Julien Dray: sur la laïcité, «Jean-Luc Mélenchon a changé d'avis»

Une jeune femme porte une Abaya (C) alors qu'elle traverse une rue à Nantes, dans l'ouest de la France, le 31 août 2023. (AFP)
Une jeune femme porte une Abaya (C) alors qu'elle traverse une rue à Nantes, dans l'ouest de la France, le 31 août 2023. (AFP)
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Publié le Dimanche 03 septembre 2023

Julien Dray: sur la laïcité, «Jean-Luc Mélenchon a changé d'avis»

  • «La question laïque est au cœur de la pensée socialiste», a déclaré M. Dray au Forum Radio J
  • «On a le droit de changer» mais «dans ces cas-là, il faut le dire et il faut nous expliquer pourquoi», a insisté Julien Dray

PARIS: Jean-Luc Mélenchon "a changé d'avis" sur les questions de laïcité, a regretté dimanche l'ancien dirigeant socialiste Julien Dray, qui dénonce une "instrumentalisation" opérée par La France insoumise dans sa dénonciation de l'interdiction de l'abaya à l'école.

En approuvant cette décision du gouvernement, "le Parti socialiste retrouve ses bases". "La question laïque est au cœur de la pensée socialiste", a déclaré M. Dray au Forum Radio J.

Parmi les opposants à cette mesure, il y a selon lui "ceux qui s'égarent, pour une part par générosité (...) notamment dans la jeunesse". Mais "ce qui est désolant, c'est l'instrumentalisation politique qui est faite", a poursuivi M. Dray.

"Je pense notamment que Jean-Luc Mélenchon a changé sur ses positions, que j'ai connues, que j'ai approuvées à l'époque. D'ailleurs, ensemble nous avions mené le combat, nous avions hésité ensemble sur la question du foulard et nous avions milité pour la loi", a développé M. Dray, qui avait fondé avec M. Mélenchon le courant "Gauche socialiste" au sein du PS à la fin des années 1980.

Le leader insoumis "a changé d'avis". "On a le droit de changer" mais "dans ces cas-là, il faut le dire et il faut nous expliquer pourquoi", a insisté Julien Dray.

"Et il sera bien en mal de nous expliquer pourquoi, si ce n'est que désormais, lui aussi rejoint cette vision, ce découpage du monde en disant: il y a un grand Satan, et tous les autres, à partir du moment où ce sont des opprimés, des oppressés, ont droit à notre soutien, peu importe derrière qui ils se sont rangés", a accusé M. Dray.

"J'ai longtemps été réticent au terme d'islamo gauchisme". Mais "il y a effectivement une dérive": "l'accointance entre ce que sont les courants islamistes et une partie de l'extrême-gauche est aujourd'hui constatée", a-t-il jugé.

S'agissant des élections européennes, pour M. Dray, l'insistance de La France insoumise pour une liste commune de la gauche, rejetée notamment par les écologistes et les communistes, s'explique par le fait que M. Mélenchon ne veut pas "voir la matérialisation des rapports de force au sein de la gauche".

"Il veut surtout perpétuer le rapport de force qu'il a établi, il faut être honnête, à la présidentielle, en considérant que désormais, ce rapport de force est éternel. Non, il n'est pas éternel".


Crises internationales et Mercosur au menu de la visite d'Etat de Lula en France

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva s'exprime lors d'une conférence de presse au palais du Planalto à Brasilia, le 3 juin 2025. Le président Lula da Silva s'envole aujourd'hui pour la France pour une visite officielle de trois jours. (AFP)
Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva s'exprime lors d'une conférence de presse au palais du Planalto à Brasilia, le 3 juin 2025. Le président Lula da Silva s'envole aujourd'hui pour la France pour une visite officielle de trois jours. (AFP)
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  • Le président brésilien, puissante voix des pays du "Sud global", entame jeudi une visite d'Etat en France, au cours de laquelle seront abordées les crises internationales ainsi que l'accord de libre-échange entre l'UE et le Mercosur

PARIS: Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, puissante voix des pays du "Sud global", entame jeudi une visite d'Etat en France au cours de laquelle seront abordées les crises internationales ainsi que l'accord de libre-échange entre l'UE et le Mercosur, auquel Paris est fermement opposé.

Il s'agit de la première visite d'Etat en France d'un président brésilien depuis 2012, et elle intervient à quelques mois de la COP organisée par le Brésil en novembre prochain.

Lula sera accueilli avec une cérémonie aux Invalides, avant un déjeuner de travail à l'Elysée avec le président français Emmanuel Macron, suivi d'un dîner d'Etat dans la soirée.

Les deux hommes entretiennent des relations chaleureuses, malgré les différends.

La visite de M. Lula, qui avait lui-même accueilli son homologue français en mars 2024, vise selon le président brésilien à "renforcer" les liens stratégiques entre les deux pays. Une douzaine d'accords de coopération dans les domaines de l'environnement, de la technologie, de la défense, de l'énergie et de la santé devraient être signés.

- Crises internationales -

Dans le contexte mondial mouvementé, marqué notamment par les surtaxes douanières imposées par le président américain Donald Trump à ses partenaires, et par les guerres en Ukraine et au Proche-Orient, "il est d'autant plus important de retrouver des convergences avec le Brésil, un grand Etat émergent" qui assure cette année la présidence tournante du bloc des Brics, a souligné l'Elysée.

La France compte notamment sur la mobilisation du Brésil, qui a reconnu l'Etat palestinien en 2010, pour peser sur l'issue de la conférence organisée par la France et l'Arabie saoudite à l'ONU mi-juin, visant à redonner un élan à une solution politique au conflit israélo-palestinien.

"Il n'y aura pas de paix tant que qu'on n'aura pas conscience que le peuple palestinien a droit à son Etat", a déclaré Lula mardi, quelques heures avant son départ pour Paris.

"C'est justement en raison des souffrances du peuple juif dans son histoire que le gouvernement d'Israël devrait traiter le peuple palestinien avec humanisme et bon sens", a ajouté le président brésilien, qualifiant l'offensive israélienne à Gaza de "génocide", comme il l'avait déjà fait à plusieurs reprises par le passé.

Concernant l'Ukraine, la France "compte présenter au président Lula l'état du dossier", avec "une partie agressée qui est prête à la paix, et une autre partie, l'agresseur, qui refuse toute proposition de paix ou de dialogue".

Le Brésil, qui préside actuellement le groupe des pays émergents des BRICS, continue d'entretenir de bonnes relations avec la Russie et Lula était à Moscou le 9 mai pour les commémorations de la victoire contre l'Allemagne nazie, où il a été reçu par le président russe Vladimir Poutine.

- Mercosur -

L'accord de libre échange entre l'UE et des pays d'Amérique latine sera en toile de fond de la visite de Lula en France.

Cet accord avec l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay et le Paraguay doit permettre à l'UE d'exporter notamment plus de voitures, de machines et de spiritueux, en échange de l'entrée de viandes, sucre, riz, miel ou soja sud-américains.

Paris s'oppose à cet accord "dans sa forme actuelle", contrairement à d'autres pays européens comme l'Allemagne ou l'Espagne.

A la veille du début de la visite du président brésilien, des députés français ont réuni mercredi plusieurs filières agricoles à l'Assemblée pour réaffirmer leur opposition à l'accord.

Jean-François Guihard, président de l'interprofession du bétail et des viandes (Interbev), a notamment appelé Emmanuel Macron à être "extrêmement ferme" face au président brésilien "pour dire que cet accord n'est pas possible".

Mais en pleine guerre commerciale avec les Etats-Unis, "il y a un nouveau contexte international" qui devrait pousser en faveur de l'accord, selon la diplomatie brésilienne.

Après sa visite à Paris, le président brésilien participera le 8 juin à un sommet économique à Monaco, puis sera à Nice le 9 avec le président Macron pour l'ouverture de la conférence de l'ONU sur les océans.


Censure : LFI et François Bayrou s'accusent de manoeuvres au Parlement

Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais présidentiel de l'Élysée après la réunion hebdomadaire de son cabinet, le 4 juin 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou quitte le Palais présidentiel de l'Élysée après la réunion hebdomadaire de son cabinet, le 4 juin 2025. (AFP)
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  • Les députés Insoumis ont défendu mercredi une nouvelle motion de censure contre le gouvernement Bayrou, l'accusant de "bafouer" le résultat des législatives
  • Le Premier ministre leur reprochant en retour de mettre en place "une tactique méthodique, constante, permanente de l'obstruction" au Parlement

PARIS: Les députés Insoumis ont défendu mercredi une nouvelle motion de censure contre le gouvernement Bayrou, l'accusant de "bafouer" le résultat des législatives, le Premier ministre leur reprochant en retour de mettre en place "une tactique méthodique, constante, permanente de l'obstruction" au Parlement.

En l'absence de soutiens suffisants, et des voix PS et du RN, la septième motion de censure contre le gouvernement de François Bayrou n'a aucune chance d'être adoptée en fin d'après-midi, mais elle a offert le terrain pour un match retour sur une proposition de loi agricole clivante.

"Il y a bientôt un an que le résultat des urnes est bafoué par le Président de la République", a lancé depuis la tribune la députée insoumise Mathilde Hignet. Elle a accusé le gouvernement et ses soutiens de faire "alliance une fois de plus avec l'extrême droite sur l'un des textes les plus rétrogrades pour notre environnement".

Le groupe écologiste devrait largement voter la motion de censure, la députée Sophie Taillé-Polian, dénonçant une "loi poison". Dans le viseur : un coup tactique du bloc central, soutenu par l'alliance entre le RN et les ciottistes, concernant la loi agricole dite Duplomb-Menonville.

Le texte, clivant, porte notamment une mesure de réintroduction à titre dérogatoire d'un pesticide néonicotinoïde. Ecologistes et insoumis avaient répondu dans l'hémicycle en déposant une multitude d'amendements (quelque 1.500 écologistes et 800 LFI).

Invoquant une "obstruction", les députés favorables à l'essentiel de la loi ont choisi de  rejeter eux-mêmes le texte de manière préventive, pour sauter l'étape de l'Assemblée, et l'envoyer directement devant une commission mixte réunissant sept députés et sept sénateurs

- Assemblée "bâillonnée" -

"Le gouvernement n'est pas à l'origine de ce texte. Il n'est pas à l'origine de son adoption. Il n'est pas à l'origine de la motion de rejet, mais il est coupable", a ironisé depuis la tribune François Bayrou, estimant que "c'est la première fois que l'Assemblée nationale est invitée à voter contre l'Assemblée nationale".

Plus offensif ensuite il a accusé les Insoumis de se livrer au Parlement à une "tactique méthodique et constante, permanente de l'obstruction, du blocage, c'est à dire, au bout du compte, de l'immobilisme".

Le chef du gouvernement a également défendu la loi Duplomb-Menonville, dont "plusieurs mesures sont vitales pour notre agriculture". Quant au Parlement, il a appelé à en revoir le fonctionnement, et privilégier l'examen de plusieurs textes de loi en même temps, que les députés voteraient ensuite "lors de séance plénière concentrée sur une demi journée par exemple, comme cela se passe au Parlement européen".

François Bayrou ne risque cependant pas de tomber sur cette septième motion de censure.

Pour le PS, Mélanie Thomin a déploré une Assemblée "bâillonnée" par la tactique sur la loi Duplomb. Mais "nous ne voulons pas voter une motion de censure contre le Parlement", a-t-elle confirmé, le PS renvoyant une éventuelle censure aux suites données par le gouvernement au "conclave" sur les retraites

Le RN ne votera pas non plus la motion de censure "politicienne", selon un cadre.

Sans les votes PS et RN, la motion n'a aucune chance d'atteindre les 289 voix nécessaires pour renverser le gouvernement.


Des associations demandent l'interdiction de la participation d'entreprises israéliennes au salon du Bourget

Les participants visitent le Salon international de l'aéronautique et de l'espace au parc des expositions du Bourget, le 21 juin 2023. (Photo de JULIEN DE ROSA / AFP)
Les participants visitent le Salon international de l'aéronautique et de l'espace au parc des expositions du Bourget, le 21 juin 2023. (Photo de JULIEN DE ROSA / AFP)
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  • Un collectif d’associations a demandé mercredi au tribunal de Bobigny d'empêcher le Salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget (SIAE) d'accueillir des entreprises israéliennes.
  • Me Sylvain Pavillet, l'avocat de la SIAE, a plaidé que les associations demandaient à la justice « d'entrer dans un débat politique », alors qu'Israël mène des représailles sanglantes à Gaza.

BOBIGNY, FRANCE : Un collectif d’associations a demandé mercredi au tribunal de Bobigny d'empêcher le Salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget (SIAE) d'accueillir, du 16 au 22 juin, des entreprises israéliennes, estimant que les fournisseurs de matériel de guerre participent à la « commission massive de crimes internationaux ».

Lors d'une audience en référé, les avocats des associations Attac-France, Stop Fuelling War et Survie, de l'ONG palestinienne de défense des droits humains Al-Haq et de l'Union juive française pour la paix ont longuement exposé leur requête principale.

Elles demandent à la justice d'obliger le SIAE à « prendre, en urgence, toutes les mesures en son pouvoir pour empêcher la promotion ou l'accueil d'entreprises, de délégations ou d'intermédiaires susceptibles de participer à la perpétuation des crimes commis par Israël ». 

« Nous sommes confrontés aux pires crimes de notre code pénal. Ils ne peuvent aboutir que grâce à l’aide et à l’assistance fournies par un certain nombre d’entités et d’événements, tel ce salon », a affirmé Me Dominique Cochain lors de l'audience.

Un autre avocat des associations, Me Matteo Bonaglia, a vivement déploré qu’un stand du salon soit alloué au ministère de la Défense israélien, qui pourra y « défendre son action », et que des sociétés israéliennes puissent y « faire valoir l’efficacité de leur matériel de guerre testé à Gaza ».

Dans une seconde assignation, plus brièvement abordée, Attac France, Survie et Stop Fuelling War reprochent également « la promotion et la participation au salon d'entreprises qui alimenteraient indirectement les conflits en Ukraine et au Soudan ». 

Le salon Paris-Le Bourget est organisé tous les deux ans en Seine-Saint-Denis par la SIAE, filiale du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS).

Me Sylvain Pavillet, l'avocat de la SIAE, a plaidé que les associations demandaient à la justice « d'entrer dans un débat politique », alors qu'Israël mène des représailles sanglantes à Gaza depuis l'attaque du 7 octobre 2023 qui a fait 1 218 morts côté israélien, et que le bilan côté palestinien s'élève désormais à plus de 54 084 morts.

Concernant les accusations de génocide, « nous en sommes au stade des investigations, en aucun cas à la preuve », a affirmé Me Pavillet, ajoutant : « Il ne suffit pas d’affirmer qu’il y a des atrocités, bien sûr qu’il y en a, pour qu’un juge puisse entamer des poursuites judiciaires ».

Concernant les mesures de restriction de la participation d’entreprises aux salons, « on vous demande de vous substituer au gouvernement pour les imposer, mais cela ne relève pas de votre compétence », a déclaré Me Pavillet aux magistrats.

La décision a été mise en délibéré au 10 juin.