Démilitarisation de Gaza: un euphémisme qui signifie «destruction totale»?

Une photo prise depuis le sud d’Israël, près de la frontière avec la bande de Gaza, le 10 décembre 2023, montre des véhicules blindés israéliens roulant le long de la barrière frontalière alors que la fumée s’élève au-dessus de l’enclave palestinienne au milieu des combats en cours avec le groupe militant palestinien Hamas. (AFP)Des roquettes sont tirées depuis la bande de Gaza vers Israël le 9 décembre 2023, dans le contexte des combats en cours entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas. (AFP)
Une photo prise depuis le sud d’Israël, près de la frontière avec la bande de Gaza, le 10 décembre 2023, montre des véhicules blindés israéliens roulant le long de la barrière frontalière alors que la fumée s’élève au-dessus de l’enclave palestinienne au milieu des combats en cours avec le groupe militant palestinien Hamas. (AFP)Des roquettes sont tirées depuis la bande de Gaza vers Israël le 9 décembre 2023, dans le contexte des combats en cours entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas. (AFP)
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Publié le Lundi 11 décembre 2023

Démilitarisation de Gaza: un euphémisme qui signifie «destruction totale»?

  • Benjamin Netanyahou soutient que seule l’armée israélienne serait responsable de la démilitarisation de Gaza, affirmant que les efforts des forces internationales seraient voués à l’échec
  • En plus de l’augmentation du nombre de morts, à la fin du mois de novembre, quelque 98 000 bâtiments à Gaza auraient été détruits, les estimations suggérant que 40% de l’enclave est détruite

LONDRES: L’objectif d’Israël pour Gaza semble désormais fermement fixé sur la démilitarisation de l’enclave, mais certains experts affirment que l’objectif et la «destruction totale» dans ce conflit sont devenus impossibles à distinguer.

Les combats entre Israël et les militants du Hamas sont entrés dans leur troisième mois le 7 décembre dernier, mais on ne sait toujours pas qui gouvernera Gaza – une région ravagée par la guerre – après le démantèlement du groupe militant palestinien.

Des rumeurs selon lesquelles le gouvernement palestinien en Cisjordanie prendrait le contrôle de la bande de Gaza d’après-guerre circulent, même si le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, rejette cette idée, affirmant que «l’Autorité palestinienne n’est pas la solution».

Que pensent donc les experts de la déclaration de M. Netanyahou selon laquelle l’armée israélienne va démilitariser Gaza, une région toujours considérée par l’ONU comme un territoire occupé?

Tobias Borck, chercheur principal pour la sécurité au Moyen-Orient au Royal United Services Institute, estime que les propos du Premier ministre ne reflètent aucun changement dans la politique israélienne.

«Ces propos visent tout simplement à justifier ce que l’armée israélienne faisait déjà à Gaza. Ce n’est qu’une nouvelle façon de dire “détruisez le Hamas”. Sans pour autant donner une image plus claire de la manière dont cela se traduirait à l’avenir», déclare-t-il à Arab News.

«Parler de démilitarisation n’a rien de nouveau. C’est l’argument israélien dans toute la sphère politique: même s’il y avait un État palestinien indépendant, il devrait être démilitarisé.»

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Des soldats israéliens lors d’une opération terrestre dans la bande de Gaza, le 22 novembre 2023. (AP)

Le 6 décembre, Benjamin Netanyahou a soutenu que seule l’armée israélienne serait responsable de la démilitarisation de Gaza, affirmant que les efforts des forces internationales seraient voués à l’échec.

S’exprimant en hébreu, il déclare: «La bande de Gaza doit être démilitarisée. Seule l’armée israélienne pourrait mener à bien cette mission. Aucune force internationale n’est capable de le faire. Nous avons vu les conséquences de l’intervention des forces internationales ailleurs. Je ne suis pas prêt à fermer les yeux et à accepter une autre entente.»

Tobias Borck rejette l’idée selon laquelle M. Netanyahou avertit les acteurs extérieurs de rester à l’écart, dans la mesure où les États arabes voisins ont déjà qualifié Gaza de «gâchis provoqué par Israël» et que ce dernier serait donc le seul à pouvoir le régler.

Dans l’état actuel des choses, ce «gâchis» se traduit par plus de 17 700 civils tués au cours de l’assaut qui dure depuis deux mois. Sept mille huit cents autres sont toujours portés disparus alors qu’il y a plus de 46 000 blessés. Les autorités sanitaires de Gaza, dirigées par le Hamas, allèguent que «la guerre contre les hôpitaux et les installations médicales de l’enclave se poursuivent sans relâche».

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Des Palestiniens se rassemblent dans un centre de distribution alimentaire à Rafah, au sud de la bande de Gaza, le 8 novembre 2023. (AP)

À la lumière de telles destructions, l’auteur et journaliste palestinien Ramzy Baroud estime qu’Israël a peu de chances de réussir à démilitariser Gaza, soulignant que pour que Benjamin Netanyahou y parvienne, il faudrait d’abord qu’il en prenne le contrôle.

«Dans cette perspective, il faudrait vaincre la résistance. Même si l’armée de M. Netanyahou pénètre dans certaines parties de Gaza, depuis le nord, le centre ou le sud, soumettre les Palestiniens dans l’une des régions les plus rebelles de la planète est non seulement une tâche difficile, mais pratiquement impossible», précise-t-il à Arab News.

«Il ne s’agit pas seulement de la puissance de feu, mais de l’état d’esprit collectif des habitants de Gaza, plus encore de tous les Palestiniens des territoires occupés.»

Tout aussi sceptique quant à la perspective d’une démilitarisation complète de Gaza, Osama al-Charif, analyste et chroniqueur politique jordanien, déclare à Arab News qu’un tel résultat ne serait possible qu’au moyen de la destruction totale de Gaza.

«Pour qu’Israël puisse désarmer Gaza, il devra raser toute la zone de 365 km² et évacuer toute la population, mais cette occasion militaire ne durera pas», poursuit-il.

«Ainsi, ces deux objectifs ne pourront être atteints à moins que les États-Unis n’autorisent une apocalypse de type biblique où des millions de personnes seront poussées dans le désert sous des bombardements incessants et sans précédent, entraînant des dizaines de milliers de morts.»

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De la fumée s’élève parmi les bâtiments détruits dans le nord de Gaza, le 8 décembre 2023, dans le contexte des combats continus entre Israël et le groupe militant Hamas. (AFP)

En plus de l’augmentation du nombre de morts, à la fin du mois de novembre, quelque 98 000 bâtiments à Gaza auraient été détruits, les estimations suggérant que 40% de l’enclave est détruite.

M. Borck soutient que ce que M. Al-Charif définit comme le seul moyen possible de démilitarisation est déjà en train de se réaliser.

«Tout cela tourne autour de la conception qu’Israël a du Hamas, soit une armée terroriste. Il s’agit d’une distinction importante par rapport au simple fait d’être une organisation terroriste, car cela signifie que le Hamas est capable de mener une manœuvre combinée d’armes», affirme-t-il.

«C’est exactement ce que nous avons vu le 7 octobre, après une attaque aérienne et terrestre contre Israël. Ce n’est donc pas une vision injustifiée, mais cela signifie que le Hamas incarne la présence militaire à Gaza. L’armée israélienne tente de détruire toute la capacité militaire du Hamas et, une fois cet objectif atteint, Gaza sera démilitarisée.»

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Des enfants se tiennent aux côtés des combattants des Brigades al-Qassam à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 29 novembre 2023, au sixième jour d’une trêve dans les combats entre Israël et le Hamas. (AFP)

Si Israël en venait à atteindre son objectif de démilitarisation, il n’y aurait qu’une seule issue pour Gaza, selon Tobias Borck.

«De nombreux Israéliens voient l’avenir de Gaza comme le reflet de la Cisjordanie, ce qui signifie une direction palestinienne mise en place pour gérer les écoles, les hôpitaux et ramasser les ordures, idéalement garantissant le maintien de l’ordre intérieur aussi», précise-t-il.

Bloomberg News rapporte cette semaine, citant le Premier ministre palestinien, Mohammed Chtayyeh, que des responsables américains travaillent avec l’Autorité palestinienne sur un plan visant à administrer Gaza une fois la guerre terminée.

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Le Premier ministre palestinien, Mohammed Chtayyeh, et son cabinet prient pour les victimes tuées lors du dernier conflit israélo-palestinien, pendant que les combats entre Israël et le groupe islamiste palestinien Hamas se poursuivent. (AFP)

L’issue privilégiée du conflit serait que le Hamas devienne un partenaire subalterne de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), aidant à construire un nouvel État indépendant comprenant la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est, déclare M. Chtayyeh, basé à Ramallah.

Cependant, selon M. Borck, une reproduction du modèle de gouvernance de la Cisjordanie à Gaza est loin d’être idéale. «Il y aurait énormément de points de contrôle gérés par Israël comme partout en Cisjordanie et cela entraînerait une réorganisation totale de la façon dont vivent les habitants de Gaza», explique-t-il. «Certes, à Gaza, il y avait cette force qui les enfermait, mais dans cet espace, ils pouvaient se déplacer avec une plus grande liberté que les Palestiniens de Cisjordanie.»

Soulignant qu’il ne considère pas cela comme «une bonne idée sous quelque forme que ce soit», mais plutôt comme ce qui semblerait être l’issue du conflit, Tobias Borck soutient qu’Israël occuperait probablement la partie la moins peuplée de Gaza «afin de pouvoir y entrer et en sortir» à chaque fois qu’il percevrait une menace.

Osama al-Charif affirme également qu’Israël s’efforce de créer une zone tampon au nord tout en repoussant la majorité des 2,1 millions d’habitants de Gaza vers le sud et le long de la frontière avec l’Égypte, ajoutant que «même dans ce cas, cet objectif ne sera pas facile à atteindre».

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L’offensive militaire israélienne a provoqué le déplacement de plus d’1,7 million de Palestiniens qui sont, pour la plupart, des femmes et des enfants. (AP)

Une telle démarche pourrait le mettre sur la voie d’une confrontation directe avec l’administration Biden, qui a clairement exprimé son désir de voir l’Autorité palestinienne prendre le contrôle de Gaza à la fin des combats.

M. Al-Charif ajoute: «Ramallah a posé ses propres conditions pour que cela se produise; aucune de ces propositions ne sera acceptée par Benjamin Netanyahou. Les États-Unis sont opposés à tout transfert forcé des Gazaouis, à la partition de l’enclave ou à la réduction de sa zone d’avant-guerre.»

Et, en dépit de l’utilisation continue de son veto lors des appels à un cessez-le-feu de l’ONU, l’administration démocrate s’oppose de plus en plus à la manière dont le conflit se déroule et retire ce qui semblait être un soutien total et inconditionnel à la réponse d’Israël aux attaques du 7 octobre.

Jeudi soir, le plus haut diplomate de l’administration a sévèrement critiqué la façon dont le gouvernement de M. Netanyahou avait géré la guerre, alors qu’il cherchait à réaffirmer la primauté de la sécurité civile.

Aux côtés du secrétaire d’État britannique aux Affaires étrangères, David Cameron, le secrétaire d’État américain, Anthony Blinken, déclare: «Il est indispensable qu’Israël accorde une grande importance à la protection des civils. Et il reste un écart entre l’intention de protéger les civils et les résultats réels que nous observons sur le terrain.»

Le journaliste Ramzy Baroud soutient que les Israéliens feraient bien d’apprendre de «l’un des grands généraux militaires israéliens, le défunt Premier ministre, Ariel Sharon», responsable du retrait de Gaza en 2005 après trente-huit ans d’occupation.

«Sous la pression de la résistance palestinienne qui a combattu l’armée israélienne, qui avait occupé Gaza en juin 1967, dans chaque quartier et à chaque coin de rue, Israël s’est retiré», précise M. Baroud, réitérant sa position selon laquelle la démilitarisation était une tâche impossible.

«À l’époque, la résistance combattait avec très peu d’armes par rapport à ses capacités militaires actuelles, mais M. Sharon savait qu’il ne pouvait pas gagner à Gaza, ordonnant ainsi à son armée de battre en retraite, ou de se redéployer, sous la pression d’une résistance acharnée, menée principalement par des gens ordinaires.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Gaza : Israël dit soutenir « pleinement » le plan américain pour l'aide humanitaire

Le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul (G), accompagné de son homologue israélien Gideon Saar, donne une conférence de presse au musée commémoratif de l'Holocauste Yad Vashem à Jérusalem, le 11 mai 2025, lors de sa visite en Israël. (Photo GIL COHEN-MAGEN / AFP)
Le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul (G), accompagné de son homologue israélien Gideon Saar, donne une conférence de presse au musée commémoratif de l'Holocauste Yad Vashem à Jérusalem, le 11 mai 2025, lors de sa visite en Israël. (Photo GIL COHEN-MAGEN / AFP)
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  • « Israël soutient pleinement le plan de l'administration Trump présenté vendredi par l'ambassadeur des États-Unis en Israël, M. Mike Huckabee », a déclaré M. Saar lors d'une conférence de presse avec son homologue allemand, Johann Wadephul.
  • Depuis des semaines, des responsables de l'ONU et d'ONG multiplient les avertissements sur la pénurie de nourriture, de médicaments et de carburant dans le territoire palestinien assiégé.

JERUSALEM : Gideon Saar, le ministre israélien des Affaires étrangères, a affirmé dimanche que son pays soutenait « pleinement » l'initiative américaine de distribution d'aide humanitaire dans la bande de Gaza, qui ne prévoit pas de participation israélienne directe.

« Israël soutient pleinement le plan de l'administration Trump présenté vendredi par l'ambassadeur des États-Unis en Israël, M. Mike Huckabee », a déclaré M. Saar lors d'une conférence de presse avec son homologue allemand, Johann Wadephul.

En guerre contre le Hamas depuis l'attaque sans précédent perpétrée par le mouvement islamiste palestinien le 7 octobre 2023, Israël bloque l'entrée de toute aide humanitaire dans la bande de Gaza depuis le 2 mars, où celle-ci est vitale pour les 2,4 millions d'habitants.

Depuis des semaines, des responsables de l'ONU et d'ONG multiplient les avertissements sur la pénurie de nourriture, de médicaments et de carburant dans le territoire palestinien assiégé.

« Le Hamas a volé cette aide au peuple et en a tiré profit. Il l'a utilisée pour alimenter sa machine de guerre. Il s'en est servi pour préserver sa position de force, au détriment de la population civile », a-t-il souligné.

« Si l'aide continue d'aller au Hamas plutôt qu'au peuple de Gaza, la guerre ne prendra jamais fin », a-t-il affirmé. 

Vendredi, M. Huckabee a levé un coin du voile sur une nouvelle initiative que les États-Unis comptent mettre en place prochainement pour venir en aide aux Palestiniens.

« Les Israéliens seront impliqués dans la fourniture de la sécurité militaire nécessaire, car c'est une zone de guerre, mais ils ne participeront ni à la distribution de la nourriture, ni même à son acheminement vers Gaza », a affirmé l'ambassadeur américain.

La sécurité aux points de distribution sera assurée par des prestataires privés, tandis que l'armée israélienne se chargera de la sécurité « à distance » pour les protéger des combats en cours, a-t-il ajouté.

Israël n'avait pas encore commenté ces annonces.

L'initiative américaine « permettra à l'aide d'aller directement au peuple », a déclaré M. Saar dimanche. « Le Hamas ne doit en aucun cas pouvoir y mettre la main ».

« Les soldats de l'armée israélienne ne distribueront pas l'aide, ils sécuriseront le périmètre », a-t-il confirmé.

Le chef de la diplomatie israélienne a aussi dit souhaiter coopérer avec « autant de pays et d'ONG que possible » pour la mise en œuvre du plan américain.

Un rapport basé sur un index de définition des stades de la faim à Gaza est attendu lundi.


Un documentaire affirme avoir identifié le meurtrier de Shireen Abu Akleh

Cette photo obtenue par un ancien collègue de Shireen Abu Akleh, journaliste chevronnée d'Al-Jazira, montre son reportage à Jérusalem le 12 juin 2021. (Photo HANDOUT / AFP)
Cette photo obtenue par un ancien collègue de Shireen Abu Akleh, journaliste chevronnée d'Al-Jazira, montre son reportage à Jérusalem le 12 juin 2021. (Photo HANDOUT / AFP)
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  • Qui a tiré ? S'agissait-il vraiment d'un « accident » ? Le documentaire « Who killed Shireen ? » (« Qui a tué Shireen ? »), diffusé par le site indépendant Zeteo, pointe pour la première fois un suspect : le soldat d'élite Alon Scaggio.
  • Alon Scaggio, alors âgé de 20 ans, avait terminé une formation dans les Duvdevan, unité d'élite de l'armée israélienne, trois mois plus tôt, selon le documentaire.

NEW-YORK : Qui a tué Shireen Abu Akleh ? Un nouveau documentaire affirme enfin révéler l'identité du soldat israélien soupçonné d'avoir tué la reporter vedette de la chaîne Al-Jazeera, trois ans après cet événement qui avait endeuillé le Moyen-Orient.

Retour en arrière. Le 11 mai 2022, une « alerte » retentit sur les chaînes d'information du monde entier. La journaliste américano-palestinienne, connue pour sa couverture du conflit israélo-palestinien, vient d'être abattue à l'entrée du camp de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie occupée. Elle portait pourtant un casque et un gilet pare-balles siglé du mot « Press ».

Al-Jazeera et des témoins blâment aussitôt l'armée israélienne. Le Premier ministre israélien de l'époque, Naftali Bennett, estime quant à lui que les tirs proviennent de combattants palestiniens. Dans les semaines qui suivent, les enquêtes journalistiques s'accumulent et révèlent toutes la même origine des tirs : Israël. 

Quelques mois plus tard, l'armée publie les « conclusions » de son enquête interne : « Il y a une forte probabilité que madame Abu Akleh ait été touchée accidentellement par un tir de l'armée israélienne visant des suspects identifiés comme des hommes armés palestiniens ».

Qui a tiré ? S'agissait-il vraiment d'un « accident » ? Le documentaire « Who killed Shireen ? » (« Qui a tué Shireen ? »), diffusé par le site indépendant Zeteo, pointe pour la première fois un suspect : le soldat d'élite Alon Scaggio.

« Israël a tout fait pour cacher l'identité du soldat. Ils ne voulaient pas transmettre cette information aux États-Unis, ne voulaient pas laisser les Américains l'interroger, ne voulaient pas leur transmettre son témoignage, ils ne voulaient pas leur donner son nom », explique à l'AFP Dion Nissenbaum, journaliste à l'origine du film. 

- Israël vs États-Unis -

Aidé notamment par la reporter Fatima AbdulKarim, qui travaille pour le New York Times en Cisjordanie occupée, et par le producteur Conor Powell, cet ex-correspondant du Wall Street Journal au Moyen-Orient a pu recueillir les témoignages de deux soldats israéliens présents à Jénine le 11 mai 2022 ainsi que ceux de hauts responsables américains.

Alon Scaggio, alors âgé de 20 ans, avait terminé une formation dans les Duvdevan, unité d'élite de l'armée israélienne, trois mois plus tôt, selon le documentaire.

« Il l'a tuée intentionnellement. Il n'y a pas de doute à ce sujet. La question est de savoir s'il savait qu'elle était journaliste et plus précisément qu'il s'agissait de Shireen Abu Akleh. Les ordres venaient-ils d'en haut ? Personnellement, je ne pense pas qu'il y ait eu d'ordre. Je ne pense pas qu'il savait qu'il s'agissait de Shireen, mais elle portait un gilet pare-balles tagué +Press+ », explique M. Nissenbaum. 

« Les preuves indiquent un meurtre intentionnel de Shireen Abu Akleh. Savaient-ils qui c'était ? Cela peut faire l'objet d'un débat, mais ils devaient absolument savoir qu'il s'agissait d'une personne des médias ou, au minimum, qu'il ne s'agissait pas d'un combattant », témoigne dans le documentaire un haut responsable de l'administration Biden d'avant Joe Biden sous couvert d'anonymat.

Le documentaire soutient également que les États-Unis n'ont pas fait pression outre mesure pour creuser cette affaire afin de ne pas entacher leur relation avec leur allié.

« Ce n'était pas un sujet dans les échanges entre le président (Joe Biden) et le Premier ministre », déclare le conseiller à la sécurité nationale de M. Bennett, Eyal Hulata.

Le sénateur américain Chris Van Hollen (démocrate) témoigne avoir demandé à Joe Biden, avec des collègues, qu'un rapport détaillé sur cette affaire soit « déclassifié ». En vain. 

- Impunité -

Selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), dont les données remontent à 1992, « il s'agit de la première fois qu'un suspect potentiel est nommé en lien avec le meurtre d'un journaliste par un Israélien ».

L'impunité de ce « meurtre » a, selon cette organisation basée à New York, « donné concrètement à Israël la permission d'en taire des centaines d'autres ». Selon Reporters sans frontières, environ 200 journalistes ont été tués en 18 mois de frappes israéliennes à Gaza. 

Un porte-parole de l'armée israélienne a dénoncé la divulgation « par la famille » du nom d'un soldat « alors qu'il n'y a pas de conclusion définitive » quant à l'identité du tireur.

Mais Alon Scaggio ne pourra jamais répondre aux questions : l'armée souligne qu'il est « tombé lors d'une opération ».

Au début de son enquête, l'équipe de Dion Nissenbaum pensait que le soldat avait été tué à Gaza, avant d'en arriver à la conclusion que sa mort est survenue à Jénine. Le 27 juin 2024, soit près de deux ans après la mort de Shireen Abu Akleh. 


Le ministre saoudien des Affaires étrangères reçoit son homologue iranien à Djeddah

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'adresse à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah, le 7 mars 2025. (AFP)
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  • M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens
  • Cette visite précède d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui se tiendront dimanche à Oman.

RIYAD : Le ministre saoudien des Affaires étrangères Faisal ben Farhane a reçu samedi son homologue iranien Abbas Araqchi à Djeddah, a rapporté la chaîne d'information Al Arabiya.

M. Araqchi s'est rendu à Djeddah pour rencontrer de hauts responsables saoudiens et discuter des questions bilatérales et des développements régionaux et internationaux.

Il devrait ensuite se rendre au Qatar pour participer au sommet du dialogue Iran-Monde arabe à Doha, a déclaré vendredi un porte-parole du ministère iranien.

Cette visite précède également d'éventuelles discussions indirectes entre les États-Unis et l'Iran, qui auront lieu dimanche à Oman.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com