La Pologne à l'approche de législatives cruciales et serrées

Le candidat du parti ultranationaliste polonais (Konfederacja), Slawomir Mentzen, s'adresse à ses partisans lors d'un rassemblement préélectoral à Lublin, en Pologne, le 6 octobre 2023. (AFP)
Le candidat du parti ultranationaliste polonais (Konfederacja), Slawomir Mentzen, s'adresse à ses partisans lors d'un rassemblement préélectoral à Lublin, en Pologne, le 6 octobre 2023. (AFP)
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Publié le Vendredi 13 octobre 2023

La Pologne à l'approche de législatives cruciales et serrées

  • Si tous les sondages placent le parti populiste-nationaliste au pouvoir, Droit et Justice (PiS), en première position, il semble impossible qu'il obtienne une majorité absolue
  • Le partenaire le plus probable du PiS serait alors la Confédération qui a appelé à en finir avec l'aide à l'Ukraine

VARSOVIE: Les populistes-nationalistes resteront-ils au pouvoir ? La Pologne se prépare à des élections serrées dimanche, considérées comme cruciales pour l'avenir du pays et dont l'issue, selon les sondages, dépendra des résultats des petits partis, nécessaires pour former une coalition.

Si tous les sondages placent le parti populiste-nationaliste au pouvoir, Droit et Justice (PiS), en première position, il semble impossible qu'il obtienne une majorité absolue.

Selon un sondage réalisé les 9 et 10 octobre par la fondation Ibris, le PiS obtiendrait 33,5% des voix, devant la Coalition civique (centre) 28%, la Troisième voie (chrétien-démocrate) 10,9%, la Gauche 10,1% et la Confédération (extrême droite) 9,2%.

Le partenaire le plus probable du PiS serait alors la Confédération qui a appelé à en finir avec l'aide à l'Ukraine.

Selon cette hypothèse, le PiS et la Confédération obtiendraient ensemble une courte majorité au sein du parlement polonais, qui compte 460 sièges.

Toutefois, un autre sondage réalisé cette semaine par la même organisation montre que les deux partis n'atteignent pas la majorité requise.

En revanche, la Coalition civique, dirigée par l'ancien chef du Conseil européen et ex-Premier ministre Donald Tusk, pourrait être en mesure de former une majorité avec deux autres petits partis: la Troisième voie et la Gauche.

"Le PiS ne formera pas le prochain gouvernement en Pologne", estime Wojciech Przybylski, analyste politique du groupe Visegrad Insight, soulignant qu'une alliance PiS-Confédération semble peu probable.

Selon lui, "l'opposition a désormais plus de chances pour former un prochain gouvernement de coalition".

Ces pommes de discorde entre Varsovie et Bruxelles

La Pologne, membre de l'Union européenne depuis 2004, est souvent accusée d'y jouer les trouble-fête depuis l'arrivée au pouvoir en 2015 de la droite populiste nationaliste qui brigue son troisième mandat successif aux élections législatives de dimanche.

Voici les principaux différends apparus dans les relations récentes entre Varsovie et Bruxelles:

Président du Conseil européen

Début 2017, le gouvernement de Varsovie tente de barrer au Polonais Donald Tusk, aujourd'hui à la tête de l'opposition centriste dans son pays, la route vers un second mandat au poste du président du Conseil européen. Honni par le PiS, l'ancien Premier ministre peut continuer sa mission grâce au soutien de 27 pays face à la voix isolée du pouvoir nationaliste polonais.

L'Etat de droit

L'UE est engagée dans un bras de fer depuis plusieurs années avec le gouvernement polonais à propos de ses réformes judiciaires, accusées de saper l'indépendance des juges.

La Pologne est visée par les procédures de l'article 7 du Traité de l'UE, le mécanisme européen le plus puissant, pouvant conduire jusqu'à la suspension du droit de vote au Conseil européen.

Le pays se voit toujours bloquer l'accès aux plus de 35 milliards d'euros prévus pour lui dans le Plan de relance européen, et à d'autres fonds UE, tout en payant de grosses amendes pour non respect de décisions de la justice européenne.

Primauté des lois nationales 

En juillet 2021, sous l'influence du parti au pouvoir, le Tribunal constitutionnel polonais déclare non conformes à la Constitution les décisions de la Cour de Justice de l'UE (CJUE) à propos des réformes judiciaires polonaises.

Les tensions montent encore quatre mois plus tard, quand le même tribunal, saisi par le Premier ministre Mateusz Morawiecki, conteste la suprématie du droit européen en jugeant certains articles des traités de l'UE "incompatibles" avec la Loi fondamentale polonaise.

A la suite des arrêts contestant la primauté du droit européen, la Commission européenne saisit en 2023 la justice de l'UE contre Varsovie.

Politiques climatiques de l'UE 

En août dernier, la Pologne porte plainte devant la CJUE contre les politiques climatiques approuvées par l'UE. Selon Varsovie ces politiques n’ont pas été correctement évaluées, ont outrepassé les compétences de Bruxelles et menacent l’économie et la sécurité énergétique de la Pologne.

Les 27 ont adopté à la majorité des voix une série de législations sur le climat visant à réduire d'ici 2030 leurs émissions nettes de gaz à effet de serre à 55% par rapport aux niveaux de 1990, et à aider les pays de l'Union à se conformer à l’Accord de Paris sur le changement climatique.

La mine de Turow

Prague saisit en 2021 la justice européenne contre son voisin pour le détournement d'eau engendré par l'énorme mine de charbon à ciel ouvert de Turow en Pologne et pour le non-respect des règles sur le climat. La Pologne est sommée de fermer le site.

Arguant de sa sécurité énergétique dépendante du charbon, la Pologne refuse de se plier aux décisions de la justice européenne et maintient le fonctionnement du site mais cherche finalement un accord avec Prague, déboursant des millions d'euros contre le retrait de la plainte.

La forêt de Bialowieza

En 2018, la Pologne est condamnée par la CJUE pour avoir enfreint, avec des abattages massifs d'arbres, la législation sur la protection de l'environnement.

Selon la CJUE ces opérations ont conduit à la disparition d'une partie de la grande forêt naturelle de Bialowieza (nord-est), un site protégé, classé par l'Unesco au programme Natura 2000.

Varsovie argue de la prolifération exceptionnelle de coléoptères xylophages, rongeurs de bois, mais arrête ces abattages aussitôt.

Migrations 

La Pologne, comme la Hongrie, s'oppose aux règles de la solidarité européenne face aux demandeurs d'asile dans l'UE, notamment au système de quotas de réfugiés prévus lors de la crise des années 2015-2016.

Les deux pays tentent en vain, en 2023, de bloquer un compromis sur une nouvelle politique migratoire européenne.

Rhétorique anti-migrants 

Les partisans du PiS affirment que leur victoire permettra au parti de concrétiser sa vision d'une Pologne puissante et souveraine, fondée sur des valeurs traditionnelles.

"Il n'y a rien de mieux en vue", dit Eugeniusz Krzyszton, un petit agriculteur de 71 ans vivant à Godziszow, un village qui a voté à 89% pour le PiS lors des dernières élections de 2019.

Interrogé sur les problèmes économiques que la Pologne a connus ces dernières années, il répond que "le gouvernement a fait de son mieux".

La campagne a été très polarisée, marquée par une série d'attaques personnelles contre Donald Tusk, orchestrée par le parti au pouvoir qui l'a accusé d'agir dans l'intérêt de Berlin, Moscou et Bruxelles.

Le PiS a intensifié sa rhétorique anti-migrants: le Premier ministre Mateusz Morawiecki a déclaré jeudi que les familles polonaises devraient être protégées contre ces immigrés illégaux "qui n'ont aucun respect pour notre culture".

Selon l'opposition, une victoire du PiS entraînerait des tensions croissantes avec l'Union européenne. L'opposition accuse le gouvernement de préparer un "Polexit", c'est-à-dire la sortie de l'UE.

De nombreux partisans de l'opposition et des organisations non gouvernementales avertissent qu'un troisième mandat des nationalistes affaiblirait davantage les libertés démocratiques, telles que l'Etat de droit et les droits des médias.

"Il est grand temps de revenir à la normale, à l'Etat de droit, à la liberté de choix et d'expression", souligne Monika Pieleszynska, une employée de bureau de 43 ans, lors d'un grand rassemblement de l'opposition ce mois-ci.

Dates clés de l'histoire post-communiste de la Pologne

Voici quelques dates clés de l'Histoire récente de la Pologne :

1989 : Chute du communisme

La Pologne fut dirigée par le Parti communiste de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu'en 1989.

Après des négociations dites de la Table ronde entre le régime du général Wojciech Jaruzelski et l'opposition dirigée par l'icône de la lutte anticommuniste Lech Walesa, les Polonais ont voté le 4 juin 1989 lors d'élections législatives partiellement libres, une première derrière le rideau de fer.

Ces élections ont conduit à un changement non violent de régime et à des réformes démocratiques.

1999 : Adhésion à l'Otan 

En 1999, la Pologne rejoint l'Alliance atlantique, tout comme la République tchèque et la Hongrie. Depuis, elle est protégée par les engagements de l'Otan en matière de défense collective, inscrits à l'article 5 de son traité fondateur.

2004 : Adhésion à l'UE 

La Pologne a rejoint l'Union européenne en 2004, dans le cadre du plus grand mouvement d'élargissement de l'histoire de cette organisation.

À la suite de l'adhésion, des millions de travailleurs polonais ont bénéficié de la liberté de circulation et ont émigré vers d'autres pays de l'UE, créant d'importantes diasporas en Allemagne, aux Pays-Bas, en Irlande et en Grande-Bretagne.

La Pologne n'a pas adopté la monnaie commune de l'Union européenne, l'euro. Elle est sortie relativement indemne de la crise financière mondiale de 2008 et a été le seul Etat membre de l'UE à éviter la récession.

2005 : Premier gouvernement du PiS 

En 2005, le conservateur catholique Jaroslaw Kaczynski, cofondateur et chef du parti Droit et Justice (PiS), remporte les élections législatives.

Peu après, son frère jumeau Lech est élu président.

Le PiS n'est resté au pouvoir que deux ans, la Plateforme civique, un parti libéral et centriste, prenant le relais en 2007 et gouvernant jusqu'en 2015.

2010 : Accident d'avion à Smolensk 

En 2010, un avion transportant le président polonais Lech Kaczynski s'est écrasé dans la forêt près de Smolensk en Russie, tuant les 96 personnes à bord.

La délégation officielle se rendait aux cérémonies commémorant l'assassinat de milliers de Polonais par la police secrète soviétique à Katyn, en 1940.

L'accident a suscité une vive controverse et un débat national, Jaroslaw Kaczynski le qualifiant de "crime de Poutine" et d'"attentat de Smolensk".

La Russie a catégoriquement rejeté toute responsabilité de l'accident, rejetant la faute sur la Pologne.

2015 : Droit et Justice de retour au pouvoir 

En 2015, le PiS a repris le pouvoir en remportant les élections législatives et présidentielles. Depuis, il s'est souvent heurté à l'UE, notamment sur la question de l'Etat de droit et de l'immigration.

Au plus fort de la crise migratoire en Europe, le chef du PiS, Jaroslaw Kaczynski, a marqué des points auprès de l'électorat avec sa rhétorique anti-immigration, notamment en mettant en garde contre les maladies et "toutes sortes de parasites" que les migrants pourraient apporter.

Le gouvernement PiS a refusé de participer à un plan de relocalisation des migrants et d'accueillir une part de demandeurs d'asile arrivés en Grèce et en l'Italie, dans le cadre d'un système européen de quotas.

2022 : Allié de l'Ukraine 

En février 2022, lorsque la Russie a lancé son invasion à grande échelle de l'Ukraine, la Pologne a servi de refuge pour des centaines de milliers de réfugiés fuyant le pays.

Plus de 974.000 réfugiés ukrainiens résident en Pologne.

Varsovie est aussi devenue l'un des plus fidèles alliés de Kiev en termes d'aide militaire.

Elle a souvent appelé les pays de l'Otan à fournir des équipements militaires modernes à l'Ukraine, lui offrant ses propres chars Leopard 2 ainsi que ses chars et ses avions de combat datant de l'ère soviétique.

Avant les élections de dimanche, les relations entre les deux pays se sont détériorées, le PiS imposant un embargo sur les importations des céréales ukrainiennes, Kiev portant l'affaire devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Liens détériorés avec l'Ukraine 

Dorota Dakowska, professeure de science politique à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, estime qu'il s'agira de "l'élection la plus importante" depuis le premier vote de la période post-communiste en 1989.

"Ce qui est en jeu, c'est l'avenir de la démocratie en Pologne et l'avenir de la Pologne en tant que démocratie et Etat de droit", déclare-t-elle.

Kiev aussi observe la situation avec circonspection, car un gouvernement polonais où la Confédération aurait son mot à dire risquerait de détourner Varsovie de sa voie pro-ukrainienne.

La Pologne a compté parmi les principaux soutiens de l'Ukraine au sein de l'UE et de l'Otan, et a accueilli un million de réfugiés ukrainiens, mais la lassitude grandit chez nombre de Polonais.

Le gouvernement s'est brouillé récemment avec l'Ukraine au sujet de l'interdiction d'importations de céréales, arguant de la nécessité de protéger les agriculteurs polonais.

Selon Marcin Zaborowski, expert au sein du groupe de réflexion Globsec, le parti au pouvoir avait adopté une position plus froide à l'égard de l'Ukraine dans le but d'obtenir des votes nationalistes.

"Après les élections, il risque d'être trop tard pour revenir sur cette position, car le mal aura été fait", prévient-il.


Le chef de la diplomatie iranienne se trouve à Moscou pour des consultations "d'une grande importance"

Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, photographié lors d'une conférence de presse au Centre des congrès Lutfi Kırdar, en marge de la 51e session du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'Organisation de coopération islamique (OCI), à Istanbul, le 22 juin 2025. (Photo par OZAN KOSE / AFP)
Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, photographié lors d'une conférence de presse au Centre des congrès Lutfi Kırdar, en marge de la 51e session du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'Organisation de coopération islamique (OCI), à Istanbul, le 22 juin 2025. (Photo par OZAN KOSE / AFP)
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  • « Dans cette nouvelle situation dangereuse nos consultations avec la Russie peuvent certainement être d'une grande importance », a déclaré Abbas Araghchi depuis Moscou, cité par les agences de presse russes.
  • La Russie a fermement condamné dimanche les frappes américaines contre des sites nucléaires en Iran, pays allié de Moscou, les qualifiant de bombardements « irresponsables » contre son principal allié au Moyen-Orient.

MOSCOU : Le chef de la diplomatie iranienne a affirmé lundi s'attendre à des consultations « d'une grande importance » en Russie, où il doit notamment rencontrer Vladimir Poutine, après des frappes américaines sur des sites nucléaires de la République islamique.

« Dans cette nouvelle situation dangereuse (...), nos consultations avec la Russie peuvent certainement être d'une grande importance », a déclaré Abbas Araghchi depuis Moscou, cité par les agences de presse russes.

M. Araghchi, qui avait lui-même annoncé depuis Istanbul qu'il se rendrait dans la capitale russe pour rencontrer le président russe, « est arrivé à Moscou pour des consultations avec le président (russe) et d'autres responsables officiels » dimanche soir, selon l'agence officielle iranienne Irna.

Selon la même source, ces discussions porteront sur « la situation régionale et internationale à la suite de l'agression militaire des États-Unis et du régime sioniste contre l'Iran ». 

La Russie a fermement condamné dimanche les frappes américaines contre des sites nucléaires en Iran, pays allié de Moscou, les qualifiant de bombardements « irresponsables » contre son principal allié au Moyen-Orient.

Dès le 13 juin, au premier jour des frappes israéliennes contre l'Iran, Vladimir Poutine avait déclaré être « prêt » à « jouer un rôle de médiateur afin d'éviter une nouvelle escalade des tensions », selon le Kremlin.

Mais cette proposition a été fraîchement accueillie par l'Union européenne, Bruxelles estimant que la Russie ne pouvait « pas être un médiateur objectif ».

Vendredi dernier, M. Poutine a cherché à tempérer sa proposition de jouer le rôle de médiateur dans le conflit entre l'Iran et Israël, en assurant ne proposer que des « idées » de règlement.

Si la Russie entretient historiquement de bonnes relations avec Israël, ces liens ont été affectés depuis le début de l'offensive russe en Ukraine et de la guerre menée par Israël à Gaza.

À l'inverse, Moscou s'est largement rapproché de Téhéran ces dernières années. En janvier, les deux pays ont signé un traité de partenariat stratégique global visant à renforcer leurs liens, notamment militaires, qui ne comprend néanmoins pas de pacte de défense mutuelle.


L'Iran menace les Etats-Unis après les frappes contre ses sites nucléaires

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  • Un conseiller de l'ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême iranien, a affirmé que les Etats-Unis "n'avaient plus leur place" au Moyen-Orient et qu'ils devaient s'attendre à des "conséquences irréparables" après leur attaque
  • Ali Akbar Velayati, cité par l'agence officielle Irna, a averti que les bases utilisées par les forces américaines pour lancer des attaques contre les sites nucléaires iraniens seraient considérées "comme des cibles légitimes"

TEHERAN: L'Iran a menacé de s'en prendre aux bases militaires des Etats-Unis au Moyen-Orient en représailles aux frappes américaines sans précédent contre les sites nucléaires iraniens, faisant craindre un embrasement hors de contrôle de la région.

Un conseiller de l'ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême iranien, a affirmé que les Etats-Unis "n'avaient plus leur place" au Moyen-Orient et qu'ils devaient s'attendre à des "conséquences irréparables" après leur attaque dans la nuit de samedi à dimanche.

Ali Akbar Velayati, cité par l'agence officielle Irna, a averti que les bases utilisées par les forces américaines pour lancer des attaques contre les sites nucléaires iraniens seraient considérées "comme des cibles légitimes".

Le président américain Donald Trump a exhorté Téhéran à mettre fin au conflit après l'attaque surprise menée dans la nuit de samedi à dimanche, à l'aide de bombardiers stratégiques B-2.

Ces frappes ont visé un site souterrain d'enrichissement de l'uranium à Fordo, ainsi que des installations à Ispahan et Natanz, où l'étendue des dégâts reste à évaluer.

"Dommages monumentaux" 

"Des dommages monumentaux ont été causés à tous les sites nucléaires en Iran, comme le montrent les images satellite. Destruction totale est l'expression qui convient", a affirmé Donald Trump sur les réseaux sociaux.

"Les dégâts les plus importants ont été causés bien en dessous du niveau du sol. En plein dans le mille !!!", s'est-il félicité.

Il a aussi semblé plaider pour un changement de régime à Téhéran, alors même que plusieurs hauts responsables de son administration avaient affirmé plus tôt que ce n'était pas l'objectif de l'intervention américaine.

"Si le régime iranien actuel est incapable de RENDRE A L'IRAN SA GRANDEUR, pourquoi n'y aurait-il pas un changement de régime ???", a lancé Donald Trump sur son réseau social Truth.

Plus tôt, le chef du Pentagone, Pete Hegseth, avait affirmé que les Etats-Unis avaient "dévasté le programme nucléaire iranien".

Ali Shamkhani, un autre conseiller du guide suprême iranien, a cependant affirmé sur X que l'Iran possédait toujours des stocks d'uranium enrichi.

Le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a annoncé une "réunion d'urgence" lundi, estimant impossible à ce stade d'évaluer l'étendue des dégâts.

A Fordo, une usine d'enrichissement d'uranium enfouie sous une montagne au sud de Téhéran, le sol semble avoir été affecté par les frappes et la couleur de la montagne a changé par rapport au 19 juin, selon une analyse d'images satellites de l'AFP à partir des données de la société américaine Planet Labs PBC.

"Terrible erreur" 

Le secrétaire d'Etat américain, Marco Rubio, a quant à lui mis l'Iran en garde contre la tentation de bloquer le détroit d'Ormuz, par lequel transite un cinquième de la production mondiale de pétrole.

"S'ils le font, ce sera une autre terrible erreur. C'est un suicide économique pour eux s'ils le font, et nous avons des options pour y faire face", a déclaré M. Rubio sur Fox News.

"J'encourage le gouvernement chinois à Pékin à les appeler à ce sujet, car il dépend fortement du détroit d'Ormuz pour son pétrole", a-t-il ajouté, alors que la Chine a condamné les bombardements américains contre l'Iran.

A Téhéran, des manifestants ont crié "vengeance" contre les Etats-Unis, selon des images diffusées par la télévision d'Etat.

Alors que le président iranien Massoud Pezeshkian a promis une "riposte" aux frappes américaines, Washington a appelé dimanche soir ses ressortissants dans le monde à une "vigilance accrue" face aux "potentielles manifestations contre les citoyens et intérêts américains à l'étranger".

Devant le Conseil de sécurité de l'ONU, réuni dimanche en urgence, son secrétaire général Antonio Guterres a mis en garde, lui, contre un "cycle sans issue de représailles".

Dimanche soir, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a estimé pour sa part que son pays était "très proche" de ses objectifs de guerre contre l'Iran grâce aux frappes américaines, tout en laissant planer le doute sur la suite des opérations militaires.

L'armée israélienne a annoncé dans la soirée avoir frappé des sites de missiles et d'autres infrastructures militaires dans l'ouest de l'Iran, au dixième jour de la guerre entre les deux pays.

"L'ennemi sioniste a fait une grande erreur, commis un grand crime; il doit être puni et il est en train d'être puni", a écrit sur X le guide suprême iranien Ali Khamenei, accompagnant sa déclaration du dessin d'un crâne avec une étoile de David sur le front en train d'être traversé par des dizaines de missiles.

"Prêts à discuter" 

Avant l'offensive massive lancée le 13 juin par Israël contre l'Iran, Téhéran et Washington menaient depuis avril des pourparlers via la médiation d'Oman pour un accord sur le nucléaire.

Les Etats-Unis sont "prêts à discuter" avec l'Iran sur son programme nucléaire civil, a assuré dimanche Marco Rubio. Mais pour son homologue iranien, Abbas Araghchi, les Etats-Unis et Israël "ont franchi une ligne rouge majeure".

M. Araghchi doit rencontrer lundi à Moscou le président russe Vladimir Poutine, dont le pays a dénoncé des bombardements "irresponsables".

La Corée du Nord, autre allié de Téhéran, "dénonce avec force l'attaque contre l'Iran", selon un porte-parole de sa diplomatie.

L'attaque surprise américaine, baptisée "Marteau de minuit", a été menée à l'aide de sept bombardiers furtifs B-2. Pour la première fois, Washington a eu recours à de puissantes bombes anti-bunker GBU-57, capable de s'enfoncer à des dizaines de mètres de profondeur avant d'exploser.

Israël a lancé le 13 juin une offensive sans précédent contre l'Iran pour empêcher le pays de se doter de la bombe atomique et a frappé depuis le début de la guerre des centaines de sites militaires ou liés au programme nucléaire iranien.

Son armée a aussi décapité l'état-major général des forces armées et tué une dizaine de scientifiques du nucléaire.

L'Iran riposte par des salves de drones et missiles balistiques, la plupart interceptés par les systèmes de défense israéliens.

Côté iranien, la guerre a fait plus de 400 morts et 3.056 blessés, en majorité des civils, selon un bilan officiel. Les tirs iraniens sur Israël ont fait 24 morts, d'après les autorités israéliennes.

 


La BBC retire son documentaire sur Gaza, suscitant l'indignation des internautes

La BBC a décidé de ne pas diffuser un documentaire très attendu sur les médecins de Gaza, invoquant des préoccupations quant au maintien de ses normes d'impartialité dans le cadre du conflit actuel entre Israël et Gaza. (Photo Fournie)
La BBC a décidé de ne pas diffuser un documentaire très attendu sur les médecins de Gaza, invoquant des préoccupations quant au maintien de ses normes d'impartialité dans le cadre du conflit actuel entre Israël et Gaza. (Photo Fournie)
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  • Le film, intitulé "Gaza : Doctors Under Attack", faisait l'objet d'un examen éditorial de la part de la chaîne depuis plusieurs mois.
  • Le réalisateur Ben de Pear et la journaliste Ramita Navai, qui ont travaillé sur le documentaire, ont exprimé leur déception face à cette décision.

LONDRES : La BBC a décidé de ne pas diffuser un documentaire très attendu sur les médecins de Gaza, invoquant des préoccupations quant au maintien de ses normes d'impartialité dans le cadre du conflit actuel entre Israël et Gaza.

Le film, intitulé "Gaza : Doctors Under Attack" (également connu sous le nom de "Gaza : Medics Under Fire"), a été produit par la société indépendante Basement Films et faisait l'objet d'un examen éditorial de la part du radiodiffuseur depuis plusieurs mois.

Dans un communiqué publié le 20 juin, la BBC a déclaré qu'elle avait conclu que la diffusion du documentaire "risquait de créer une perception de partialité qui ne répondrait pas aux normes éditoriales de la BBC". Les droits ont depuis été restitués aux réalisateurs, ce qui leur permet de chercher à être distribués ailleurs.

Cette décision fait suite à l'examen de plus en plus minutieux de la manière dont la BBC couvre la guerre entre Israël et Gaza. Au début de l'année, la chaîne a dû faire face à des réactions négatives après avoir diffusé "Gaza : How to Survive a War Zone", un court métrage raconté par un garçon de 13 ans dont il s'est avéré par la suite qu'il était le fils d'un responsable du Hamas. Cette séquence a donné lieu à près de 500 plaintes, ce qui a entraîné un examen interne et soulevé des questions sur le filtrage, l'exactitude des traductions et l'utilisation de sources dans les zones de conflit.

Des initiés de la BBC ont rapporté que des parties de "Gaza : Doctors Under Attack" avaient été envisagées pour être intégrées dans les programmes d'information existants. Toutefois, des inquiétudes seraient apparues au cours des examens internes, selon lesquelles une diffusion même limitée pourrait nuire à la réputation de neutralité de la BBC, en particulier dans le contexte politiquement chargé de la guerre en cours.

Le réalisateur Ben de Pear et la journaliste Ramita Navai, qui ont travaillé sur le documentaire, ont exprimé leur déception face à cette décision. Ils soutiennent que le film a apporté un regard nécessaire et non filtré sur les conditions auxquelles les travailleurs médicaux sont confrontés à Gaza. "Il s'agit d'un documentaire sur les médecins, sur la réalité des efforts déployés pour sauver des vies sous les bombardements", a déclaré Ramita Navai. "Le mettre de côté, c'est faire taire ces voix.

Les critiques de la décision de la BBC se sont fait entendre sur les médias sociaux et les forums en ligne, accusant la chaîne de céder aux pressions politiques et de censurer les points de vue palestiniens. Un commentateur a écrit : "Désolé, les partisans du gouvernement israélien seraient très offensés si nous montrions les conséquences ... alors nous l'avons mis de côté". D'autres, en revanche, ont défendu la décision, en citant l'importance de la neutralité dans la radiodiffusion de service public.

Un porte-parole de la BBC a déclaré que la décision avait été prise indépendamment de toute influence politique et qu'elle reflétait des lignes directrices éditoriales établies de longue date. "Nous nous sommes engagés à rendre compte du conflit entre Israël et Gaza avec exactitude et équité. Dans ce cas, nous avons conclu que le contenu, dans sa forme actuelle, pourrait compromettre la confiance du public".

Les droits ayant été restitués, Basement Films devrait chercher d'autres moyens de diffusion. Reste à savoir si le documentaire atteindra le public par l'intermédiaire d'un autre diffuseur ou d'une autre plateforme. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com