Pour les Soulèvements de la Terre et «pour Nahel», une même colère s'exprime dans la rue

Des manifestants défilent lors d'un rassemblement pour soutenir le mouvement écologiste Les Soulèvements de la Terre à Nantes, le 28 juin 2023 (Photo, AFP).
Des manifestants défilent lors d'un rassemblement pour soutenir le mouvement écologiste Les Soulèvements de la Terre à Nantes, le 28 juin 2023 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 29 juin 2023

Pour les Soulèvements de la Terre et «pour Nahel», une même colère s'exprime dans la rue

  • Plusieurs manifestations se sont tenues mercredi soir à travers la France pour dénoncer la dissolution des Soulèvements de la terre
  • Et par la même occasion demander «justice pour Nahel», adolescent tué la veille à Nanterre par un policier

PARIS: Plusieurs manifestations se sont tenues mercredi soir à travers la France pour dénoncer la dissolution des Soulèvements de la terre, et par la même occasion demander "justice pour Nahel", adolescent tué la veille à Nanterre par un policier.

Aux panneaux "Nous sommes le vivant qui se défend", "Dissolution de Darmanin" ou "Contre l'État policier soulèvement généralisé", se sont mêlées, place de la République à Paris, des pancartes "Nos pensées aux proches de Nahel" ou "Justice pour Nahel", évoqué aussi dans les interventions au micro.

Plusieurs centaines de personnes au moins étaient présentes, portant parfois des drapeaux Solidaires, CGT, Attac, des chasubles Greenpeace, représentant les Amis de la Terre ou Droit au Logement.

Patrice (qui n'a pas souhaité donner son nom), professeur d'université de 50 ans, n'appartient à aucun mouvement. Il est venu "manifester (son) indignation et (sa) solidarité, dire que beaucoup de gens sont choqués", se disant "surpris qu'il n'y ait pas plus de monde".

Il décrit sa "sidération" après la mort de cet adolescent. Il y a "une conjonction de phénomènes qui témoignent d'un degré de répression et de violence d'État de plus en plus effrayant", ajoute-t-il, jugeant qu'"au nom de l'ordre républicain, on détruit la République".

Au micro, une membre d'Extinction Rebellion a lancé: "On ne dissout pas un soulèvement, on ne dissout pas la lutte des citoyens pour défendre cette terre dont nous dépendons tous, on ne peut pas dissoudre une marée qui monte".

«Inadmissible»

Secrétaire national du Syndicat de la Magistrature, Thibaut Spriet a annoncé que le syndicat participerait aux recours contre le décret de dissolution des Soulèvements de la Terre. "Et nous continuerons de lutter contre l'invocation incessante de la notion de terrorisme, contre la construction d'un État policier, contre le déni des violences policières", a-t-il déclaré devant les manifestants.

Le collectif des Soulèvements de la terre a été dissous le 21 juin en Conseil des ministres, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin invoquant son "rôle majeur dans la conception et la diffusion de modes opératoires violents". La décision a provoqué une série de condamnations notamment parmi les défenseurs des libertés fondamentales.

À Nantes, environ 300 personnes ont défilé dans le calme, un cortège dans lequel on a également pu entendre "justice pour Nahel".

"La répression policière et judiciaire vise à nous faire baisser la tête. Mais les terroristes climatiques et sociaux ce sont eux", disait Julie Blondel, enseignante de 40 ans, secrétaire du syndicat Éduc'Action.

À Lyon, 600 personnes, selon la préfecture, ont écouté devant la préfecture de région les interventions de la LDH, FSU, la Confédération paysanne, Scientifiques en rébellion...

Pour Nathalie Rochet, 58 ans, qui se présente comme simple citoyenne, "interdire un mouvement militant est inadmissible, surtout lorsqu’il soutient des valeurs aussi fondamentales que celles de l’écologie. Le gouvernement affirme qu’il faut sauver la planète, et dans le même temps il interdit ce mouvement, et pratique le greenwashing avec les entreprises".

«Partout nous fleurissons»

Sous les applaudissements, un responsable de la Confédération paysanne a expliqué qu'"à Sainte-Soline, on a manifesté pour dénoncer la violence de cette agriculture industrielle".

Le parallèle avec la mort de Nahel a été fait à de multiples reprises. "Nous nous indignons devant la violence d’un État policier conduisant à la mort de certains comme Nahel", a lancé au micro un représentant de XR.

À Grenoble, ils étaient environ 200 devant la préfecture de l’Isère, en présence d'élus comme le maire écologiste Eric Piolle et la députée LFI Elisa Martin.

"Tremblez, je suis un écoterroriste !", lisait-on sur une banderole.

Claire, 45 ans, s'est dite "révoltée par cette violence du gouvernement à vouloir museler les gens, on n'écoute pas les gens".

"Un mouvement qui se bat pour la protection des biens communs que sont l’eau et la terre ne peut pas être dissous.¨Partout nous fleurissons et refleurirons car la répression brutale imposée par le gouvernement reste toujours moins effrayante que l’avenir suffocant qu’il nous réserve", a dit au micro un jeune militant grenoblois des "Amis de feu les Soulèvements de la terre".


Canicule: une chaleur «d'un niveau exceptionnel» dans le sud-ouest

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  • Cet épisode, le deuxième à toucher le pays cet été après celui du 19 juin au 4 juillet, est aussi le 51e enregistré depuis 1947, selon l'institut national
  • Le niveau de vigilance rouge, le plus élevé, correspond à une canicule "extrême, exceptionnelle par sa durée, son intensité, son extension géographique", avec un fort impact pour la santé et les activités humaines

BORDEAUX: La vague de chaleur en cours depuis vendredi est encore montée d'un cran lundi, avec des températures "d'un niveau exceptionnel" dans le sud-ouest, où 12 départements sont classés en vigilance rouge canicule jusqu'à mardi par Météo-France.

Cet épisode, le deuxième à toucher le pays cet été après celui du 19 juin au 4 juillet, est aussi le 51e enregistré depuis 1947, selon l'institut national.

Le niveau de vigilance rouge, le plus élevé, correspond à une canicule "extrême, exceptionnelle par sa durée, son intensité, son extension géographique", avec un fort impact pour la santé et les activités humaines.

De la Charente-Maritime à l'Aude sont attendues des maximales "très fréquemment supérieures à 40°C", avec "localement" des pointes à 42°C, selon l'institut national.

"On pourrait s'approcher de niveaux records, enregistrer des valeurs inédites mais le record national de 46°C devrait rester hors d'atteinte", a précisé la prévisionniste Christelle Robert lors d'un point presse dimanche.

Face à cette situation, l'heure est à l'adaptation des rythmes de vie et de travail.

"Aujourd'hui je fermerai à 18h00 au lieu de 19h45, je ne peux pas laisser mes vendeurs travailler avec cette chaleur, près des fours à 200 degrés", explique Élodie Rodrigues, cogérante de plusieurs boulangeries dans l'agglomération bordelaise.

"Ce matin, on a commencé beaucoup plus tôt, à 6h00 (...) et on espère boucler à 13h00", souligne Jason Andrés sur un chantier de maison de retraite en cours à Roquefort (Landes).

"L'entreprise nous fournit des bouteilles d'eau qui restent au congélateur toute la nuit et puis on nous laisse à disposition des locaux qui sont climatisés", ajoute l'ouvrier.

Au restaurant du village, les employés souffrent aussi : "dès qu'on allume la friteuse, le four et le bain-marie, il fait très, très chaud", confiait Anna Ribeiro avant de servir 80 à 130 couverts à la mi-journée.

Un épisode durable 

La vague de chaleur, qui s'est étendue et intensifiée depuis trois jours sur la moitié sud de l'Hexagone, "progresse vers le nord" selon Météo-France. "On dépassera les 30°C partout en France", avec des températures qui devraient atteindre 38°C dans le Centre-Val de Loire et 34°C en Ile-de-France, précise l'organisme.

Outre les 12 départements en vigilance rouge, 41 autres, situés principalement au-dessous d'une ligne allant de la Vendée au Doubs, ont été placés en vigilance orange. Seuls 13 échapperont aux chaleurs extrêmes, dans une frange allant de la Normandie à l'Alsace en passant par le Nord, les autres étant en vigilance jaune.

Ces niveaux d'alerte ont été reconduits pour mardi par Météo-France, qui s'attend à ce que l'épisode dure "au moins" jusqu'au week-end.

À Mont-de-Marsan, Linda Lahbib, aide-soignante qui "préfère la chaleur au froid", prévoit néanmoins de "rester dedans" lundi après-midi, profitant "d'une salle refaite et climatisée" dans le centre d'accueil pour handicapés où elle travaille.

Même stratégie pour des touristes belges à Lyon: "on visite le matin, à l'ombre, en buvant beaucoup d'eau", relate Sébastien Hoet avant de passer l'après-midi dans la piscine de sa maison de location.

À Limoges où l'on attend 40°C, habitants et visiteurs pourront se mettre au frais dans les musées municipaux, ouverts gratuitement pour l'occasion.

Risque d'incendies 

L'agence Santé publique France appelle à s'hydrater régulièrement en évitant l'alcool et le café", conseillant aussi de "réduire ses activités physiques".

Le ministère de la Santé a activé le numéro vert Canicule info service au 0800 06 66 66, joignable de 8h à 19h (appel gratuit depuis la France métropolitaine).

En parallèle, Météo-France a classé 20 départements, principalement dans l'ouest et le sud du pays, en risque élevé pour les incendies lundi.

Dans l'Aude, où un vent sec et chaud a compliqué l'action des pompiers dimanche pour maîtriser le gigantesque feu qui a parcouru 16.000 hectares de végétation, le mercure devrait se maintenir entre 40 et 42°C sur les Corbières.

 


Gaza: l’Élysée met en garde contre « un désastre annoncé » et appelle à une mission de stabilisation sous mandat de l’ONU

« Il faut mettre fin à cette guerre maintenant avec un cessez-le-feu permanent », martèle le président, qui réaffirme la volonté de la France « d’agir pour la sécurité d’Israël, la libération des otages, la reprise des actions humanitaires et le soutien aux populations palestiniennes ». (AFP)
« Il faut mettre fin à cette guerre maintenant avec un cessez-le-feu permanent », martèle le président, qui réaffirme la volonté de la France « d’agir pour la sécurité d’Israël, la libération des otages, la reprise des actions humanitaires et le soutien aux populations palestiniennes ». (AFP)
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  • Dans un communiqué diffusé ce lundi, l’Élysée parle d’« un désastre annoncé d’une gravité sans précédent » et d’« une fuite en avant dans la guerre permanente »
  • Selon le chef de l’État, « les otages israéliens et les populations de Gaza vont continuer d’être les premières victimes de cette stratégie »

PARIS: Le président de la République a vivement réagi à l’annonce par le cabinet israélien d’une extension de son opération militaire à Gaza-ville et aux camps de Mawasi, assortie d’une réoccupation par Israël.
Dans un communiqué diffusé ce lundi, l’Élysée parle d’« un désastre annoncé d’une gravité sans précédent » et d’« une fuite en avant dans la guerre permanente ». Selon le chef de l’État, « les otages israéliens et les populations de Gaza vont continuer d’être les premières victimes de cette stratégie ».

Appel à un cessez-le-feu permanent
« Il faut mettre fin à cette guerre maintenant avec un cessez-le-feu permanent », martèle le président, qui réaffirme la volonté de la France « d’agir pour la sécurité d’Israël, la libération des otages, la reprise des actions humanitaires et le soutien aux populations palestiniennes ».
Pour atteindre ces objectifs, Paris propose la mise en place « d’une mission de stabilisation sous mandat de l’ONU » afin de sécuriser la bande de Gaza, protéger les populations civiles et soutenir « une gouvernance palestinienne qui seule peut répondre aux besoins des habitants, et conduire des opérations de désarmement et de démilitarisation du Hamas ».
Le chef de l’État rappelle que cette orientation a déjà été actée « à New York avec nos partenaires lors de la conférence de juillet ». Il s’oppose fermement à une nouvelle opération militaire israélienne, et plaide pour « une coalition internationale sous mandat de l’ONU pour lutter contre le terrorisme, stabiliser Gaza, soutenir ses populations et mettre en place une gouvernance de paix et de stabilité ».

Un accord inédit avec l’Arabie saoudite
Le président souligne qu’avec l’Arabie saoudite, la France a obtenu « pour la première fois un appel unanime des acteurs régionaux à un désarmement du Hamas et à la libération des otages ».
Il appelle désormais le Conseil de sécurité à « travailler pour mettre en place cette mission et la doter d’un mandat », précisant avoir demandé à ses équipes « d’y travailler sans tarder avec nos partenaires ».
Pour l’Élysée, cette initiative représente « la seule voie crédible pour sortir d’une situation inacceptable pour les familles d’otages comme pour les Gazaouis » et « commencer à mettre fin à la guerre permanente, afin de reconstruire la paix et la sécurité pour tous ».


François Bayrou mise sur YouTube pour convaincre les Français d’accepter son budget de rigueur

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  • Une stratégie inhabituelle, presque désespérée aux yeux de certains observateurs, mais que l’intéressé revendique comme un passage obligé : « J’essaie de vous regarder dans les yeux »
  • Entre les « efforts choisis » et les « sacrifices subis », Bayrou veut faire comprendre que la France doit reprendre en main son destin

PARIS: Conscient de son impopularité record et de l’hostilité grandissante face à son plan de rigueur, le Premier ministre français François Bayrou a choisi de prendre les devants.
Depuis mi-juillet, il s’est lancé dans une série de vidéos intitulée FB Direct sur YouTube, pour expliquer directement aux Français pourquoi son budget 2026 impose 43,8 milliards d’euros d’économies et pourquoi, selon lui, ces sacrifices sont inévitables.
Une stratégie inhabituelle, presque désespérée aux yeux de certains observateurs, mais que l’intéressé revendique comme un passage obligé : « J’essaie de vous regarder dans les yeux », répète-t-il face caméra, veste tombée mais ton professoral, en martelant les chiffres de la dette et les risques encourus si rien n’est fait.

Entre les « efforts choisis » et les « sacrifices subis », Bayrou veut faire comprendre que la France doit reprendre en main son destin.
Il est sous pression et le temps joue contre lui : menacé de censure par la gauche comme par le Rassemblement national, et dépourvu de majorité solide à l’Assemblée nationale, il n’a pas d’autre option que de tenter d’attirer l’opinion publique à lui.
Il parie sur la possibilité de contourner l’opposition parlementaire en parlant directement aux citoyens, dans l’espoir que la pression populaire fasse plier ses adversaires politiques.

Le Premier ministre est loin d’être une personnalité flamboyante ; il ne fait pas non plus d’étincelles. En revanche, il est un concentré d’acharnement patient et d’endurance, ce qui lui a souvent valu d’avoir gain de cause.
Cette méthode viendra-t-elle à bout des réticences, voire du rejet ferme, d’une majorité de Français à l’égard de ses choix budgétaires ?
Rien n’est moins sûr : malgré ses velléités, les sondages ne montrent pour l’instant aucun frémissement en sa faveur.

Les mesures de suppression de deux jours fériés, gel des retraites, non-remplacement des fonctionnaires partant à la retraite et réforme de l’assurance chômage sont toutes perçues comme brutales et injustes par une large partie de la population.
Dès la présentation des grandes lignes de son budget, les réactions ne se sont pas fait attendre : une pétition intersyndicale a réuni les syndicats français, toutes tendances confondues, pour exiger « l’abandon immédiat de ce budget d’une brutalité sans précédent ».

Paradoxalement, même le patronat ne cache pas ses réserves : il a certes apprécié l’absence de hausse de la fiscalité des entreprises, mais il s’inquiète de certaines mesures telles que la suppression des jours fériés ou la contribution salariale de 0,6 % envisagée en contrepartie.

La menace la plus imprévisible pour Bayrou vient peut-être de la rue. Depuis plusieurs semaines, un mouvement citoyen baptisé « Bloquons tout » appelle à paralyser le pays à partir du 10 septembre. Inspirée par le mouvement des « gilets jaunes » de 2018, cette mobilisation diffuse ses mots d’ordre en ligne, incitant à boycotter les commerces, à faire grève dans tous les secteurs d’activité et à mener des blocages ciblés, comme l’occupation pacifique de lieux symboliques.

Le mot d’ordre, « La France s’arrête », pourrait fédérer des colères diverses : lutte contre la réforme du marché du travail, rejet des zones à faibles émissions, etc.
Sans leader officiel, ce mouvement prend de l’ampleur, avec le soutien affiché de figures historiques des « gilets jaunes » comme Jérôme Rodrigues ou Jacline Mouraud.
Malgré cela, au ministère de l’Intérieur, l’ambiance reste à la prudence : beaucoup de mobilisations virales s’essoufflent sur le terrain. Cependant, le ministère n’exclut pas un scénario de convergence entre ce mouvement spontané et les syndicats déjà vent debout contre le budget Bayrou.

Si le président de la République, Emmanuel Macron, soutient publiquement son Premier ministre et salue « une stratégie claire et solide », l’étau se resserre politiquement.
La cheffe de file du Rassemblement national (extrême droite), Marine Le Pen, affirme qu’« il est impossible pour le RN de ne pas censurer ce gouvernement ». Du côté de la gauche, de La France insoumise (extrême gauche) au Parti socialiste, la condamnation est unanime.

Bayrou sait qu’il joue gros : un échec parlementaire signifierait probablement la fin de son mandat à Matignon. Mais, tenace comme à son habitude, il assume le risque.
Derrière son offensive de communication, c’est un pari presque contradictoire : tenter de convaincre sur un sujet aussi impopulaire qu’un plan de rigueur qui exige du temps… alors que le temps lui manque cruellement.
Les oppositions pourraient déposer une motion de censure dès l’automne ; la rue pourrait s’embraser bien avant si l’appel du 10 septembre prend de l’ampleur. Et pour l’instant, ses vidéos n’affichent que quelques milliers de vues, loin d’un raz-de-marée populaire.

Mais Bayrou persiste et signe, affirmant : « Nous devons être la génération qui décide de faire les efforts nécessaires », prenant en exemple la Grèce et l’Espagne qui, faute d’anticipation, ont dû encaisser des « efforts forcés » autrement plus douloureux.

Reste à savoir si cette méthode pédagogique pourra changer la donne, ou si, comme le prédisent certains de ses détracteurs, l’automne 2025 restera dans l’histoire comme le moment où la stratégie du « YouTubeur de Matignon » s’est fracassée contre la réalité sociale.