Après un an de «guerre contre le crime», les Salvadoriens redécouvrent leurs rues

Des gens marchent dans une zone de commerce et de vente ambulante du centre historique de San Salvador, le 17 mars 2023. (AFP)
Des gens marchent dans une zone de commerce et de vente ambulante du centre historique de San Salvador, le 17 mars 2023. (AFP)
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Publié le Dimanche 26 mars 2023

Après un an de «guerre contre le crime», les Salvadoriens redécouvrent leurs rues

  • En dépit des critiques de défenseurs des droits humains qui dénoncent des abus, le président Bukele jouit d'une grande popularité
  • 92% des Salvadoriens jugent que l'insécurité a reculé grâce à lui, selon un sondage pour le quotidien La Prensa Grafica

SAN SALVADOR: Après un an de "guerre" contre les "maras", les bandes criminelles qui semaient la terreur au Salvador, la population redécouvre le plaisir de déambuler sans crainte dans les rues.

Maintenant "on peut se promener (...). Pour moi c'est bien, ce qu'a fait monsieur le président" Nayib Bukele, dit à l'AFP Norma Gomez, 58 ans, qui vend des cosmétiques dans les rues de la capitale San Salvador.

Autrefois, les quartiers étaient sous la coupe des "maras" concurrentes Mara Salvatrucha et Barrio 18, qui faisaient respecter des "frontières" invisibles et rançonnaient habitants et commerçants en recourant souvent à des "exécutions" sommaires.

"Aujourd'hui, je suis tranquille lorsque mon fils et ma fille sortent de l'école et reviennent seuls à la maison par les transports en commun, sans crainte qu'ils soient interceptés par des bandits", commente Mauricio Reyes, un salarié de 51 ans.

"La sécurité est bonne, ce n'était pas le cas avant. Aujourd'hui, nous pouvons circuler librement", renchérit Carlos Duenas, un marchand ambulant de 57 ans.

Popularité 

En dépit des critiques de défenseurs des droits humains qui dénoncent des abus, le président Bukele jouit d'une grande popularité : 92% des Salvadoriens jugent que l'insécurité a reculé grâce à lui, selon un sondage pour le quotidien La Prensa Grafica. Un succès dont la présidente de gauche Xiomara Castro du Honduras voisin, lui aussi confronté au fléau des "maras", veut s'inspirer.

Nées dans les rues de Los Angeles, en Californie, les "maras" ont investi le pays à la fin de la guerre civile, au début des années 1990, et sont arrivées à contrôler jusqu'à 80% du territoire salvadorien, selon M. Bukele.

Vivant du racket, de la revente de drogue et de petites entreprises et commerces qu'ils contrôlaient, ces bandes criminelles ont commis, selon les autorités, quelque 120.000 meurtres, soit un bilan supérieur aux 75.000 morts des 12 années de guerre civile.

Depuis la proclamation le 27 mars 2022 de l'état d'exception, en réponse à une vague de 87 assassinats en quelques jours, ce sont plus de 65.000 criminels présumés qui ont été arrêtés sans mandat et sont allés rejoindre les 16.000 "mareros" qui étaient déjà derrière les barreaux.

«méga-prison»

Pour faire face à ces dizaines de milliers d'arrestations, le président Bukele a fait construire une gigantesque prison -"la plus grande d'Amérique"- d'une capacité de 40.000 détenus.

Maintenant, "on peut vraiment pénétrer dans beaucoup de quartiers alors qu'avant c'était extrêmement difficile ou dangereux", reconnaît Laura Andrade, la directrice de l'Institut d'opinion publique de l'Université Centroaméricaine. Mais, s'inquiète-t-elle, les "maras" cherchent à s'organiser autrement, de manière "beaucoup plus complexe" pour tenter d'échapper à la répression.

"Ce qui est évident, c'est la quasi neutralisation" des "maras" et le démantèlement de leurs structures, salue Carlos Carcach, chercheur à l'Ecole supérieure de commerce et d'économie. "Le côté négatif", souligne-t-il cependant, c'est que "la population a troqué des droits (humains) contre une amélioration de sa sécurité, réelle ou apparente".

Pour le juge Juan Antonio Duran, il ne fait aucun doute que l'année écoulée a été "néfaste pour la justice pénale et en ce qui concerne les violations des droits humains" de personnes innocentes qui ont été arrêtées hors de toute procédure judiciaire.

Le ministre de la Justice et de la Sécurité Gustavo Villatorio a reconnu qu'à la mi-février 3.745 détenus avaient été libérés sans qu'aucune charge ne soit retenue contre eux.

"Auparavant, nos jeunes étaient la cible des criminels (...) maintenant ils ont peur de sortir à cause de l'état d'exception, (de peur) d'être pris s'ils sont mal vus par la police ou l'armée", estime José Sanchez, un plombier de 55 ans.

Pour l'universitaire américain José Miguel Cruz, de l'Université de Floride, il ne fait aucun doute que la "guerre contre le crime" est en réalité une "stratégie électorale" de Nayib Bukele qui veut se faire réélire en février 2024 après avoir fait lever l'interdiction constitutionnelle d'un deuxième mandat consécutif par des magistrats qu'il a lui-même désignés.


La CPI ne se laissera pas influencer par les «Goliath» de ce monde, promet son procureur

Le procureur de la Cour pénale internationale Karim Khan. (Photo, AFP)
Le procureur de la Cour pénale internationale Karim Khan. (Photo, AFP)
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  • Karim Khan a été mis en cause par les ambassadeurs russe et libyen qui ont dénoncé son absence d'action face à l'offensive israélienne à Gaza
  • La Russie avait placé en mai 2023 Karim Khan sur sa liste des personnes recherchées, après que la CPI a émis un mandat d'arrêt contre le président Vladimir Poutine

NATIONS UNIES : Le procureur de la Cour pénale internationale Karim Khan a assuré mardi qu'il ne se laisserait pas "influencer" par les "Goliath" de ce monde, en référence aux menaces le visant dans des dossiers liés à la guerre en Ukraine et à Gaza.

Lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU portant sur son enquête sur les crimes de guerre en Libye, Karim Khan a été mis en cause par les ambassadeurs russe et libyen qui ont dénoncé son absence d'action face à l'offensive israélienne à Gaza.

"On peut se demander si l'efficacité de la CPI dans ce dossier n'est pas affectée par un projet de loi (...) visant à sanctionner les responsables de la CPI impliqués dans des enquêtes contre les Etats-Unis ou ses alliés",  a lancé l'ambassadeur russe Vassili Nebenzia, en référence à des informations rapportées par la presse sur un projet en ce sens d'élus au Congrès américains.

"Je veux le rassurer, (...) nous ne nous laisserons pas influencer, que ce soit par des mandats d'arrêt de la Russie contre moi ou des membres élus de la Cour, ou par n'importe quel élu d'une autre juridiction", a répondu Karim Kahn, évoquant des "menaces" personnelles et contre son bureau pour les forcer à "arrêter".

La Russie avait placé en mai 2023 Karim Khan sur sa liste des personnes recherchées, après que la CPI a émis un mandat d'arrêt contre le président Vladimir Poutine pour son rôle dans la déportation d'enfants en Ukraine.

Début mai, la CPI avait déjà lancé une mise en garde aux "individus qui (la) menacent de représailles", elle ou son personnel, en affirmant que de telles actions pourraient constituer une "atteinte à l'administration de la justice".

Elle s'exprimait suite à des informations selon lesquelles la Cour s'apprêtait à délivrer des mandats d'arrêt contre des membres du gouvernement israélien -dont pourrait faire partie le Premier ministre Benjamin Netanyahu- en lien avec les opérations militaires menées par Israël à Gaza en riposte à l'attaque du Hamas.

"Nous avons un devoir de nous battre pour la justice, de nous battre pour les victimes", a insisté Karim Khan mardi devant les membres du Conseil de sécurité.

"Je suis bien conscient qu'il y a des Goliath dans cette salle. Des Goliath avec du pouvoir, de l'influence", mais "nous avons la loi", a-t-il ajouté, assurant qu'il ferait son travail "avec intégrité et indépendance".

 

 


Poutine en Chine cette semaine, en quête d'un soutien plus fort de Pékin

Le président russe Vladimir Poutine se rendra cette semaine en Chine à l’invitation du dirigeant Xi Jinping, a annoncé le ministère des Affaires étrangères de Pékin le 14 mai 2024 (Photo, AFP).
Le président russe Vladimir Poutine se rendra cette semaine en Chine à l’invitation du dirigeant Xi Jinping, a annoncé le ministère des Affaires étrangères de Pékin le 14 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Il s'agira du premier déplacement à l'étranger de Vladimir Poutine depuis sa réélection en mars et aussi de la quatrième rencontre entre les deux présidents depuis le début de l'invasion russe en Ukraine
  • Quelques jours avant le lancement de l'opération, Moscou et Pékin avaient affirmé que leur amitié était «sans limites»

PEKIN: Le président russe Vladimir Poutine se rendra en Chine cette semaine avec l'espoir d'obtenir de son "cher ami" Xi Jinping un plus net soutien à sa guerre en Ukraine, une visite annoncée mardi par les deux pays.

Le dirigeant russe "effectuera une visite d'Etat en Chine du 16 au 17 mai", jeudi et vendredi, a annoncé une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hua Chunying.

Il s'agira du premier déplacement à l'étranger de Vladimir Poutine depuis sa réélection en mars et aussi de la quatrième rencontre entre les deux présidents depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, en février 2022.

Quelques jours avant le lancement de l'opération, Moscou et Pékin avaient affirmé que leur amitié était "sans limites". Depuis, leur relation diplomatique et commerciale s'est renforcée.

"Le président Xi Jinping procédera à un échange de points de vue avec le président Poutine sur les relations bilatérales, la coopération dans divers domaines et les questions internationales et régionales d'intérêt commun", a précisé un autre porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin, lors d'un point presse régulier.

De son côté, le Kremlin a indiqué que les deux présidents évoqueraient leur "partenariat global et leur coopération stratégique" et "définir(aient) les domaines-clés de développement de la coopération russo-chinoise, tout en échangeant aussi leurs points de vue sur les questions internationales et régionales".

De nombreux experts estiment que la Russie est de plus en plus dépendante de la Chine, devenue un partenaire économique crucial face à l'avalanche de sanctions occidentales décrétées en réaction à son offensive militaire.

Baisse des exportations 

Ces derniers mois, Pékin a balayé à plusieurs reprises les critiques occidentales sur ses liens avec Moscou, tout en profitant d'importations à prix cassé de gaz et de pétrole de son voisin.

Mais sans vouloir pour autant renforcer son soutien.

"Les Russes veulent que la Chine fasse davantage pour les soutenir, ce que la Chine hésite à faire parce qu'elle ne veut pas compromettre ses relations avec l'Occident", explique à l'AFP Alexander Gabuev, directeur du Centre Carnegie Russie Eurasie.

Les échanges commerciaux sino-russes ont explosé depuis l'invasion de l'Ukraine et ont atteint 240 milliards de dollars (222 milliards d'euros) en 2023, selon les Douanes chinoises.

Mais les exportations chinoises vers son voisin ont chuté en mars et avril cette année, alors que Washington menace de sanctions les institutions financières soutenant l'effort de guerre russe.

Effrayées par ces menaces de sanctions, qui viendraient porter un nouveau coup à une économie chinoise déjà fragile, les banques du géant asiatique sont devenues récemment plus prudentes dans leurs transactions avec la Russie, les suspendant ou les réduisant.

"Les banques chinoises s'inquiètent de l'impact pour leur réputation et cherchent à éviter de grosses sanctions", souligne Elizabeth Wishnick, spécialiste des relations sino-russes au centre de réflexion américain CNA.

Pas «naïfs»

Et tandis que la Chine cherche à apaiser les tensions avec les Etats-Unis, elle pourrait être réticente à renforcer sa coopération avec la Russie.

"Si la Chine souhaite (...) maintenir le dégel, tactique, de ses relations avec les Etats-Unis et limiter la convergence américano-européenne en matière de politique à l'égard de Pékin, elle doit prendre au sérieux la menace américaine de sanctionner ses institutions financières", estime Ali Wyne, du groupe de réflexion International Crisis Group.

Vladimir Poutine et Xi Jinping discuteront ainsi "probablement des moyens par lesquels Pékin pourrait soutenir Moscou de manière moins voyante, peut-être par l'intermédiaire de petites banques chinoises ou de canaux de financement non officiels", estime-t-il.

Plusieurs experts estiment que cette nouvelle rencontre entre les deux présidents servira à réaffirmer l'étroite relation entre les deux dirigeants, à signer quelques accords et à plaider pour un renforcement des échanges commerciaux.

Vladimir Poutine sait parfaitement que Pékin reste déterminé à soutenir Moscou et faire ainsi front commun face à ce que les deux pays dénoncent comme l'hégémonie américaine sur le monde, soulignent ces experts.

Les Russes ne sont pas "naïfs" et "savent très bien que les liens avec l'Occident sont très importants pour la Chine" note M. Gabuev du Centre Carnegie Russie Eurasie.

Mais ils sont toutefois "certains que la Chine ne les laissera pas tomber", souligne-t-il.


Accusations d'interférences au Royaume-Uni: Londres a convoqué l'ambassadeur chinois

Le dirigeant de Hong Kong dit avoir peu de souvenirs d'un homme accusé par la Grande-Bretagne d'espionnage pour le compte de la ville chinoise après la publication d'une photographie semblant les montrer ensemble (Photo, AFP).
Le dirigeant de Hong Kong dit avoir peu de souvenirs d'un homme accusé par la Grande-Bretagne d'espionnage pour le compte de la ville chinoise après la publication d'une photographie semblant les montrer ensemble (Photo, AFP).
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  • Arrêtés début mai, les suspects Chi Leung (Peter) Wai, 38 ans, Matthew Trickett, 37 ans, et Chung Biu Yuen, 63 ans, ont été libérés sous contrôle judiciaire
  • Ils sont inculpés pour aide aux services de renseignement hongkongais et ingérence étrangère

LONDRES: Londres a annoncé avoir convoqué mardi l'ambassadeur chinois au lendemain de la présentation à la justice de trois hommes accusés d'aide aux services de renseignement hongkongais et d'interférence étrangère.

Le ministère britannique des Affaires étrangères a été "sans équivoque" sur le fait que le comportement récent de la Chine n'est "pas acceptable", a indiqué un porte-parole dans un communiqué, évoquant cyberattaques, espionnage et promesse de récompense dans la traque de militants pro-démocratie à Hong Kong.

Arrêtés début mai, les suspects Chi Leung (Peter) Wai, 38 ans, Matthew Trickett, 37 ans, et Chung Biu Yuen, 63 ans, ont été libérés sous contrôle judiciaire à l'issue de leur présentation à la justice lundi à Londres.

Chung Biu Yuen est un chef de l'agence du commerce et de l'économie de Hong Kong (ETO) à Londres, selon le gouvernement hongkongais.

Ils sont inculpés pour aide aux services de renseignement hongkongais et ingérence étrangère, en vertu de la loi britannique sur la sécurité nationale.

Ils sont notamment accusés d'avoir rassemblé des informations, mené des actions de surveillance "susceptibles d'aider matériellement un service de renseignement étranger dans ses actions liées au Royaume-Uni", et ce entre le 20 décembre 2023 et le 2 mai 2024.

Ils ont également été inculpés pour avoir forcé l'entrée dans une habitation, le 1er mai dernier.

Le Royaume-Uni a dénoncé à maintes reprises la répression du mouvement en faveur de la démocratie dans son ancienne colonie, dont plusieurs figures en exil ont trouvé refuge sur le sol britannique.

En juillet 2023, Londres avait vivement protesté contre les mandats d'arrêt et promesses de récompense visant à appréhender des militants pro-démocratie ayant fui Hong Kong.

Le chef de l'exécutif hongkongais, John Lee, a défendu mardi ses agences du commerce à l'étranger (ETO).

"Toute tentative d'allégation injustifiée contre le gouvernement (de Hong Kong) est inacceptable", a-t-il déclaré.

M. Lee a accusé lundi le Royaume-Uni d'avoir "inventé des accusations, arrêté arbitrairement des citoyens chinois et calomnié le gouvernement de Hong Kong". Il a dit mardi avoir demandé des précisions sur cette affaire au consulat britannique à Hong Kong et attendre une réponse.