'un pays, qu'une nation puisse affronter", lance à l'AFP l'ancien président des Maldives Mohamed Nasheed.

Selon les experts climat de l'ONU (Giec), le niveau de la mer a déjà gagné 15 à 25 cm depuis 1900 et la hausse s'accélère, avec un rythme encore plus rapide dans certaines zones tropicales.

Ainsi, si la hausse des émissions se poursuivait, les océans pourraient gagner près d'un mètre supplémentaire autour des îles du Pacifique et de l'océan Indien d'ici la fin du siècle.

Cela reste certes en-dessous du point culminant des petits Etats insulaires les plus plats mais la montée des eaux va s'accompagner d'une multiplication des tempêtes et des vagues-submersions: l'eau et la terre seront contaminées par le sel, rendant nombre d'atolls inhabitables bien avant d'être recouverts par la mer.

Selon une étude citée par le Giec, cinq Etats (les Maldives, les Tuvalu, les Iles Marshall, Nauru et Kiribati) risquent ainsi de devenir inhabitables d'ici 2100, créant 600 000 réfugiés climatiques apatrides.

Responsabilité 

Lors de la COP27 qui doit se dérouler en novembre en Egypte, un plan national destiné à aider à la gestion des catastrophes naturelles et des conditions météorologiques extrêmes de plus en plus nombreuses en raison du changement climatique doit être présenté.

Il prévoit notamment de limiter l'érosion des rivières à environ 1 000 hectares par an.

Selon les estimations, 230 milliards de dollars sont nécessaires d'ici à 2050 pour atténuer l'impact du changement climatique sur le pays.

"Il est clair pour moi que le Bangladesh ne doit pas supporter seul le fardeau du changement climatique", souligne M. Fry, ajoutant que les nations plus riches, dont les niveaux d'émissions historiques sont plus élevés, devraient contribuer à payer la facture.

"Pendant trop longtemps, les pays ont nié leur responsabilité pour les souffrances qu'ils ont causées", lance-t-il. "Ils devraient payer pour cela".

A Bangla Bazar, une semaine après avoir perdu leur maison, la famille Baroi n'a toujours pas trouvé d'abri. Certains de leurs voisins se sont réfugiés dans des étables.

Ceux qui ont encore un toit sur la tête s'inquiètent de savoir où ils pourront se replier lorsque le Padma engloutira davantage de terres.

"Je ne veux pas partir", affirme M. Baroi. "Mais si la rivière dévore tout le village, que se passera-t-il ? Où irons-nous?"


Accord entre l'UE et le Mercosur: l'effet Trump fait monter la pression sur la France

Le militant agricole français Jérôme Bayle (C-R) marche vers les gendarmes français devant des véhicules arrêtés lors d'une manifestation contre l'accord de libre-échange Mercosur de l'Union européenne, à la frontière entre la France et l'Espagne, près de Fos, le 10 février 2025. (AFP)
Le militant agricole français Jérôme Bayle (C-R) marche vers les gendarmes français devant des véhicules arrêtés lors d'une manifestation contre l'accord de libre-échange Mercosur de l'Union européenne, à la frontière entre la France et l'Espagne, près de Fos, le 10 février 2025. (AFP)
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  • Les tensions commerciales avec les Etats-Unis offrent un nouvel argument aux Etats européens favorables au traité de libre-échange avec l'Amérique latine
  • Le Mercosur est "un sujet de flottement entre la France et l'Allemagne", reconnaît aussi la ministre française de l'Agriculture Annie Genevard

BRUXELLES: Et si l'accord avec le Mercosur était adopté par l'UE grâce à Donald Trump?

Les tensions commerciales avec les Etats-Unis offrent un nouvel argument aux Etats européens favorables au traité de libre-échange avec l'Amérique latine, et la pression monte sur la France.

Le futur chancelier allemand Friedrich Merz s'est engouffré dans la brèche. "L'équilibre du monde se déplace et nous les Européens avons besoin très rapidement" de nouveaux partenaires commerciaux, a-t-il insisté sur la chaîne ARD.

Avant de lancer une pierre dans le jardin de l'Elysée: Emmanuel Macron aurait "maintenant tendance" à regarder plus favorablement l'accord avec les pays latino-américains du Mercosur, s'est avancé Merz.

A Paris, qui redoute une nouvelle fronde agricole, on dément tout changement de pied. "Le projet d'accord n'a pas changé et n'est donc pas acceptable en l'état", assure une source diplomatique.

Le Mercosur est "un sujet de flottement entre la France et l'Allemagne", reconnaît aussi la ministre française de l'Agriculture Annie Genevard. Mais hors de question de "sacrifier l'agriculture française sur l'autel d'un accord à tout prix", lance-t-elle, en mettant en avant des risques pour des filières comme la volaille, le boeuf ou le sucre.

L'avenir de ce traité de libre-échange pourrait être au coeur des tractations entre Paris et Berlin, qui veulent profiter de l'arrivée de Merz pour relancer le couple franco-allemand.

Et à la Commission européenne comme au Parlement, nombreux soulignent que le changement de la donne commerciale avec les Etats-Unis pèse dans la balance.

En Autriche par exemple, le ministre de l'Economie Wolfgang Hattmannsdorfer est désormais ouvertement favorable à l'accord, même si son pays reste officiellement opposé au traité.

A Paris, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, soutient ce rapprochement UE/Mercosur pour "amortir les chocs" liés à la politique commerciale de Donald Trump.

De son côté, la Commission européenne milite sans cesse pour une diversification tous azimuts des débouchés commerciaux, tant les incertitudes sont nombreuses avec les Etats-Unis.

"Dans un monde instable", l'intérêt du traité avec le Mercosur est "très clair", a répété l'exécutif européen le 10 avril.

- "Avant la fin de l'été" -

Cet accord de libre-échange avec l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay et le Paraguay devrait notamment permettre à l'Union européenne d'exporter plus facilement ses voitures, machines, produits pharmaceutiques ou spiritueux.

En retour, il faciliterait les exportations sud-américaines de viande, sucre, riz, miel ou soja, ce qui alarme les filières concernées en Europe.

La Commission compte rassurer "tous les Etats membres" et veut présenter un texte au Parlement "avant la fin de l'été", a affirmé un de ses porte-paroles Olof Gill.

Mais les eurodéputés restent divisés. "On ne sait pas de quel côté la pièce va tomber" en cas de vote, reconnaît la centriste française Marie-Pierre Vedrenne (Renew).

Cette élue, qui a toujours été plutôt ouverte au Mercosur, trouve "à titre personnel, qu'on ne peut plus rester dans une logique d'opposition primaire. Vu l'état du monde, ce ne serait pas très sérieux et responsable", argue-t-elle.

Sauf que la ligne du président Macron "n'a pas changé", convient la parlementaire. "Ca s'est beaucoup cristallisé en France". L'opposition au Mercosur est "devenue un sujet d'union nationale".

Aux yeux d'un fonctionnaire européen, en France, sur le Mercosur "rationnellement ça devrait bouger" mais "politiquement ça ne peut pas bouger" car "le gouvernement tomberait" s'il soutient cet accord contesté par des élus de tous bords, estime-t-il.

Pour être approuvé, le traité doit d'abord recevoir l'aval de quinze Etats membres représentant au moins 65% de la population européenne.

Au sein des 27, la France espérait jusqu'ici réunir une minorité de blocage --au moins quatre Etats représentant plus de 35% de la population de l'UE-- contre le traité Mercosur. Mais "vu le contexte, elle ne l'aura probablement pas", pronostique déjà une source à la Commission.

S'il est validé, l'accord serait soumis au Parlement européen, où son adoption demeure incertaine.

Côté calendrier, dans les chancelleries comme chez les eurodéputés, on considère que rien ne se passera tant que la Pologne, hostile au Mercosur, occupe la présidente tournante du Conseil de l'UE.

Mais les Polonais passent le témoin début juillet au Danemark, qui pourrait mettre ce dossier inflammable à l'ordre du jour.


Rubio jeudi à Paris pour des discussions sur l'Ukraine

Le secrétaire d'État américain Marco Rubio participe à un entretien après une réunion avec des responsables russes, au palais de Diriyah, à Riyad, en Arabie saoudite, le 18 février 2025. (AFP)
Le secrétaire d'État américain Marco Rubio participe à un entretien après une réunion avec des responsables russes, au palais de Diriyah, à Riyad, en Arabie saoudite, le 18 février 2025. (AFP)
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  • Le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio va se rendre à Paris mercredi pour des discussions sur le conflit en Ukraine
  • Le secrétaire d'Etat aura des entretiens jeudi avec son homologue français Jean-Noël Barrot au cours desquels "ils aborderont ensemble plusieurs crises internationales: guerre en Ukraine, situation au Proche-Orient, dossier nucléaire iranien"

WASHINGTON: Le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio va se rendre à Paris mercredi pour des discussions sur le conflit en Ukraine notamment, a annoncé le département d'Etat, au moment où les relations entre les Etats-Unis et l'Europe sont tendues.

M. Rubio sera accompagné de l'émissaire spécial pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, pour des "discussions avec leurs homologues européens afin d'avancer l'objectif du président Trump de mettre fin à la guerre entre l'Ukraine et la Russie et d'arrêter la tuerie", selon un communiqué.

Le secrétaire d'Etat aura des entretiens jeudi avec son homologue français Jean-Noël Barrot au cours desquels "ils aborderont ensemble plusieurs crises internationales: guerre en Ukraine, situation au Proche-Orient, dossier nucléaire iranien", selon une source diplomatique.

Traditionnellement, les secrétaires d'Etat américains sont reçus à l'Elysée mais aucune rencontre avec le président Emmanuel Macron n'a été annoncée pour le moment.

Il s'agira du troisième déplacement en Europe de M. Rubio depuis sa prise de fonctions après sa participation à la conférence sur la sécurité à Munich mi-février et une réunion de l'Otan à Bruxelles en mars.

Tandis que M. Rubio sera à Paris, le ministre français des Armées Sébastien Lecornu sera lui à Washington jeudi où il s'entretiendra avec le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth.

Outre l'épineux dossier des droits de douane, qui avive les tensions entre Washington et les capitales européennes, l'administration Trump ne cesse d'augmenter sa pression sur les Européens accusés d'abuser des Etats-Unis notamment dans le cadre de l'Otan.

Les négociations à l'initiative de Donald Trump en vue d'un cessez-le-feu général entre Kiev et Moscou n'ont pour l'instant pas abouti, l'attaque russe dimanche contre Soumy, dans le nord-est de l'Ukraine, ayant causé la mort d'au moins 35 civils, venant rappeler selon Washington et Paris l'urgence à trouver une issue au conflit.

L'émissaire du président américain avait affirmé lundi, trois jours après une nouvelle rencontre avec le chef de l'Etat russe Vladimir Poutine, que les pourparlers étaient "sur le point" de permettre des avancées.

La France et le Royaume-Uni sont tout particulièrement engagés dans les discussions en vue d'apporter des garanties de sécurité pour l'Ukraine en cas de cessez-le-feu.

Les entretiens à Paris interviennent, par ailleurs, au moment où de rares discussions entre Téhéran et Washington sur le programme nucléaire de l'Iran ont eu lieu samedi dernier dans le sultanat d'Oman, et qu'un nouveau round est prévu le 19 avril à Rome, toujours sous la médiation d'Oman.

Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, soupçonnent de longue date l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Téhéran rejette ces allégations et défend un droit au nucléaire à des fins civiles, notamment pour l'énergie.


Alzheimer : la vente d'un traitement pour certains patients est autorisée par Bruxelles

Vue générale prise le 04 novembre 2010 au Mans, de l'atrium, équipé d'un bar, d'une boutique de coiffeuse-esthéticienne et d'une volière, de "La Souvenance", maison d'accueil de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.
Vue générale prise le 04 novembre 2010 au Mans, de l'atrium, équipé d'un bar, d'une boutique de coiffeuse-esthéticienne et d'une volière, de "La Souvenance", maison d'accueil de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.
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  • L'autorisation de ce traitement, commercialisé sous le nom de Leqembi, a été accordée mardi, sur la base d'une analyse scientifique de l'EMA
  • Le Leqembi, mis au point par les laboratoires pharmaceutique japonais Eisai et américain Biogen, a été autorisé en janvier 2023 aux États-Unis.

BRUXELLES : La Commission européenne a annoncé mercredi qu'elle avait formellement autorisé un traitement destiné à réduire le déclin cognitif chez certaines personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer, après le feu vert de l'Agence européenne des médicaments.

L'autorisation de ce traitement, commercialisé sous le nom de Leqembi, a été accordée mardi, sur la base d'une analyse scientifique de l'EMA « qui a conclu que les bénéfices de ce médicament étaient supérieurs aux risques », a souligné la Commission dans un communiqué.

Fin 2024, le régulateur européen avait recommandé d'accorder une autorisation de mise sur le marché du Leqembi (lécanemab) pour « le traitement des troubles cognitifs légers (troubles de la mémoire et de la pensée) ou de la démence légère dus à la maladie d'Alzheimer (maladie d'Alzheimer au stade précoce) ».

Elle avait précisé que ce feu vert était valable uniquement pour les patients présentant un risque plus faible d'hémorragie cérébrale potentielle, c'est-à-dire ceux qui n'ont « qu'une ou aucune copie du gène ApoE4 », un type de gène connu pour être un facteur de risque important pour la maladie d'Alzheimer.

Le Leqembi, mis au point par les laboratoires pharmaceutique japonais Eisai et américain Biogen, a été autorisé en janvier 2023 aux États-Unis pour les patients n'ayant pas atteint un stade avancé de la maladie. Il est également commercialisé au Japon et en Chine.

Malgré des décennies de recherche, les scientifiques n'ont pas encore réussi à faire une véritable percée dans la lutte contre la maladie d'Alzheimer, qui touche des dizaines de millions de personnes dans le monde.