Droits de douane : mission de la dernière chance pour les Allemands en Chine

Des voitures destinées à l'exportation en attente d'être chargées sur le « SAIC Anji Eternity », un navire de fabrication nationale destiné à exporter des automobiles chinoises, au port de Yantai, dans la province chinoise du Shandong (est), le 15 mai 2024. (AFP)
Des voitures destinées à l'exportation en attente d'être chargées sur le « SAIC Anji Eternity », un navire de fabrication nationale destiné à exporter des automobiles chinoises, au port de Yantai, dans la province chinoise du Shandong (est), le 15 mai 2024. (AFP)
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Publié le Vendredi 21 juin 2024

Droits de douane : mission de la dernière chance pour les Allemands en Chine

  • Sans compromis d'ici le 4 juillet, la Commission européenne imposera jusqu'à 28% de hausse des droits de douane sur les importations de véhicules électriques chinois
  • Les constructeurs automobiles allemands craignent un conflit commercial majeur avec Pékin qui plomberait leur activité sur ce marché crucial

FRANCFORT: Le numéro deux du gouvernement allemand, Robert Habeck, arrive vendredi à Pékin pour un voyage de la dernière chance dans l'épineux dossier des surtaxes européennes sur les véhicules électriques chinois. Son objectif : éviter une guerre commerciale avec cet important partenaire.

Sans compromis d'ici le 4 juillet, la Commission européenne imposera jusqu'à 28% de hausse des droits de douane sur les importations de véhicules électriques chinois, reprochant à Pékin d'avoir faussé la concurrence en subventionnant massivement ce secteur. Ces tarifs deviendraient définitifs à partir de novembre.

"Ce qui est décisif maintenant, c'est qu'on se parle", avait plaidé le vice-chancelier Robert Habeck après l'annonce de Bruxelles, jugeant que les droits de douane ne sont jamais "que l'ultima ratio et souvent la pire des solutions".

En Chine, le ministre allemand qui occupe le portefeuille de l'Economie et du Climat, s'entretiendra notamment avec ses homologues en charge de l'Industrie et du Commerce.

Même si Robert Habeck "ne parle pas et ne négocie pas au nom de la Commission européenne", comme le rappelle son ministère, cette dernière aura besoin du soutien de la première économie européenne pour avancer dans ce dossier.

Les constructeurs automobiles allemands craignent un conflit commercial majeur avec Pékin qui plomberait leur activité sur ce marché crucial. Pour Mercedes, Volkswagen ou BMW, la Chine représente jusqu'à 36% des volumes de ventes.

Chances limitées

La Chine est restée en 2023 le premier partenaire commercial de l'Allemagne pour la huitième année consécutive, devançant de peu les Etats-Unis.

"M. Habeck espère probablement trouver un accord, ou au moins parvenir à que la Chine ne prenne pas de mesures de rétorsions", explique à l'AFP Jacob Gunter, analyste de l'institut MERICS, un centre de réflexion dédié à la Chine.

Du côté de Pékin, "l'objectif sera d'amener l'Allemagne à jouer un rôle plus important dans l'élimination, ou du moins l'atténuation" des droits de douane européens sur les véhicules électriques, ajoute-t-il.

Il juge très limitées les chances du ministre d'obtenir une baisse des subventions chinoises sur les véhicules électriques.

Convaincre la Chine "de limiter les représailles" serait déjà un résultat honorable, observe M. Gunter.

Pékin a annoncé lundi avoir lancé une enquête antidumping sur les importations de porc et de produits à base de porc en provenance de l'Union européenne, menaçant les exportations espagnoles.

Mais la Chine a parallèlement intérêt à éviter l'escalade avec l'UE au moment où d'autres pays, comme les Etats-Unis, l'Inde, le Brésil, cherchent aussi à protéger leurs économies des importations chinoises, soulignent les experts.

Craintes exagérées

Autre difficulté à gérer pour le ministre de l'Economie : les nombreuses entreprises allemandes présentes en Chine ne sont pas unies sur le discours à tenir vis à vis de Pékin.

Ainsi du côté de la construction mécanique, particulièrement touchée par la concurrence chinoise, on prône une ligne dure : "les subventions injustes des entreprises chinoises par l'Etat doivent cesser", affirme la fédération du secteur (VDMA), demandant à Robert Habeck d'aborder clairement le thème des surcapacités chinoises et "des distorsions de marché qu'elles créent" en Europe.

Preuve que le ministre n'entend pas se faire uniquement le porte-voix des grands constructeurs automobiles, la délégation économique qui l'accompagne ne comprend aucun d'entre eux. A la différence du voyage du chancelier Olaf Scholz à Pékin en avril.

Robert Habeck est aussi issu d'un parti, les Verts, plus critique à l'égard de la Chine que les sociaux-démocrates du chancelier Olaf Scholz.

Les craintes des géants automobiles allemands d'être durement frappés par d'éventuelles représailles chinoises sont d'ailleurs exagérées, juge Jacob Gunter : une augmentation des droits de douanes chinois n'aurait, selon lui, pas d'impact "significatif" car ils exportent surtout en Chine leurs modèles les plus chers, et donc moins sensibles aux hausses de prix.

En revanche, ils subissent en Europe, comme les autres fabricants du Vieux continent, la concurrence des voitures chinoises, moins chères. Les importations de véhicules électriques chinois en Allemagne ont ainsi été multipliées par dix en seulement trois ans, entre 2020 et 2023, d'après l'office national des statistiques.


Pétrole : les huit membres de l'Opep+ annoncent à nouveau une forte hausse de la production

Une fois finalisées, les bases de référence pour 2027 devraient orienter la politique de production après l'expiration de la série actuelle de réductions.
Une fois finalisées, les bases de référence pour 2027 devraient orienter la politique de production après l'expiration de la série actuelle de réductions.
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  • Selon un communiqué, ils vont sortir de terre 411 000 barils supplémentaires par jour, comme en mai et juin, soit trois fois plus que ce qui était initialement prévu.
  • Jorge Leon, analyste chez Rystad Energy estime que c'est « un ajustement stratégique à visée géopolitique.» 

VIENNE, AUTRICHE : Ryad, Moscou et six autres membres de l'OPEP+, qui avaient commencé en avril à rouvrir les vannes du pétrole, ont annoncé samedi une nouvelle hausse de production importante en juillet.

Selon un communiqué, ils vont sortir de terre 411 000 barils supplémentaires par jour, comme en mai et juin, soit trois fois plus que ce qui était initialement prévu.

Outre l'Arabie saoudite et la Russie, l'Irak, les Émirats arabes unis, le Koweït, le Kazakhstan, l'Algérie et Oman ont consenti ces dernières années à des réductions volontaires additionnelles pour un total de 2,2 millions de barils quotidiens. Leur objectif était de doper les prix.

Ils avaient décidé en début d'année d'une réintroduction progressive, mais au printemps, ils ont décidé d'accélérer le rythme. Ce revirement a provoqué une chute des cours de l'or noir à environ 60 dollars le baril, soit leur plus bas niveau depuis quatre ans. 

« L'Opep+ a frappé trois fois : mai était un avertissement, juin une confirmation et juillet un coup de semonce », a commenté Jorge Leon, analyste chez Rystad Energy, pour l'AFP.

« L'ampleur de l'augmentation de la production reflète davantage la dynamique interne de l'offre », estime-t-il. « Il s'agit d'un ajustement stratégique à visée géopolitique. 

Peu après sa prise de fonction, le président américain avait demandé à Ryad de produire davantage pour faire baisser les prix de l'or noir, et donc les prix à la pompe pour les consommateurs.


Trump s'obstine à maintenir ses droits de douane et double ceux de l'acier et de l'aluminium importés

Le président américain Donald Trump tient un graphique alors qu'il prononce un discours sur les droits de douane réciproques lors d'un événement intitulé « Make America Wealthy Again » (Rendre à l'Amérique sa richesse) organisé dans la Roseraie de la Maison Blanche à Washington, DC, le 2 avril 2025. (Photo de Brendan SMIALOWSKI / AFP)
Le président américain Donald Trump tient un graphique alors qu'il prononce un discours sur les droits de douane réciproques lors d'un événement intitulé « Make America Wealthy Again » (Rendre à l'Amérique sa richesse) organisé dans la Roseraie de la Maison Blanche à Washington, DC, le 2 avril 2025. (Photo de Brendan SMIALOWSKI / AFP)
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  • « Nous allons passer les droits de douane sur l'acier de 25 % à 50 %, ce qui va davantage protéger » cette industrie aux États-Unis, a déclaré le président depuis une aciérie du géant de la métallurgie US Steel en Pennsylvanie (est).
  • « Nos industries de l'acier et de l'aluminium vont être plus fortes que jamais », a-t-il écrit.

WEST MIFFLIN, ETATS-UNIS : Le président américain Donald Trump a annoncé vendredi que la surtaxe sur l'acier et l'aluminium passerait à 50 % mercredi prochain, ce qui marque une nouvelle escalade dans son offensive protectionniste, au terme d'une semaine marquée par des revers devant la justice.

« Nous allons passer les droits de douane sur l'acier de 25 % à 50 %, ce qui va davantage protéger » cette industrie aux États-Unis, a déclaré le président depuis une aciérie du géant de la métallurgie US Steel en Pennsylvanie (est).

Il a plus tard précisé sur sa plateforme Truth Social que la mesure entrerait en vigueur le 4 juin et concernerait également l'aluminium.

La surtaxe de 25 % qu'il avait mise en place en mars sur ces métaux touchait également leurs dérivés, comme les cannettes.

« Nos industries de l'acier et de l'aluminium vont être plus fortes que jamais », a-t-il écrit.

Vendredi, devant des ouvriers portant casques de sécurité et vestes de travail avec bandes réfléchissantes, il a affirmé que le niveau des droits de douane serait tel que « personne ne pourra y échapper ». Sa manière à lui d'encourager la production et les achats aux États-Unis. 

Droits de douane sur certains secteurs (acier, aluminium, automobile), certains pays (Chine, Canada, Mexique) ou encore universels, incluant des denrées introuvables sur le sol américain comme le cacao. Le président a érigé un mur de nouvelles taxes sur les produits entrant dans son pays, avant de faire machine arrière en partie.

Deux tribunaux de première instance ont jugé cette semaine qu'il n'avait pas le droit d'imposer certaines de ses taxes. Ceux-ci restent toutefois en vigueur tant que l'affaire n'est pas tranchée définitivement sur le fond. 

Le président américain a également vanté en Pennsylvanie le rapprochement qu'il a lui-même approuvé la semaine dernière entre US Steel et son concurrent japonais Nippon Steel, et sur lequel peu d'informations avaient filtré.

« Le plus important, c'est que US Steel continuera à être contrôlé par les États-Unis, sans cela, je n'aurais pas conclu cet accord », a expliqué Donald Trump, en assurant que Nippon Steel allait injecter 14 milliards de dollars « dans le futur » de US Steel.

Fin 2023, les deux groupes industriels avaient annoncé un projet d'acquisition de US Steel par Nippon Steel pour un montant de 14,9 milliards de dollars (dette comprise).

L'opération, à laquelle Donald Trump s'était lui-même longtemps opposé, est au cœur de la campagne présidentielle américaine de 2024, car elle concerne au premier chef la Pennsylvanie, un État stratégique sur le plan électoral, qui est aussi le berceau de l'industrie sidérurgique aux États-Unis. 

Dans la foulée, vendredi, le syndicat USW, qui représente les salariés de la métallurgie, a exprimé son fort scepticisme dans un communiqué, expliquant ne pas avoir été consulté ni mis au courant des conditions de l'accord.

« C'est facile de publier des communiqués de presse et de faire des discours politiques. En revanche, graver des engagements dans le marbre est plus difficile. Le diable est toujours dans les détails, et c'est particulièrement vrai avec un mauvais protagoniste comme Nippon Steel », cingle le syndicat.


Prêt-à-porter: Naf Naf placé en redressement judiciaire, 600 emplois menacés

Il s'agit de la troisième procédure de la sorte pour l'entreprise française, mais sa direction turque a déclaré vouloir "continuer à faire exister la marque et présenter un plan de redressement", selon la décision du tribunal de commerce dont l'AFP a eu connaissance. (AFP)
Il s'agit de la troisième procédure de la sorte pour l'entreprise française, mais sa direction turque a déclaré vouloir "continuer à faire exister la marque et présenter un plan de redressement", selon la décision du tribunal de commerce dont l'AFP a eu connaissance. (AFP)
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  • L'entreprise emploie en France 588 salariés - 650 dans les 6 derniers mois, a noté le tribunal de commerce de Bobigny (Seine-Saint-Denis)
  • La justice a motivé le placement en redressement judiciaire en arguant "que la société est confrontée à des difficultés de trésorerie qu’elle n’est pas en mesure de surmonter"

PARIS: L'enseigne de prêt-à-porter féminin Naf Naf, qui emploie près de 600 personnes, a été placée vendredi en redressement judiciaire, confrontée à "des difficultés de trésorerie", a appris l'AFP de sources proches du dossier.

Il s'agit de la troisième procédure de la sorte pour l'entreprise française, mais sa direction turque a déclaré vouloir "continuer à faire exister la marque et présenter un plan de redressement", selon la décision du tribunal de commerce dont l'AFP a eu connaissance.

L'entreprise emploie en France 588 salariés - 650 dans les 6 derniers mois, a noté le tribunal de commerce de Bobigny (Seine-Saint-Denis).

La justice a motivé le placement en redressement judiciaire en arguant "que la société est confrontée à des difficultés de trésorerie qu’elle n’est pas en mesure de surmonter" et qu'elle "est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible".

En effet, son passif s'élève à 44 millions d'euros quand son chiffre d'affaires en 2024 a atteint 47 millions d'euros.

Mais le tribunal a estimé que "sur les déclarations du débiteur et la présentation de son prévisionnel d’activité ainsi que du montant de la trésorerie disponible, il existe des perspectives de redressement".

La société bénéficie donc d'une période d'observation de six mois et sa situation sera rééxaminée lors d'une audience fixée au 23 juillet.

En juin 2024, le repreneur turc Migiboy Tekstil s'était engagé à sauver 90% des emplois et conserver une centaine de boutiques en propre. A l'époque, la société a offert plus de 1,5 million d'euros pour reprendre l'enseigne française.

Ce faisant, l'entreprise turque avait sauvé 521 emplois sur 586 et une centaine de boutiques en France, et repris les filiales en Espagne, en Italie et en Belgique.

"Si ce jugement écarte pour l'instant la liquidation immédiate de l'entreprise, il ouvre une grande période d'incertitude", s'est émue la CFDT dans un communiqué transmis à l'AFP.

"La direction et l'actionnaire devront prouver que Naf Naf peut continuer à fonctionner au moins temporairement, ce qui suppose d'approvisionner les magasins (...) et de trouver une nouvelle organisation logistique, le tout avec des marges de manœuvre financières très contraintes", s'est encore inquiété le syndicat.

Les magasins "vont être approvisionnés car il y a 800.000 articles en stock et la société écoule 140.000 articles par mois", a argumenté la direction devant le tribunal.

Mais même si ce plan de redressement aboutit, "une réorganisation drastique avec des fermetures de magasins et une nouvelle réduction du siège sont très probables", a jugé la CFDT. Sans compter le scénario catastrophe: "A l'inverse, si ces conditions ne sont pas remplies, se profilera une liquidation avec vente au plus offrant des magasins, des stocks et de la marque, avec un impact social désastreux".