Génocide à Gaza: L'Afrique du Sud peut-elle obtenir gain de cause devant la CIJ?

Des femmes palestiniennes pleurent leurs proches qui ont été tués lors d'une attaque israélienne de nuit sur le camp de réfugiés d'Al-Maghazi dans le centre de la bande de Gaza, le 24 décembre (Photo, AFP).
Des femmes palestiniennes pleurent leurs proches qui ont été tués lors d'une attaque israélienne de nuit sur le camp de réfugiés d'Al-Maghazi dans le centre de la bande de Gaza, le 24 décembre (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 05 janvier 2024

Génocide à Gaza: L'Afrique du Sud peut-elle obtenir gain de cause devant la CIJ?

  • Le gouvernement sud-africain a accusé Israël de violer les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention sur le génocide
  • Si la Cour estime qu'il existe un «risque plausible» qu'Israël commette des actes génocidaires à Gaza, la pression en faveur d'un cessez-le-feu s'accentuera

LONDRES: La décision de l'Afrique du Sud de porter plainte contre Israël devant la plus haute instance judiciaire des Nations unies pour ce qu'elle qualifie d’«actes génocidaires» à Gaza représente un tournant pour le droit international, selon des experts.

La Cour internationale de justice (CIJ) a confirmé avoir reçu une plainte de 84 pages, déposée le 29 décembre, détaillant les pratiques brutales présumées en violation des obligations d'Israël en vertu de la Convention sur le génocide, et a indiqué qu'une audience aurait lieu les 11 et 12 janvier.

Michelle Kelsall, maître de conférences en droit international à l'université SOAS de Londres et codirectrice du Centre for Human Rights Law, a déclaré qu'un arrêt de la CIJ concluant à l'existence d'un «risque plausible» d'actes génocidaires de la part d'Israël marquerait une étape importante dans la recherche d'un accord de cessez-le-feu.

Le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, sur cette photo prise le 19 septembre 2023 à l'Assemblée générale de l'ONU, a accusé Israël de génocide à l'encontre des Palestiniens de Gaza (Photo, AFP).

«Si la Cour estime qu'il existe un risque plausible que des actes génocidaires soient commis, elle peut ordonner des mesures provisoires conformes à la demande de l'Afrique du Sud, ce qui serait conforme à la jurisprudence récente de la Cour», a expliqué Kelsall à Arab News.

«Notamment, il n'est pas nécessaire de déterminer si Israël commet des actes génocidaires pour que l'obligation de prévention soit invoquée ou pour ordonner des mesures conservatoires. Il suffit qu'un risque plausible de génocide ait été prouvé, sur la base des éléments de preuve présentés», a-t-il précisé.

Ces preuves comprennent non seulement les pertes massives, qui dépassent aujourd'hui 22 000 personnes selon le ministère de la Santé de Gaza dirigé par le Hamas, mais aussi les obstacles aux naissances dus aux dommages causés aux services de santé essentiels, à la destruction des maisons, aux blocus empêchant la fourniture de nourriture, d'eau et d'assistance médicale, ainsi qu'aux expulsions et aux déplacements généralisés des habitants de Gaza.

Selon la plainte, ces actions ne peuvent être interprétées que comme étant «destinées à provoquer la destruction des Palestiniens en tant que groupe», en violation de la définition du génocide figurant dans la convention de 1948, à savoir «des actes commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux».

En outre, la plainte affirme que les déclarations de responsables israéliens, notamment du Premier ministre, Benjamin Netanyahou, démontrent l’«intention génocidaire» nécessaire pour prouver l'existence d'un génocide.

Les preuves citées à cet égard incluent la comparaison faite par Netanyahou des Palestiniens avec l’histoire biblique de la nation Amalek, que Dieu a ordonné aux Israélites de détruire, et son affirmation du 26 décembre selon laquelle l'offensive à Gaza serait «intensifiée» malgré le nombre élevé de victimes civiles.

Faisant preuve d'un mépris total pour les vies palestiniennes, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou. a prévenu que l'offensive à Gaza serait «intensifiée» malgré le nombre élevé de victimes civiles (Photo, Reuters).

Mai el-Sadany, avocate spécialisée dans les droits de l'homme et directrice de l'Institut Tahrir pour la politique au Moyen-Orient, a récemment déclaré à Al Jazeera que la documentation juridique sud-africaine était particulièrement opportune, compte tenu de ce qu'elle décrit comme une «désinformation accrue autour de la guerre».

Elle a indiqué que l'affaire aurait des implications significatives, ajoutant que les procédures au sein de la CIJ étaient «importantes pour ralentir la banalisation de toute atrocité de masse commise par Israël».

El-Sadany a ajouté: «Les autorités sud-africaines envoient le message que si un pays commet des atrocités de masse, comme le fait Israël, il doit s'attendre à être traduit devant un tribunal international, à ce que son bilan soit critiqué au regard des normes internationales et à ce que sa réputation sur la scène internationale en prenne un coup.»

EN BREF

La plainte de 84 pages déposée par l'Afrique du Sud accuse Israël d'avoir violé la Convention sur le génocide.

L'audience de la Cour internationale de justice à La Haye aura lieu les 11 et 12 janvier.

Selon Kelsall, les alliés d'Israël pourraient également se retrouver sous les feux des projecteurs, car «la Cour est sur le point de se prononcer de manière importante sur les obligations de prévention du génocide en général, ce qui pourrait avoir des conséquences pour d'autres États que l'Afrique du Sud et Israël».

Elle ajouté, cela reflète l'affirmation de la CIJ à la suite du génocide bosniaque de 1995, selon laquelle l'obligation de prévenir de tels crimes doit tenir compte de la distance géographique de l'État concerné par rapport au lieu des crimes, ainsi que de la force des liens politiques et d'autres types de liens.

«Si l'Afrique du Sud n'a qu'une capacité limitée à faire plus que ce qu'elle a déjà fait (en demandant des mesures conservatoires à la Cour), plusieurs autres États, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, pourraient se voir notifier une obligation beaucoup plus importante de prévenir le génocide», a signalé Kelsall.

Cette photo prise le 3 janvier 2024 montre une vue des bâtiments détruits par les bombardements israéliens dans le centre de la bande de Gaza, dans le cadre du conflit entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas (Photo, AFP).

Le ministère israélien des Affaires étrangères a condamné le dépôt de l'affaire comme une «exploitation méprisable et méprisante» de la CIJ, et a accusé le gouvernement sud-africain de «diffamation sanglante» et d'être «criminellement complice» des attaques du 7 octobre du Hamas contre Israël.

Néanmoins, les responsables israéliens semblent prendre cette initiative au sérieux. Le porte-parole du gouvernement, Eylon Levy, a confirmé qu'il défendrait ses pratiques devant le tribunal de La Haye, et que l'avocat américain Alan Dershowitz serait chargé de la défense.

C’est en soi une indication des ramifications potentielles pour le gouvernement israélien, certains commentateurs suggèrent que le pays pourrait être confronté à une série de sanctions, la pression intérieure obligeant ses alliés de Londres et de Washington à se ressaisir.

Sarang Shidore, directeur de l'Institut Quincy, basé à Washington, a déclaré à Al Jazeera qu'une décision en faveur de l'Afrique du Sud mettrait certainement la pression sur l'administration Biden en cette année d'élection présidentielle.

Une décision contre Israël pourrait avoir des «implications pour la position des États-Unis», a-t-il soutenu.

«L'administration Biden est de plus en plus vulnérable face aux opposants nationaux à la guerre et aux accusations internationales de deux poids deux mesures, mais j'ai le sentiment que l'administration Biden, et certains alliés européens clés, soutiendront fermement Israël devant la CIJ. Nous verrons bien.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Arrivée en Israël du bateau pour Gaza intercepté par l'armée

Le voilier avec à son bord 12 militants français, allemand, brésilien, turc, suédois, espagnol et néerlandais, était parti d'Italie le 1er juin pour "briser le blocus israélien" à Gaza, en proie à une situation humanitaire désastreuse après plus d'un an et demi de guerre. (AFP)
Le voilier avec à son bord 12 militants français, allemand, brésilien, turc, suédois, espagnol et néerlandais, était parti d'Italie le 1er juin pour "briser le blocus israélien" à Gaza, en proie à une situation humanitaire désastreuse après plus d'un an et demi de guerre. (AFP)
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  • Les membres d'équipage, dont deux élues du parti français de gauche radicale La France insoumise, ont été appréhendés par les autorités israéliennes.
  • L'ONG israélienne Adalah a indiqué avoir rencontré 19 des passagers, détenus dans le port d'Ashdod, dans le centre du pays, afin de leur fournir une aide juridique.

ISRAEL : Le Handala, un bateau exploité par le mouvement pro-palestinien « Flottille pour la liberté », est arrivé en Israël dimanche après avoir été intercepté par l'armée alors qu'il se dirigeait vers Gaza avec de l'aide humanitaire à bord, a constaté un journaliste de l'AFP dans le port d'Ashdod.

Les membres d'équipage, dont deux élues du parti français de gauche radicale La France insoumise, ont été appréhendés par les autorités israéliennes.

L'ONG israélienne Adalah a indiqué avoir rencontré 19 des passagers, détenus dans le port d'Ashdod, dans le centre du pays, afin de leur fournir une aide juridique.

« Deux autres militants, Bob Subery et Huwaida Arraf, qui possèdent la double nationalité (israélienne et américaine), ont été transférés à la police, où un avocat d'Adalah est également présent pour leur offrir un soutien juridique », a ajouté l'ONG dans un communiqué.

Sollicitée par l'AFP, la police israélienne n'a pas répondu dans l'immédiat.

« Adalah réaffirme que les militants à bord du Handala participaient à une mission civile pacifique visant à briser le blocus illégal imposé par Israël sur Gaza. Le navire a été intercepté dans les eaux internationales et leur détention constitue une violation flagrante du droit international », avait déclaré auparavant Adalah.

Plus tôt, le ministère israélien des Affaires étrangères avait déclaré que la marine avait arrêté le Handala pour l'empêcher d'entrer dans les eaux au large de la bande de Gaza. « Le navire se dirige en toute sécurité vers les côtes israéliennes. Tous les passagers sont sains et saufs », a-t-il déclaré. 

Samedi, une vidéo diffusée en direct depuis le navire montrait des soldats israéliens monter à bord.

Un outil de suivi en ligne indiquait que le navire se trouvait dans les eaux internationales, en mer Méditerranée, à l'ouest de Gaza.

Le navire avait quitté Syracuse, en Sicile, le 13 juillet, dans le but de briser le blocus naval israélien de Gaza et d'apporter une aide humanitaire aux habitants de ce territoire ravagé par plus de 21 mois de guerre.

Avant d'être arrêtés, les membres de l'équipage avaient déclaré sur X qu'ils entameraient une grève de la faim si l'armée israélienne interceptait le bateau et arrêtait ses passagers.

À son bord se trouvaient des militants de dix pays ainsi que des journalistes.

Le Madleen, un autre bateau envoyé par la même organisation, avait été intercepté par l'armée israélienne dans les eaux internationales le 9 juin.

Les militants, dont la Suédoise Greta Thunberg, avaient finalement été expulsés par Israël.


La conférence sur la solution à deux États reflète la position du Royaume-Uni sur la cause palestinienne

Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, lors d'une conférence de presse conjointe avec le ministre syrien des Affaires étrangères par intérim à Damas, le 31 mai 2025. (AFP)
Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, lors d'une conférence de presse conjointe avec le ministre syrien des Affaires étrangères par intérim à Damas, le 31 mai 2025. (AFP)
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  • L'Arabie saoudite, en partenariat avec la France, préside une conférence internationale de haut niveau sur le règlement pacifique de la question palestinienne.
  • Le ministre saoudien a déclaré que cette conférence, qui se tiendra dans le courant de la semaine, reflétait la position ferme du royaume à l'égard de la cause palestinienne.

RIYAD : Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal bin Farhan, a confirmé dimanche la tenue prochaine d'une conférence en partenariat avec la France, qui appelle à la reconnaissance d'un État palestinien et à la mise en œuvre de la solution à deux États.

Le ministre saoudien a déclaré que cette conférence, qui se tiendra dans le courant de la semaine, reflétait la position ferme du royaume à l'égard de la cause palestinienne et ses efforts pour parvenir à une paix juste et globale.

Le prince Faisal a déclaré : "Le Royaume d'Arabie saoudite, en partenariat avec la France, préside une conférence internationale de haut niveau sur le règlement pacifique de la question palestinienne et la mise en œuvre de la solution des deux États au niveau ministériel, qui se tiendra cette semaine au siège des Nations unies avec une large participation internationale.

Le président français Emmanuel Macron a annoncé son intention de reconnaître un État palestinien en septembre lors de l'Assemblée générale des Nations unies.

L'Arabie saoudite a salué la "décision historique" de Macron et a ajouté : "Le Royaume réitère son appel à tous les pays qui n'ont pas encore reconnu l'État de Palestine à prendre des mesures positives similaires et à adopter des positions sérieuses qui soutiennent la paix et les droits légitimes du peuple palestinien."  

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le chef des opérations humanitaires de l'ONU se félicite de l'entrée d'aide à Gaza

Le secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires humanitaires et coordinateur des secours d'urgence, Tom Fletcher, regarde lors d'une interview avec l'AFP dans le village de Nawabad, dans le district de Chahardara, dans la province de Kunduz, le 30 avril 2025. (Photo by Wakil Kohsar / AFP)
Le secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires humanitaires et coordinateur des secours d'urgence, Tom Fletcher, regarde lors d'une interview avec l'AFP dans le village de Nawabad, dans le district de Chahardara, dans la province de Kunduz, le 30 avril 2025. (Photo by Wakil Kohsar / AFP)
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  • « Cette annonce de pauses humanitaires à Gaza est la bienvenue pour permettre à notre aide de passer.»
  • Nous sommes en contact avec nos équipes sur le terrain, qui feront tout leur possible pour atteindre le plus de personnes affamées possible », a-t-il écrit sur X.

GENEVE : Le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher, a salué l'annonce, dimanche, par Israël, de l'ouverture de routes terrestres sécurisées vers Gaza pour les convois humanitaires, et a déclaré que l'ONU tenterait d'atteindre le plus de personnes possible.

« Cette annonce de pauses humanitaires à Gaza est la bienvenue pour permettre à notre aide de passer. Nous sommes en contact avec nos équipes sur le terrain, qui feront tout leur possible pour atteindre le plus de personnes affamées possible », a-t-il écrit sur X.

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) de M. Fletcher avait averti vendredi que les conditions à Gaza étaient « déjà catastrophiques et se dégradaient rapidement ».

« La crise de la famine s'aggrave », avait-il alerté, avertissant que la faim et la malnutrition augmentaient le risque de maladies et que les conséquences pouvaient rapidement devenir mortelles.

« La vie est aspirée hors de Gaza, alors que les systèmes et les services sont au bord de l'effondrement », a prévenu l'OCHA, ajoutant que « le filet d'aide entrant dans la bande est très loin d'être suffisant pour répondre aux immenses besoins ».

L'OCHA a annoncé que les équipes de l'ONU étaient prêtes à intensifier les livraisons dans le territoire palestinien « dès qu'elles en auront l'autorisation ».

« Si Israël ouvre la frontière, laisse entrer de l'essence et du matériel, et permet aux équipes humanitaires d'opérer en toute sécurité, l'ONU accélérera la livraison d'aide alimentaire, de services de santé, d'eau potable, de services de gestion des déchets, de fournitures nutritionnelles et de matériaux pour les abris », a assuré l'institution.

L'OCHA a déclaré que les restrictions imposées par les autorités israéliennes avaient limité la capacité des humanitaires à répondre aux besoins.

L'agence indique par exemple que, sur les quinze tentatives de coordination des opérations humanitaires à Gaza jeudi, quatre ont été « catégoriquement refusées » et trois autres entravées.

Une a été reportée et deux autres annulées, ne permettant donc la tenue que de cinq missions.