De Lampedusa à la Scala, l'incroyable odyssée des bateaux des migrants

Un détenu ramasse du bois sur un bateau de migrants pour fabriquer des instruments de musique dans le cadre du projet « Violons de la mer » à la prison d'Opera, près de Milan, le 8 février 2024. (AFP)
Un détenu ramasse du bois sur un bateau de migrants pour fabriquer des instruments de musique dans le cadre du projet « Violons de la mer » à la prison d'Opera, près de Milan, le 8 février 2024. (AFP)
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Publié le Mardi 13 février 2024

De Lampedusa à la Scala, l'incroyable odyssée des bateaux des migrants

  • Le président de la fondation Maison de l'Esprit et des Arts aspire à faire jouer les «violons de la mer» dans d'autres théâtres en Europe, «pour toucher l'âme des gens face au drame de la pauvreté»
  • Tous confectionnés par des détenus avec du bois délavé récupéré sur leurs embarcations de fortune, ces «violons de la mer» perpétuent la mémoire des disparus

MILAN: Redonner de la voix à ceux qui gisent au fond de la Méditerranée pour avoir tenté de fuir les guerres ou la famine: des violons fabriqués avec le bois des bateaux des migrants de Lampedusa ont résonné à la Scala de Milan, rendant hommage aux noyés de l'exil.

Tous confectionnés par des détenus avec du bois délavé récupéré sur leurs embarcations de fortune, ces "violons de la mer" multicolores perpétuent la mémoire des disparus, ayant échoué à rallier cet îlot italien au large de la Tunisie.

Riche en émotions, le concert de l'"Orchestre de la Mer" qui a interprété avec brio des oeuvres de Bach et Vivaldi, a été applaudi lundi pendant de longues minutes par des spectateurs visiblement conquis.

Fait inédit, deux détenus de la prison de haute sécurité d'Opera près de Milan, maître d'oeuvre des "violons de la mer", ont suivi le concert depuis le "palco reale", la prestigieuse loge royale généralement réservée aux dignitaires de l'Etat.

"Etre invité à la Scala pour quelque chose que nous avons créée, c'est magique", s'émerveille l'un d'eux, Claudio, 42 ans, costume noir et chemise blanche impeccables. Condamné à perpétuité pour double homicide, il est l'un des quatre apprentis luthiers de la prison.

Sous leurs mains, les bois fissurés et imbibés de gazole des bateaux des migrants, destinés à la casse, se sont métamorphosés en violons, altos et violoncelles, en attendant que "l'Orchestre de la Mer", constitué pour la circonstance, leur insuffle une nouvelle vie.

«Donner une voix aux déchets»

"Nous donnons une voix à tout ce qui est habituellement jeté: le bois des bateaux qui est déchiqueté, les migrants qui fuient la guerre et la misère et sont traités comme des déchets, et les prisonniers auxquels on ne donne pas de deuxième chance", explique Arnoldo Mosca Mondadori, à l'origine du projet.

Président de la fondation Maison de l'Esprit et des Arts, il aspire à faire jouer les "violons de la mer" dans d'autres théâtres en Europe, "pour toucher l'âme des gens face au drame de la pauvreté".

La Méditerranée centrale est la route migratoire la plus meurtrière au monde: 2.498 décès ou disparitions y ont été recensés l'an dernier, soit 75% de plus qu'en 2022.

Dans un enclos de la prison d'Opera, des barques vétustes s'entassent sur l'herbe folle, au milieu d'un ramassis de planches de bois. Un soulier de bébé blanc et rose, un biberon, des couches et un T-Shirt vert minuscule récupérés dans leurs cales témoignent de la présence de nouveau-nés à bord de ces anciens bateaux de migrants.

Ces vêtements pétrifiés par le sel, des bouteilles d'eau vides, des bidons remplis de sable et des chambres à air en guise de gilets de sauvetage, abandonnés avant le débarquement, évoquent des images de migrants entassés dans des embarcations de fortune trop exiguës, fouettées par la mer.

"On sent la mer ici, son odeur est très forte et vous transporte très loin. Même dans les instruments, elle reste présente, mais elle est plus légère", raconte Andrea, 49 ans, occupé à démonter les bateaux et à faire le tri des bois utilisés pour la confection des violons.

«Vivant et utile»

Visage rond et l'oeil rieur, Andrea, qui purge une peine à vie, également pour double homicide, estime que le métier de luthier découvert en maison d'arrêt constitue une "rédemption" pour lui. "En prison, le temps ne passe pas. Mais là, on se sent vivant et utile".

Un peu plus loin, dans l'atelier de lutherie, une petite salle sombre aux fenêtres striées de barreaux, Nicolae, un Roumain de 41 ans, incarcéré depuis 2013, s'affaire à découper un morceau de bois à la scie et prendre ses mesures avant de tailler avec minutie une table d'harmonie.

"En construisant des violons, je me sens comme un autre Nico, je me sens renaître", confie cet homme barbu à la carrure imposante.

Des gouges, canifs, ciseaux, scies et petits rabots à bois sont alignés sur un panneau à outils, fixé à un mur orné d'une croix. Autant d'armes potentielles qui sont scrupuleusement répertoriées en fin de journée par les gardiens.

Debout devant son établi, le maître luthier Enrico Allorto explique avoir dû recourir à une méthode ancestrale du XVIe siècle permettant de "courber le bois au lieu de le creuser" afin de garder intact le vernis des bateaux.

Loin d'être des Stradivarius, ces violons ont "un timbre plus sourd, mais ils ont leur charme et restituent toute la gamme des sons", assure-t-il. "Ils génèrent des émotions chez les musiciens qui les transmettent à leur tour au public."


Réunion vendredi à Genève entre des ministres européens et leur homologue iranien

Les ministres des Affaires étrangères de l'Allemagne, de la France et du Royaume-Uni rencontreront vendredi à Genève leur homologue iranien, Abbas Araghchi, a-t-on appris jeudi de sources diplomatiques. (AFP)
Les ministres des Affaires étrangères de l'Allemagne, de la France et du Royaume-Uni rencontreront vendredi à Genève leur homologue iranien, Abbas Araghchi, a-t-on appris jeudi de sources diplomatiques. (AFP)
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  • La cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas doit également participer à cette réunion, confirmée par Téhéran et Berlin, au moment où les pays européens multiplient les appels à la désescalade
  • Mercredi, l'Elysée avait annoncé une initiative à venir avec les proches partenaires européens de la France visant à "proposer un règlement négocié exigeant, de nature à mettre fin au conflit"

BRUXELLES: Les ministres des Affaires étrangères de l'Allemagne, de la France et du Royaume-Uni rencontreront vendredi à Genève leur homologue iranien, Abbas Araghchi, a-t-on appris jeudi de sources diplomatiques.

La cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas doit également participer à cette réunion, confirmée par Téhéran et Berlin, au moment où les pays européens multiplient les appels à la désescalade après les bombardements israéliens visant à briser le programme nucléaire iranien.

Mercredi, l'Elysée avait annoncé une initiative à venir avec les proches partenaires européens de la France visant à "proposer un règlement négocié exigeant, de nature à mettre fin au conflit".

Israël a lancé le 13 juin une attaque inédite contre l'Iran, son ennemi juré, frappant des centaines de sites militaires et nucléaires et tuant les officiers de plus haut rang ainsi que des scientifiques du nucléaire.

Le président américain Donald Trump a dit ne pas exclure une intervention militaire américaine, suscitant de vives réactions, dont celle de Pékin qui s'est dit opposé à tout "usage de la force".

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio doit rencontrer jeudi à Washington le chef de la diplomatie britannique, David Lammy.

Depuis Paris, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, a souligné que le France et ses partenaires étaient prêts à participer à des négociations visant à obtenir de la part de l'Iran "un retour en arrière durable de son programme nucléaire et de son programme balistique".

Il a insisté sur une "volonté de reprendre les discussions" côté iranien, "y compris avec les Etats-Unis, à condition qu'un cessez le feu puisse intervenir".

L'Iran a accéléré depuis plusieurs années sa production d'uranium hautement enrichi. Téhéran enrichit son uranium à un niveau bien supérieur à la limite fixée par un accord international de 2015 dit JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action).

La France, l'Allemagne, le Royaume-uni et l'UE étaient tous signataires de cet accord qui a été torpillé par Donald Trump lors de son premier mandat.


«Peut-être», «peut-être pas»: Trump entretient l'incertitude sur ses intentions en Iran

Donald Trump a déclaré mercredi depuis la Maison Blanche qu'il n'avait pas encore arrêté sa décision quant à la participation des Etats-Unis aux frappes sur l'Iran lancées par leur allié israélien. (AFP)
Donald Trump a déclaré mercredi depuis la Maison Blanche qu'il n'avait pas encore arrêté sa décision quant à la participation des Etats-Unis aux frappes sur l'Iran lancées par leur allié israélien. (AFP)
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  • Donald Trump a déclaré mercredi depuis la Maison Blanche qu'il n'avait pas encore arrêté sa décision quant à la participation des Etats-Unis aux frappes sur l'Iran lancées par leur allié israélien
  • "Je n'ai pas encore pris de (décision) définitive", a répondu le président américain aux journalistes dans le Bureau ovale. Interrogé sur la possibilité que le régime iranien tombe, il a répondu "ça pourrait arriver"

WASHINGTON: Donald Trump a assuré mercredi n'avoir pas encore pris de décision sur une éventuelle participation des Etats-Unis aux frappes d'Israël contre l'Iran, affirmant devant la presse: "Je vais peut-être le faire, peut-être pas".

"Personne ne sait ce que je vais faire", a ajouté le président américain, lancé dans un long échange avec les journalistes sur la pelouse de la Maison Blanche, où il était venu inspecter l'installation d'un monumental mât de drapeau.

Alors que les spéculations s'intensifient sur une éventuelle participation directe des Etats-Unis à la guerre entre Israël et Iran, après plusieurs jours d'échanges de tirs intenses entre les deux pays ennemis, Donald Trump a plus tard lancé: "Je n'ai pas pris (de décision) finale". Cette fois depuis le Bureau ovale où il recevait des footballeurs de la Juventus Turin.

"J'aime prendre une décision finale une seconde avant la limite", a-t-il ajouté, avant de participer pour la deuxième fois en deux jours à une réunion dans la "Situation Room", la salle de crise en sous-sol de la Maison Blanche où se prennent les décisions militaires les plus sensibles.

"Je ne cherche pas à me battre. Mais si le choix c'est de se battre ou qu'ils aient la bombe nucléaire, il faut faire ce qu'il y a à faire. Et peut-être que nous n'aurons pas à nous battre", a-t-il encore dit, toujours de manière énigmatique.

Le président américain, interrogé sur une possible chute du pouvoir actuel à Téhéran, a estimé que cela "pourrait se produire".

Selon le Wall Street Journal, Donald Trump a dit mardi à des conseillers qu'il avait approuvé des plans d'attaque contre l'Iran mais qu'il les retenait pour voir si Téhéran ne revenait pas sur son programme nucléaire.

"Toutes les options sont sur la table", a indiqué à l'AFP un responsable à la Maison Blanche interrogé à ce sujet.

"Grosse différence" 

Le dirigeant républicain a aussi assuré que l'Iran était entré en contact avec les Etats-Unis pour négocier.

"Oui", a-t-il répondu à la question de savoir si l'Iran avait contacté les Etats-Unis. "Je leur ai dit que c'était très tard pour discuter (...). Il y a une grosse différence entre maintenant et il y a une semaine, n'est-ce pas?".

"Je leur ai dit: +Pourquoi n'avez-vous pas négocié avec moi avant tous ces morts et ces destructions?", a-t-il assuré, estimant qu'il n'était "pas trop tard".

"Ils ont même suggéré de venir à la Maison Blanche", a ajouté Donald Trump.

L'Iran a rapidement démenti. "Aucun responsable iranien n'a jamais demandé à ramper aux portes de la Maison Blanche", a écrit sur X la mission iranienne à l'ONU.

"L'Iran ne négocie PAS sous la contrainte" et "n'acceptera PAS la paix sous la contrainte", a-t-elle encore répondu à l'"ultime ultimatum" décrit par Donald Trump un peu plus tôt.

Le guide suprême iranien Ali Khamenei a proclamé mercredi que son pays "ne se rendra jamais" et mis en garde les Etats-Unis, alliés d'Israël, contre des "dommages irréparables" en cas d'intervention américaine.

Au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avec lequel il s'entretient "tous les jours", Donald Trump a dit mardi de "continuer".

Le président américain a en revanche repoussé l'offre de médiation du président russe Vladimir Poutine, à laquelle il s'était pourtant dit "ouvert" au cours du week-end.

"Il a proposé de faire le médiateur, j'ai dit +Fais-moi une faveur, fais le médiateur pour toi-même. Occupons-nous de la médiation pour la Russie d'abord, ok? Tu peux t'occuper de ça (le conflit au Moyen-Orient) plus tard+", a dit Donald Trump.


Washington annonce fermer son ambassade à Jérusalem jusqu'à vendredi

Les Etats-Unis ont annoncé mardi fermer leur ambassade à Jérusalem pour des raisons de sécurité, au cinquième jour de la confrontation militaire entre Israël et l'Iran, alors que les spéculations autour d'une possible intervention américaine s'intensifient. (AFP)
Les Etats-Unis ont annoncé mardi fermer leur ambassade à Jérusalem pour des raisons de sécurité, au cinquième jour de la confrontation militaire entre Israël et l'Iran, alors que les spéculations autour d'une possible intervention américaine s'intensifient. (AFP)
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  • Le département d'Etat a annoncé mardi la mise en place d'une "task force" pour aider les ressortissants américains au Moyen-Orient à se tenir informés de l'évolution du conflit
  • Les Etats-Unis déconseillent aux Américains de se rendre notamment en Israël et en Irak et de ne surtout pas voyager en Iran, "quelles que soient les circonstances"

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé mardi fermer leur ambassade à Jérusalem pour des raisons de sécurité, au cinquième jour de la confrontation militaire entre Israël et l'Iran, alors que les spéculations autour d'une possible intervention américaine s'intensifient.

"En raison de la situation sécuritaire et conformément aux directives du commandement du front intérieur israélien, l'ambassade des Etats-Unis à Jérusalem sera fermée de demain (mercredi 18 juin) à vendredi (20 juin)", peut-on lire sur un avis publié sur le site de l'ambassade américaine.

"En raison de la situation sécuritaire actuelle et du conflit en cours entre Israël et l'Iran, l'ambassade des Etats-Unis a demandé à tous les employés du gouvernement américain et aux membres de leur famille de continuer à s'abriter sur place à l'intérieur et à proximité de leur résidence jusqu'à nouvel ordre", ajoute l'avis.

Le département d'Etat a annoncé mardi la mise en place d'une "task force" pour aider les ressortissants américains au Moyen-Orient à se tenir informés de l'évolution du conflit.

Les Etats-Unis déconseillent aux Américains de se rendre notamment en Israël et en Irak et de ne surtout pas voyager en Iran, "quelles que soient les circonstances".

Les Etats-Unis ont déjà réduit les effectifs de leur ambassade en Irak pour des raisons de sécurité et autorisé du personnel non essentiel, ainsi que leurs proches, à quitter ce pays et Israël.

Le président américain Donald Trump a réuni mardi à la Maison Blanche son conseil de sécurité nationale, après avoir appelé à la reddition de l'Iran après l'offensive israélienne visant à détruire le programme nucléaire iranien.