Noël: Bethléem en berne, les Ukrainiens à l'heure occidentale

Vue de l'église de la Nativité dans la ville biblique de Bethléem, en Cisjordanie occupée, le 24 décembre 2023, avant la messe de minuit. (Photo de HAZEM BADER / AFP)
Vue de l'église de la Nativité dans la ville biblique de Bethléem, en Cisjordanie occupée, le 24 décembre 2023, avant la messe de minuit. (Photo de HAZEM BADER / AFP)
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Publié le Mardi 26 décembre 2023

Noël: Bethléem en berne, les Ukrainiens à l'heure occidentale

  • Les rues des villes de Syrie sous contrôle gouvernemental ne connaîtront pas non plus de festivités de Noël cette année, en solidarité avec les victimes du conflit à Gaza
  • C'est la première fois dans l'histoire moderne de l'Ukraine que les croyants orthodoxes fêtent Noël de manière synchrone avec les catholiques

BETHLEEM: Les célébrations de Noël à Bethléem sont assombries par "le fracas des armes" à Gaza, a déploré le pape François, tandis que les Ukrainiens fêtent pour la première fois Noël le 25 décembre, au diapason des Occidentaux et en signe de défi à la Russie.

"Notre coeur, ce soir, est à Bethléem, où le prince de la paix est encore rejeté par la logique perdante de la guerre, avec le fracas des armes qui, aujourd'hui encore, l'empêche de trouver une place dans le monde", a lancé le pape lors de la messe de Noël dimanche à la basilique Saint-Pierre, au Vatican.

Haut-lieu du christianisme, la cité de Bethléem - où est né Jésus-Christ selon la tradition -, en Cisjordanie occupée, a été désertée par les pèlerins cette année et a annulé la majeure partie des célébrations de Noël en raison des combats dans la bande de Gaza.

"Ils sont nombreux à mourir pour cette terre, c'est très difficile de célébrer quelque chose alors que notre peuple se meurt", estime Nicole Najjar, une étudiante de 18 ans, sur la place de la Mangeoire désertée.

Face à la basilique de la Nativité, une oeuvre d'art évoquant le drame de Gaza a été installée en lieu et place de la crèche grandeur nature et du colossal sapin: Marie et Joseph, des statues grises au milieu d'un fatras de débris et de tôles, derrière des barbelés.

Les rues des villes de Syrie sous contrôle gouvernemental ne connaîtront pas non plus de festivités de Noël cette année, les principales églises se bornant à des prières, en solidarité avec les victimes du conflit à Gaza.

La guerre entre le Hamas et Israël a été déclenchée le 7 octobre par l'attaque de commandos du Hamas sur le sol israélien, faisant environ 1.140 morts, en majorité des civils, d'après les autorités israéliennes. En représailles, Israël a juré d'"anéantir" ce mouvement palestinien, pilonnant la bande de Gaza, où 20.674 personnes, en majeure partie des civils, ont péri, selon le gouvernement du Hamas.

Les Ukrainiens à l'heure occidentale

Près de deux ans après le début de l'invasion de leur pays par la Russie, les Ukrainiens orthodoxes ont participé à des services religieux dès dimanche soir pour célébrer Noël le 25 décembre, en même temps que le monde occidental, pour la première fois de leur histoire et en signe de défi vis-à-vis de Moscou.

"Nous prions pour la fin de la guerre. Nous prions pour la victoire", a lancé le président Volodymyr Zelensky.

"Pour la paix, pour la justice", a-t-il poursuivi devant un majestueux monastère qui abritait jusqu'à fin 2022 le primat de l'Eglise orthodoxe ukrainienne dépendante de Moscou.

C'est la première fois dans l'histoire moderne de l'Ukraine que les croyants orthodoxes fêtent Noël de manière synchrone avec les catholiques, mais aussi les orthodoxes grecs, roumains et bulgares, le 25 décembre et non le 7 janvier du calendrier civil comme il était de tradition jusque-là.

L'Eglise orthodoxe russe a en effet gardé pour les fêtes religieuses l'ancien calendrier julien, décalé de 13 jours.

"Nous voulons vraiment célébrer cette fête d'une nouvelle manière. C'est une fête avec toute l'Ukraine, avec notre Ukraine indépendante", explique Olena.

En juillet, Volodymyr Zelensky a officialisé le déplacement des célébrations de Noël du 7 janvier au 25 décembre, une décision qui fait partie d'une série de mesures prises par l'Ukraine pour se distancier de la Russie.

Le Père Noël en «tournée»

En Turquie, sur le site de l'église orthodoxe d'Antakya détruite par le séisme du 6 février qui a balayé le sud de ce pays, les autorités ont quant à elles préféré jouer la prudence et célébrer la messe de la Nativité en plein après-midi, dans une ville toujours en proie au chaos.

Comme pour faire un peu oublier, le temps d'une journée, le sombre contexte international de cette fin d'année, le Père Noël a de son côté entamé dimanche sa "tournée", sous la surveillance étroite de l'armée américaine, qui depuis des décennies diffuse des informations sur les "déplacements", chaque 24 décembre, de l'homme en rouge.

"Parti" de sa base du Pôle Nord, son traîneau a survolé l'Asie, Israël, la bande de Gaza, l'Afrique, l'Antarctique avant de remonter l'Amérique du Sud en direction des Etats-Unis, distribuant au passage 100 000 cadeaux par seconde, selon le Commandement de défense aérospatiale nord-américain (Norad).

Cette "traque" est une institution aux Etats-Unis depuis 1955.

Autre nouvelle positive: au Sri Lanka, dont les prisons sont notoirement surpeuplées, 1 004 détenus ont bénéficié d'une grâce présidentielle pour Noël.


Le Kremlin estime que la normalisation des relations avec les USA sont peu probables dans l'immédiat

Les drapeaux russe et américain flottent devant l'ambassade des États-Unis dans le centre de Moscou, le 5 novembre 2024, jour de l'élection présidentielle américaine. (Photo : Alexander NEMENOV / AFP)
Les drapeaux russe et américain flottent devant l'ambassade des États-Unis dans le centre de Moscou, le 5 novembre 2024, jour de l'élection présidentielle américaine. (Photo : Alexander NEMENOV / AFP)
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  • « Il y a beaucoup d'obstacles dans les relations bilatérales, il est donc peu probable d'espérer des résultats rapides », a déclaré Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin.
  • Depuis le premier appel officiel entre Vladimir Poutine et Donald Trump le 12 février, Russes et Américains ont exprimé leur volonté de remettre à plat leurs relations bilatérales.

MOSCOU : Le Kremlin a jugé mercredi « peu probable » l'obtention de résultats rapides dans les discussions russo-américaines sur la normalisation des relations entre Moscou et Washington, entamées après le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en début d'année.

« Il y a beaucoup d'obstacles dans les relations bilatérales, il est donc peu probable d'espérer des résultats rapides », a déclaré Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, lors de son briefing quotidien, auquel participait l'AFP, tout en soulignant que ce « travail difficile va se poursuivre ».

Depuis le premier appel officiel entre Vladimir Poutine et Donald Trump le 12 février, Russes et Américains ont exprimé leur volonté de remettre à plat leurs relations bilatérales, ce qui marque un revirement soudain après des années de tensions extrêmes, sur fond de conflit en Ukraine. 

Le locataire de la Maison Blanche, qui affirme se situer « au milieu » entre la Russie et l'Ukraine, a depuis repris à plusieurs reprises la rhétorique du Kremlin, tout en vantant la possible coopération économique des États-Unis avec la Russie.

Des diplomates russes et américains ont tenu des consultations bilatérales en vue d'une normalisation en février et avril à Istanbul, après une première rencontre le 18 février à Ryad depuis février 2022.

Un nouveau round de consultations devrait avoir lieu « prochainement » à Moscou, a annoncé mardi l'ambassadeur russe aux États-Unis, Alexandre Dartchiev, à l'agence de presse officielle russe TASS.

Interrogé mercredi sur ces consultations, M. Peskov a souligné qu'il s'agissait de discussions « entre les ministères des Affaires étrangères », saluant un « dialogue qui se poursuit », sans toutefois donner plus de précisions sur la composition des délégations ni la date de la prochaine réunion.

La dynamique des discussions entre Russes et Américains dans les premières semaines semble toutefois avoir changé et la perspective d'un accord rapide sur le règlement du conflit en Ukraine, comme le souhaitait Donald Trump, semble s'être estompée.

Au-delà de l'Ukraine, Russes et Américains souhaitent aborder des sujets plus globaux tels que leurs relations économiques, l'architecture de la sécurité en Europe ou encore le contrôle des armements dans le monde.


Réseaux sociaux : un rapport tire la sonnette d'alarme sur la santé mentale des enfants

Les langues se délient et les révélations se succèdent pour dénoncer des comportements complètement déviants (Photo, AFP)
Les langues se délient et les révélations se succèdent pour dénoncer des comportements complètement déviants (Photo, AFP)
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  • Plus de 14 % des 10-19 ans dans le monde connaissent des problèmes de santé mentale, avec un taux de suicide global moyen de 6 pour 100 000 adolescents âgés de 15 à 19 ans.
  • Dans son rapport pour 2025, KidsRights a identifié une « corrélation troublante » entre la détérioration de la santé mentale des enfants et ce que l'organisation qualifie d'utilisation « problématique » des réseaux sociaux.

AMSTERDAM, PAYS-BAS : La crise de la santé mentale chez les enfants a atteint un point critique, exacerbée par « l'expansion incontrôlée » des réseaux sociaux, selon un rapport du groupe de défense des droits des enfants KidsRights publié mercredi.

Selon les recherches menées par cette organisation basée à Amsterdam et l'université Erasmus de Rotterdam, plus de 14 % des 10-19 ans dans le monde connaissent des problèmes de santé mentale, avec un taux de suicide global moyen de 6 pour 100 000 adolescents âgés de 15 à 19 ans.

« Le rapport de cette année est un signal d'alarme que nous ne pouvons plus ignorer », a déclaré dans un communiqué Marc Dullaert, fondateur et président de KidsRights.

« La crise de la santé mentale et/ou du bien-être de nos enfants a atteint un point de bascule, exacerbé par l'expansion incontrôlée des plateformes de réseaux sociaux qui donnent la priorité à l'engagement plutôt qu'à la sécurité des enfants », a-t-il poursuivi. 

Le KidsRights Index, rapport annuel conduit par la fondation, évalue le degré d'adhésion de 194 pays aux droits des enfants et la manière dont les pays s'efforcent d'améliorer ces droits.

Dans son rapport pour 2025, KidsRights a identifié une « corrélation troublante » entre la détérioration de la santé mentale des enfants et ce que l'organisation qualifie d'utilisation « problématique » des réseaux sociaux, à savoir une utilisation compulsive et addictive des réseaux qui a un impact négatif sur le fonctionnement quotidien de l'utilisateur.

Le manque de données sur la santé mentale des enfants constitue un problème majeur et révèle selon le rapport un « besoin urgent » d'action coordonnée pour prendre en compte l'impact nocif de l'environnement numérique sur les enfants et adolescents. 

« Nous assistons à la lutte des gouvernements pour contenir une crise numérique qui est en train de remodeler fondamentalement l'enfance », a poursuivi M. Dullaert, appelant à accorder la priorité au bien-être des enfants plutôt qu'aux profits des entreprises.

Le rapport met en évidence des variations régionales importantes, faisant de l'Europe la région où les enfants de 13 ans sont le plus exposés au risque d'utilisation problématique des réseaux sociaux (13 %), et où le niveau de dépendance numérique des jeunes de 15 ans est « sans précédent », 39 % d'entre eux étant en contact continu avec leurs amis via les réseaux sociaux. 

Soutenue par la France et l'Espagne, la Grèce a proposé la semaine dernière, lors d'une réunion ministérielle au Luxembourg, d'encadrer l'utilisation des plateformes en ligne par les enfants, face aux inquiétudes concernant leur caractère addictif.

En février, la mini-série Adolescence de Netflix avait révélé notamment les influences toxiques et misogynes auxquelles les jeunes sont exposés en ligne, poussant les gouvernements britannique et français à vouloir intégrer le visionnage du programme dans les écoles.

Adolescence « a mis en lumière les préoccupations mondiales concernant la représentation et la protection des enfants sur les plateformes numériques — mais nous avons besoin d'action, pas seulement d'indignation », a conclu M. Dullaert. 


En cas de désaccord avec la politique du gouvernement britannique à l'égard de Gaza, les fonctionnaires sont invités à démissionner

(Fichier : AFP)
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  • Plus de 300 employés du Foreign Office ont signé une lettre adressée au ministre des affaires étrangères pour lui faire part de leurs inquiétudes.
  • La Grande-Bretagne facilite des "violations potentielles du droit international" en exportant des armes vers Israël

LONDRES : Le personnel du ministère britannique des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement a été invité à quitter son emploi s'il n'est pas d'accord avec la politique du gouvernement à l'égard de Gaza.

Plus de 300 fonctionnaires ont signé une lettre envoyée le mois dernier au ministre des affaires étrangères, David Lammy, pour lui faire part de leurs inquiétudes concernant les ventes d'armes britanniques et leur "complicité" dans le "mépris flagrant [...] du droit international" par l'armée israélienne dans l'enclave palestinienne.

Dans une réponse à la lettre, envoyée par les deux plus hauts fonctionnaires du ministère, Nick Dyer et Sir Oliver Robbins, les signataires ont été informés : "(Si) votre désaccord avec un aspect quelconque de la politique ou de l'action du gouvernement est profond, votre ultime recours est de démissionner de la fonction publique. C'est une solution honorable".

Un fonctionnaire qui a signé la plainte initiale a déclaré à la BBC : "(Il y a) de la frustration et un profond sentiment de déception à l'idée que l'espace de contestation soit de plus en plus réduit".

Cette lettre est le quatrième cas où des fonctionnaires contactent de hauts responsables pour leur faire part de leurs inquiétudes quant à la position du Royaume-Uni sur la guerre à Gaza.

Les signataires de cette lettre, envoyée le 16 mai, comprennent des employés d'ambassades étrangères et des employés basés à Londres.

Parmi les sujets abordés figurent les violations potentielles du droit international, le nombre de morts à Gaza et les activités des colons israéliens en Cisjordanie occupée.

"En juillet 2024, le personnel a exprimé son inquiétude quant aux violations du droit humanitaire international par Israël et à la complicité potentielle du gouvernement britannique. Dans l'intervalle, la réalité du mépris d'Israël pour le droit international est devenue plus criante", indique la lettre.

Elle ajoute que les actions d'Israël, notamment son blocus sur l'aide alimentaire entrant à Gaza, ont conduit "de nombreux experts et organisations humanitaires à accuser Israël d'utiliser la famine comme arme de guerre", et que le Royaume-Uni facilite les "violations potentielles du droit international" en continuant d'exporter des armes vers le pays.

La lettre note également que "le gouvernement israélien a explicitement planifié le transfert forcé de la population de Gaza".

Dans leur réponse, M. Dyer et Sir Oliver ont déclaré qu'il "pourrait être utile" de "rappeler" aux signataires que l'OCFD dispose de systèmes permettant de répondre aux préoccupations du personnel en matière de politique, y compris le "recours ultime" que constitue la démission.

Le "marché au cœur de la fonction publique britannique est que nous nous engageons à mettre en œuvre les politiques du gouvernement du jour de tout cœur, dans les limites imposées par la loi et le code de la fonction publique", ont-ils écrit.

Un ancien fonctionnaire du FCDO a déclaré à la BBC que la réponse rhétorique "fournit simplement au gouvernement une prétendue 'dénégation plausible' pour permettre des violations du droit international".

Le fonctionnaire a ajouté, sous couvert d'anonymat, que l'OCFD n'avait pas tiré les leçons du rapport Chilcot de 2016 sur la guerre d'Irak, qui avait suggéré l'existence de "croyances enracinées" au sein de la fonction publique, nécessitant des systèmes pour remettre en question la "pensée de groupe" à l'avenir.

L'OCFD a déclaré dans un communiqué : "Il existe des systèmes en place qui permettent (au personnel) de faire part de leurs préoccupations s'ils en ont.

Un porte-parole a ajouté : "Depuis le premier jour, ce gouvernement applique rigoureusement le droit international en ce qui concerne la guerre à Gaza.

"L'un des premiers actes de notre gouvernement a été de suspendre les licences d'exportation susceptibles d'être utilisées par les forces de défense israéliennes à Gaza.

"Nous avons suspendu les exportations directes de pièces de F-35 destinées à Israël, et nous n'exportons catégoriquement aucune bombe ou munition susceptible d'être utilisée à Gaza.

Le gouvernement britannique a déjà déclaré qu'il estimait qu'Israël "risquait" d'enfreindre le droit international et humanitaire à Gaza.

En septembre dernier, 30 licences d'exportation d'armes ont été suspendues par crainte d'un "risque évident" d'utilisation illégale, mais plus de 300 sont toujours en vigueur.

La guerre à Gaza a tué plus de 50 000 Palestiniens et en a déplacé des millions d'autres qui n'ont pas accès aux ressources de base.

L'année dernière, la Cour pénale internationale a émis des mandats d'arrêt à l'encontre du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et de l'ancien ministre de la défense Yoav Gallant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com