Une «transition» aux contours encore flous au lendemain du coup d'Etat au Gabon

Des soldats lancent le général Brice Clothaire Oligui Nguema en l'air à Libreville, au Gabon, le mercredi 30 août 2023. (AP)
Des soldats lancent le général Brice Clothaire Oligui Nguema en l'air à Libreville, au Gabon, le mercredi 30 août 2023. (AP)
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Publié le Jeudi 31 août 2023

Une «transition» aux contours encore flous au lendemain du coup d'Etat au Gabon

  • Tout en regrettant ce putsch, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a donné jeudi le ton qui prévaut à l'étranger, en estimant qu'il avait été précédé par «un coup d'Etat institutionnel car les élections (avaient) été volées»
  • Les médias été témoin, mercredi, de scènes de liesse dans les quartiers populaires de Libreville, où de petites foules applaudissaient copieusement chaque véhicule de militaires ou policiers qui passait

LIBREVILLE: Les Gabonais et la communauté internationale scrutent les apparitions des putschistes à la télévision, avides d'en savoir plus sur la "transition" du général Brice Oligui Nguema, au lendemain de son coup d'Etat qui a mis fin à 55 ans de "dynastie Bongo".

Tout en regrettant ce putsch, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a donné jeudi le ton qui prévaut à l'étranger, en estimant qu'il avait été précédé par "un coup d'Etat institutionnel car les élections (avaient) été volées". Et de marteler que les situations au Gabon et dans d'autres états africains comme le Niger n'étaient pas "équivalentes".

Les médias été témoin, mercredi, de scènes de liesse dans les quartiers populaires de Libreville, où de petites foules applaudissaient copieusement chaque véhicule de militaires ou policiers qui passait et hurlaient "Le Gabon est libéré !" ou "A bas les Bongo !".

"La fête de l'Indépendance, c'est plus le 17 août, maintenant c'est le 30 août", s'exclame un homme dans un petit bar du quartier populaire Plein Ciel devant des clients tout acquis aux putschistes.

Garde prétorienne

Le 17 août 1960, ce petit pays d'Afrique centrale proclamait son indépendance de la France. Mercredi 30 août 2023, des officiers de la Garde républicaine (GR), garde prétorienne de la famille Bongo depuis des décennies, proclamaient "la fin du régime", moins d'une heure après l'annonce de la réélection d'Ali Bongo Ondimba à la présidentielle de samedi.

Ce dernier, placé en résidence surveillé par les militaires, avait été élu en 2009 à la mort de son père Omar Bongo Ondimba, qui dirigeait sans partage depuis plus de 41 ans ce pays très riche de son pétrole et pilier de la "Françafrique".

Le nouveau pouvoir du général Oligui, chef de la GR, a maintenu le couvre-feu décrété par le gouvernement déchu le jour du scrutin samedi. Mais jeudi matin, la vie avait repris son cours tout à fait normal à Libreville, rapportent des journalistes de l'AFP.

Seul signe de quelque chose d'inhabituel: d’interminables files d'attente devant les boulangeries pour se procurer ce pain que les Gabonais consomment massivement à chaque repas.

Et dans le quartier huppé de Sablière, les deux voies d'accès à la résidence des Bongo sont barrées par deux imposants véhicules blindés de la GR et parcourues par ses "bérets verts" lourdement armés, le visage souvent couvert par un masque noir.

Après avoir été porté en triomphe par des centaines de ses hommes mercredi, le général Oligui, pourtant un homme du sérail déjà très proche de feu Omar Bongo, a été proclamé, par "l'ensemble des chefs" de corps de l'armée, "président de transition". Mais sans que soit indiqué pour combien de temps ni à la tête de quelles institutions.

Liesse

Les Gabonais comme le personnel des chancelleries étrangères jeudi avaient donc toujours les yeux rivés sur les deux chaînes de télévision - Gabon 24 et Gabon 1ère - les seuls canaux de communication du nouveau pouvoir.

Ces chaînes qui vantaient auparavant à chaque JT les actions d'Ali Bongo et son gouvernement en ignorant, voire en vilipendant, l'opposition, diffusent désormais en boucle les apparitions des putschistes et des reportages sur la foule en liesse qui les acclame.

Chacun veut savoir si et quand le nouvel homme fort du Gabon --fidèle aide de camp d'Omar Bongo jusqu’à son dernier souffle en 2009, promu dix ans plus tard à la tête de la GR chargée de protéger son fils-- rendra le pouvoir aux civils.

A l'annonce de leur putsch, les militaires avaient fustigé des élections truquées mais surtout "une gouvernance irresponsable et imprévisible". Le Gabon est gangrené depuis des décennies par une corruption endémique, surtout au sommet de l'Etat.

Ali Bongo, principal héritier de l'immense fortune d'Omar, propriétaire de nombreuses résidences de luxe notamment en Grande-Bretagne et en France, a été jusqu'alors épargné, en tant que chef d'Etat, par la procédure judiciaire dite des "biens mal acquis" en France, dans laquelle neuf autres enfants du "patriarche" décédé en 2009 sont inculpés notamment pour "recel de détournement de fonds publics".

«Trahison» et «manipulation»

Pour l'heure, les putschistes semblent également lui faire grâce de ces accusations. Ils qualifient Ali Bongo de "Gabonais normal," "mis à la retraite". Mais ils ont arrêté son fils Noureddin Bongo Valentin et six autres membres dits de la "jeune garde" au sein de la présidence, que l'opposition et les militaires accusent d'être les "vrais dirigeants" du pays, manipulant un Ali Bongo "affaibli" par les séquelles d'un grave AVC en 2018.

Ils sont accusés par les putschistes notamment de "haute trahison", "détournements massifs de deniers publics" et "falsification de la signature" du chef de l'Etat.

La plateforme de l'opposition Alternance 2023, qui avait annoncé la victoire de son champion Albert Ondo Ossa samedi, est restée extrêmement silencieuse depuis le coup d'Etat, mais a promis une conférence de presse jeudi après-midi.

Aucun de ses responsables n'a demandé publiquement aux militaires de reconnaître la victoire de M. Ondo Ossa et lui confier les rênes du pays. "Personne ne sait ce qui se cache derrière un coup d'Etat (...) mais le pays a besoin d'être relancé économiquement", suggère anonymement l'un d'eux à l'AFP. "Le coup d'Etat c'est bien, mais place aux solutions", renchérit un autre.


Roumanie : Macron dénonce des «ingérences» qui «sapent l'intégrité de nos démocraties»

Le Premier ministre britannique Keir Starmer et le président français Emmanuel Macron (à droite) s'expriment avant le sommet de la Communauté politique européenne (CPE), à Tirana, le 16 mai 2025. (AFP)
Le Premier ministre britannique Keir Starmer et le président français Emmanuel Macron (à droite) s'expriment avant le sommet de la Communauté politique européenne (CPE), à Tirana, le 16 mai 2025. (AFP)
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  • En Pologne, les sites du parti centriste du Premier ministre Donald Tusk étaient hors service vendredi en raison d'une cyberattaque, à deux jours du premier tour de l'élection présidentielle de dimanche.
  • "La Moldavie (est) victime chaque jour des ingérences russes (..) Les échéances électorales en cours, là aussi, on le sait très bien, font l'objet de telles ingérences", a martelé le président français

TIRANA: Le président français Emmanuel Macron a dénoncé vendredi des "ingérences" dans les élections à venir en Europe, notamment en Roumanie, estimant qu'elles "sapent l'intégrité de nos démocraties".

"Nous voyons à travers nos élections, la Roumanie le vit en ce moment, la Moldavie l'a vécue il y a très peu de temps, (que) nous avons très clairement des menaces qui sapent l'intégrité de nos démocraties, qui minent leur résilience", a-t-il dit en ouverture d'un sommet de la Communauté politique européenne (CPE) à Tirana.

Le candidat d'extrême droite George Simion fait figure de favori du second tour de la présidentielle qui se tiendra dimanche en Roumanie.

Un scrutin scruté de près après l'annulation du vote du 24 novembre sur des suspicions d'ingérence russe en faveur du précédent candidat d'extrême droite, critique de l'UE et de l'Otan, Calin Georgescu.

En Pologne, les sites du parti centriste du Premier ministre Donald Tusk étaient hors service vendredi en raison d'une cyberattaque, à deux jours du premier tour de l'élection présidentielle de dimanche.

"La Moldavie (est) victime chaque jour des ingérences russes (..) Les échéances électorales en cours, là aussi, on le sait très bien, font l'objet de telles ingérences", a martelé le président français.

"Nous subissons des manipulations lors des périodes électorales, mais (aussi) des ingérences informationnelles étrangères à peu près tout le temps. Et c'est quelque chose qui sape la sécurité démocratique de notre Europe", a-t-il poursuivi.

Le chef de l'Etat a appelé les dirigeants du continent européen, réunis à Tirana, à "mieux protéger les infrastructures critiques face aux cyberattaques", à renforcer les "cadres réglementaires sur les contenus illicites en ligne" et à "traquer les flux financiers qui alimentent ces actions hybrides".

"Sinon, en particulier la Russie, ils continueront de déstabiliser nos opinions publiques pour bouger les lignes", a-t-il dit.


L'administration Trump dénonce les «menaces» d'un ancien patron du FBI et ouvre une enquête

Les autorités fédérales américaines ont annoncé jeudi enquêter sur la "menace" formulée selon eux contre Donald Trump par James Comey, ancien patron du FBI devenu bête noire du président américain. (AFP)
Les autorités fédérales américaines ont annoncé jeudi enquêter sur la "menace" formulée selon eux contre Donald Trump par James Comey, ancien patron du FBI devenu bête noire du président américain. (AFP)
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  • "L'ancien directeur déshonoré du FBI James Comey vient d'appeler à l'assassinat du président Trump", a écrit sur X la ministre de la Sécurité intérieure Kristi Noem
  • Elle a ajouté que son ministère ainsi que le Secret Service, le service chargé de la protection du président, "mènent l'enquête sur cette menace"

WASHINGTON: Les autorités fédérales américaines ont annoncé jeudi enquêter sur la "menace" formulée selon eux contre Donald Trump par James Comey, ancien patron du FBI devenu bête noire du président américain.

Dans une publication Instagram depuis retirée, James Comey a partagé une photo montrant des coquillages former le message "86 47" dans le sable, le premier chiffre étant parfois utilisé pour signifier le souhait de faire partir, voire de tuer, quelqu'un, le second pouvant se référer à Donald Trump, 47e président des Etats-Unis.

"L'ancien directeur déshonoré du FBI James Comey vient d'appeler à l'assassinat du président Trump", a écrit sur X la ministre de la Sécurité intérieure Kristi Noem.

Elle a ajouté que son ministère ainsi que le Secret Service, le service chargé de la protection du président, "mènent l'enquête sur cette menace."

"Cela nous inquiète tous gravement, et doit être pris au sérieux", a dit sur X Taylor Budowich, un chef de cabinet adjoint de la Maison Blanche.

James Comey -- brutalement limogé par Donald Trump en 2017 pendant qu'il enquêtait sur des soupçons d'ingérences étrangères -- a ensuite partagé un message sur son compte Instagram.

"J'ai publié plus tôt une photo de coquillages que j'ai vus ce matin lors d'une balade sur la plage, et j'ai estimé que c'était un message politique. Je ne m'étais pas rendu compte que certaines personnes associaient ces chiffres avec de la violence. Je n'ai jamais eu cela à l'esprit, mais je m'oppose à toute force de violence, et j'ai donc retiré la publication", a-t-il écrit.

Donald Trump a réchappé en juillet dernier à une tentative d'assassinat lors d'un meeting de campagne en Pennsylvanie.


Détention de Sansal: ses filles «impuissantes» en République tchèque

Arrêté mi-novembre à l'aéroport d'Alger, l'écrivain âgé de 80 ans a été condamné fin mars à cinq ans de prison pour, entre autres, atteinte à l'intégrité du territoire algérien. (AFP)
Arrêté mi-novembre à l'aéroport d'Alger, l'écrivain âgé de 80 ans a été condamné fin mars à cinq ans de prison pour, entre autres, atteinte à l'intégrité du territoire algérien. (AFP)
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  • "Il est triste que des personnes soient emprisonnées pour avoir librement exprimé leur opinion et malheureusement, notre père est l'une de ces personnes", a déclaré l'aînée après avoir reçu la distinction
  • "Dieu seul sait dans quel état mental il se trouve", car il est "isolé sans aucune information", a-t-elle ensuite déploré auprès de l'AFP

PRAGUE: Les deux filles de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, condamné à cinq ans de prison, ont fait part à l'AFP de leur "sentiment d'impuissance totale", depuis la République tchèque où elles habitent, pour obtenir la libération de leur père.

Rencontrées à l'ouverture du salon du livre de Prague, Nawal, 53 ans, et Sabeha, 50 ans, ont réceptionné jeudi un prix pour la promotion de la liberté d'expression décerné à leur père.

"Il est triste que des personnes soient emprisonnées pour avoir librement exprimé leur opinion et malheureusement, notre père est l'une de ces personnes", a déclaré l'aînée après avoir reçu la distinction.

"Dieu seul sait dans quel état mental il se trouve", car il est "isolé sans aucune information", a-t-elle ensuite déploré auprès de l'AFP.

"La seule personne autorisée à lui rendre visite, c'est probablement sa femme, mais nous ne savons rien" et elle est surveillée, a-t-elle ajouté.

Alors que le dissident, atteint d'un cancer, suit "actuellement un traitement de radiothérapie", ses filles ont échangé pour la dernière fois par courrier électronique avec lui en 2023 et n'ont aucune nouvelle, à part des coupures de presse que leur font passer l'ambassade tchèque à Alger.

Elles ont adressé une lettre ouverte au président français Emmanuel Macron et écrit à son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune. "Nous avons aussi écrit à mon père. Mais nous n'avons pas reçu de réponse, il ne s'est rien passé", explique Nawal.

"Monnaie d'échange" 

Perdue face aux méandres du système algérien, cette spécialiste en informatique s'est tournée vers l'interface d'intelligence artificielle ChatGPT et sur ses conseils, elle envisage de contacter des organisations comme Amnesty International pour accentuer la pression.

Nées en Algérie, les filles de Boualem Sansal ont vécu en Tchécoslovaquie, le pays de leur mère, après la séparation dans leur petite enfance de leurs parents, qui s'étaient rencontrés dans le cadre d'un échange universitaire.

Le régime communiste les surveillait, comme toutes les personnes ayant de la famille à l'étranger, et si elles ont passé leurs vacances à Alger chaque année, Nawal n'y est plus retournée depuis l'âge de 20 ans et n'a pas revu son père depuis.

Sa soeur et elle habitent toujours près de Prague.

Arrêté mi-novembre à l'aéroport d'Alger, l'écrivain âgé de 80 ans a été condamné fin mars à cinq ans de prison pour, entre autres, atteinte à l'intégrité du territoire algérien.

Il lui est reproché d'avoir repris à son compte la position du Maroc, selon laquelle le territoire de ce pays aurait été tronqué sous la colonisation française au profit de l'Algérie.

Il a fait appel.

"Je crois que mon père est un pion ou une monnaie d'échange, une sorte d'otage, parce qu'ils essaient probablement d'obtenir la libération de certains terroristes condamnés en France", a détaillé Nawal, sa soeur Sabeha saluant en lui "un vrai patriote".

L'Algérie et la France traversent depuis l'été dernier une crise diplomatique marquée ces derniers jours par une nouvelle série d'expulsions de fonctionnaires de part et d'autre. Toutes les coopérations sont gelées.

Athée, Boualem Sansal est critique d'un pouvoir qui, selon lui, se maintient depuis trop longtemps contre la volonté des Algériens. "Il contrôle totalement le pays et dispose de tous les moyens", estimait-il dans Le Figaro en 2019.